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De : Aude Léa Rapin
Avec Adèle Exarchopoulos, Souheila Yacoub, Eliane Umuhire, India Hair
Année : 2024
Pays : France
Genre : Science-Fiction, Thriller
Résumé :
France, 2039. Une nuit, des activistes traqués par l’Etat, disparaissent sans laisser aucune trace. Julia Bombarth se trouve parmi eux. A son réveil, elle se découvre enfermée dans un monde totalement inconnu : PLANÈTE B.
Avis :
Parmi les nouveaux visages féminins du cinéma français, Aude Léa Rapin est assurément une cinéaste à suivre de près. À quarante ans, la réalisatrice fut forcément marquée par la guerre de Bosnie, et une fois adulte, elle est partie en Bosnie et y a vécu quelques années, travaillant comme vidéaste sur place. De retour en France et après un détour par la Fémis, Aude Léa Rapin commence à mettre en scène, avec toujours ce conflit, ou du moins la Bosnie, en toile de fond. En dix ans, elle va réaliser beaucoup de courts-métrages et se fait remarquer dans les différents festivals où elle présente ses films. Puis arrive 2020 et « Les héros ne meurent jamais« , son premier long, qu’elle part tourner en partie en Bosnie. La boucle serait-elle bouclée ?
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Pour son deuxième film, Aude Léa Rapin change totalement de registre et s’aventure dans le cinéma de genre, de science-fiction, et le tout sera survolé d’un soupçon de film politique. Film d’anticipation, film tenant joliment ses ambiances au sein de ses deux planètes, ce deuxième film pour Aude Léa Rapin, même s’il a ses limites, se laisse suivre avec beaucoup d’intérêt et de plaisir, et au bout du compte, il se posera même comme une belle surprise, un joli petit coup de cœur et une belle clôture de cette année 2024, même s’il risque fort bien de se faire éclipser par le « Nosferatu » de Robert Eggers.
« »Planète B » est un film étonnant et prenant »
Grenoble, 2039, les accords sur le climat ont échoué et de là est née la cellule R, une cellule d’activistes qui a bien l’intention de continuer à combattre l’état et les sociétés qui ne respectent pas les accords. Julia, la trentaine, est une jeune activiste qui se fait arrêter. À son réveil, elle se trouve sur une plage paradisiaque, et découvre qu’elle est piégée sur « Planète B », la première prison virtuelle…
Depuis quelques années maintenant, nous avons tout un tas de jeunes cinéastes qui ont l’envie d’un cinéma autrement. Si l’on prend juste l’année, nous avons eu, avec plus ou moins de réussite, des films comme « Le successeur » de Xavier Legrand, « Survivre » de Frédéric Jardin, « Les pistolets en plastique » de Jean-Christophe Meurice, « Pendant ce temps sur Terre » de Jérémy Clapin, « Fario » de Lucie Prost, « The Substance » de Coralie Fargeat, « Animale » d’Emma Benestan, « Les femmes au balcon » de Noémie Merlant ou encore « Les Reines du drame » d’Alexis Langlois. Notre cinéma regorge d’envie et d’audace et à cette petite liste, on ajoute donc « Planète B » et son intrigue autour d’une prison virtuelle de laquelle il faut essayer d’en sortir avant de craquer et de dénoncer ceux qui sont dehors.
Scénario original qui part d’un séjour dans un hôtel avec vue sur la Méditerranée, pour sa réalisatrice, « Planète B » est un film étonnant et prenant aussi bien dans ce qu’il raconte, que dans sa structure. Ici, Aude Léa Rapin nous entraîne dans une dystopie qui nous montre un futur qui est loin de faire envie. Un futur où la surveillance de l’état est quasiment omniprésente, et les arrestations, ou plutôt les disparitions, y sont légion. Très riche dans ce qu’il aborde, « Planète B » est aussi un film qui parlera des dérives de la société, de la misère sociale, et bien sûr, il va y avoir l’écologie, avec cette jeunesse qui se « rebelle », ou encore les réfugiés/migrants dont la société prend ce dont elle a besoin d’eux, avant de les rejeter. Puis avec ça, le film s’aventure sur l’emprisonnement, et la torture mentale pour faire craquer ses prisonniers.
« les ambitions du film sont quelque peu freinées par le manque de budget. »
On apprécie aussi l’idée que l’intrigue se passe dans deux mondes, avec dans le monde réel, une enquête afin de découvrir où se trouve les corps de ceux qui sont emprisonnés. Le tout est bien foutu, c’est très sombre dans ce que ça raconte, et au-delà de ça, c’est en permanence prenant et intéressant, même s’il faut aussi dire que le film, ou du moins les ambitions du film, sont quelque peu freinées par le manque de budget. On aura donc quelques raccourcis et autres facilités de scénario qui feront basculer de manière abrupte l’intrigue vers sa résolution. Puis avec ça, sur certains pans de son histoire, le film aurait mérité d’être plus approfondi, notamment dans les motivations du personnage incarné par Marc Barbé, qui se casse la tête à créer une prison virtuelle pour faire craquer ceux qu’il enferme. Une prison qu’il ne peut étrangement pas surveiller…
« Planète B » est aussi un film qui, s’il est freiné d’un côté, ne manque pas d’idées pour nous entraîner dans son histoire, et surtout son futur. Ainsi, on apprécie l’image très marquée des deux mondes, avec d’un côté un monde réel qui est peint avec beaucoup de crédibilité et de cohérence. L’histoire se passant dans un futur pas si éloigné que ça de nous, la réalisatrice peut donc jouer avec ce que l’on connaît déjà et ce qui pourrait y avoir comme technologie, sans que ça donne énormément. Puis il y a cette prison paradisiaque le jour et cauchemardesque la nuit, qui tranche totalement avec le monde réel. On ajoutera à cela des effets spéciaux bien faits et un rythme qui ne faiblit pas, même si l’intrigue use de raccourcis.
« Adèle Exarchopoulos change de registre »
Après avoir été éblouissante dans « L’amour ouf« , Adèle Exarchopoulos change de registre et se glisse dans la peau d’une écoterroriste piégée dans cette prison qui a bien décidé de la torturer, et encore une fois l’actrice est merveilleuse. Avec elle, on pourra compter aussi sur Souheila Yacoub qui tient un personnage très intéressant. L’actrice découverte cette année avec « Making Of » et « les femmes au balcon » se pose comme l’une des plus belles révélations de cette année. Puis çà et là, on aura India Hair, Paul Beaurepaire, Eliane Umuhire, ou encore Marc Barbé, excellent dans la peau « du pourri » de l’histoire.
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Pour son deuxième film, Aude Léa Rapin a vu bien plus grand, et même si elle est freinée en quelque sorte par son budget, elle offre un film qui est franchement intéressant aussi bien dans son fond que dans sa forme, et au-delà de ça, le divertissement est là, les idées fusent, le futur est sombre, les acteurs sont excellents, chacun à sa bonne place, pour une intrigue qui sait se faire prenante jusqu’à son final. Bref, « Planète B« , c’est la bonne surprise de cette fin 2024, et une fois que vous aurez été voir « Nosferatu« , il sera dommage de passer à côté de ce petit film plein d’audace et d’envie de cinéma.
Note : 15/20
Par Cinéted