avril 27, 2024

Reclus – Seuls au Monde

Titre Original : El Paramo

De : David Casademunt

Avec Inma Cuesta, Roberto Alamo, Asier Flores, Alejandra Howard

Année : 2022

Pays : Espagne

Genre : Horreur

Résumé :

Une famille vivant retirée du monde est hantée par une créature maléfique qui tire sa force de leurs peurs. Le jeune Diego réussira-t-il à sauver sa mère ?

Avis :

Le cinéma horrifique espagnol a toujours un attrait particulier. Il faut dire que les réalisateurs talentueux sont nombreux et il se dégage bien souvent un certain cachet des films de genre hispaniques. On pense à Paco Plaza, Jaume Balaguero, Alex de la Iglesia ou encore Alejandro Amenabar qui ont montré à plusieurs reprises leur savoir-faire. Forcément, avec l’avènement de Netflix, nous avons accès plus facilement à des films de tout pays, et l’Espagne en fait partie, avec un bon nombre de films de flippe. On peut évoquer La Plateforme, Errementari ou encore La Influencia, et même si on trouve des choses ratées, on a tout de même de quoi satisfaire notre appétit. Petite nouveauté, Reclus est le premier film de David Casademunt, qui offre un essai ambitieux, avec peu de moyens et qui lorgne vers quelque chose de psychologique. Malheureusement, c’est bien trop long et sans réel intérêt.

Seul ?

L’histoire prend place en Espagne au XIXème siècle. Le pays est en guerre et le monde de vient fou. Un homme décide alors de vivre reclus dans la cambrousse avec sa femme et son fils. Les règles sont strictes, il est interdit de dépasser la limite des poteaux plantés, sous peine de mourir. Pour s’occuper, la famille se raconte des histoires qui font peur au coin du feu. Le père décide alors de raconter celle d’un monstre sans yeux qui serait à l’origine de la mort de sa sœur. Troublé, l’enfant accumule les phobies. Alors qu’un vagabond arrive dans la maison et se suicide, le père part ramener le corps et une présence démoniaque torture femme et enfant autour de la maison. Reclus est un film qui va alors parler de paranoïa, d’isolement et de folie, le tout dans un contexte historique qui n’a pas forcément d’intérêt.

Dans son script, le film peut paraître intéressant dans les thèmes qu’il brasse, et notamment celui de la solitude. Ici, tout prend place lorsque femme et enfant se retrouvent seul dans la baraque, avec une folie latente qui prend tout l’espace. Le film évoque alors cette solitude qui rend fou, où l’échange est impossible et où tout devient fébrile. La femme devient instable, menace son fils et tire toutes ses cartouches dans le vent. Ce qui aurait pu être intéressant, mais David Casademunt filme cela avec une certaine forme de gravité qui empêche tout élan émotionnel. Les personnages sont grossièrement présentés, avec un père autoritaire et une mère protectrice, mais sa dérive prendra trop de temps et manquera d’impact. Le réalisateur veut appuyer son propos par un rythme langoureux qui manque d’éléments forts. De ce fait, c’est l’ennui qui s’installe et pas la peur, ou la crainte pour le garçon.

Tu deviendras un homme

Si le film prend son temps pour montrer la descente aux enfers de cette femme qui perd le sens de la réalité, il n’en sera pas de même pour le petit garçon. En effet, tout d’abord peureux et aimant trop les lapins pour les tuer, il va devoir se faire violence pour ne pas écouter sa mère et résister lui aussi à une folie douce. Manque de pot, on ne ressentira aussi aucune empathie pour ce jeune homme qui tire la tronche et pleurniche à tout bout de champ, avant de se transformer en micro Rambo, mettant le bandeau non pas sur la tête, mais autour de ses mains. Le film explore alors l’émancipation et la prise de conscience d’un monde dur, où la folie est partout, que ce soit autour de nous, ou en nous.

Cela se caractérise par l’arrivée de cet homme mutique qui va se tirer une balle, ou encore par ce pseudo monstre qu’on ne verra jamais. L’intention est totalement louable, de mettre du fond dans un film d’horreur, encore faut-il se donner les moyens de rythmer tout cela avec des choses qui ont de l’intérêt. Ici, on se traîne grandement. Le réalisateur étire certaines de ses scènes, ou utilise une répétition jusqu’à la lie. Par exemple, on va voir un nombre incalculable de fois cette femme tirer à la carabine dans le paysage pour rien. Bien évidemment, cela a un intérêt particulier, celui de vider les munitions, mais la logique n’est pas présente et les actions se répètent. Il manque clairement à Reclus un but précis pour maintenir le spectateur en éveil, et cela passe par des personnages plus intéressants que cela. De même que le contexte historique n’est pas utilisé.

Beauté suave

S’il y a une chose que l’on ne peut enlever au film, c’est sa beauté formelle. En effet, David Casademunt possède un œil assez intéressant, aussi bien dans sa mise en scène que dans sa photographie. Le cinéaste utilise bien les lumières pour mettre en avant quelques scènes qui sont plutôt jolies, et on restera impressionné par le cadre, avec cette maison isolée de tout, avec un horizon à perte de vue. De même, les mouvements de caméra sont propres, évitant les shakycam ou encore les plans qui ne servent à rien. La séquence du miroir par exemple est assez intéressante, même si elle met en avant un effet éculé depuis des lustres. Comme presque tous les films espagnols, il y a une recherche esthétique indéniable, et c’est un peu ce qui sauve le film, et ne le fait pas sombrer dans le navet.

Au final, Reclus est un film qui est sensiblement raté. Son histoire ne tient pas forcément debout, avec ce monstre craint de tous mais qui vit dans notre tête. L’idée est sympathique, mais le traitement n’est pas logique et traine en longueur, ne présentant pas, en plus, des personnages empathiques. Reste alors une mise en scène agréable à l’œil et un joli travail sur la cadre et les lumières. Mais encore une fois, la forme ne sauve pas le fond et l’ennui qui nous rattrape très vite. Dommage.

Note : 07/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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