octobre 14, 2024

Dix Petits Nègres

Titre Original : Ein Unbekannter Rechnet Ab

De : Peter Collinson

Avec Oliver Reed, Charles Aznavour, Maria Rohm, Stéphane Audran

Année : 1974

Pays : France, Angleterre, Allemagne, Espagne, Italie

Genre : Policier

Résumé :

Dix personnes de tous bords sont réunies dans un palais du sud de l’Iran à l’invitation d’un mystérieux Owen, que personne n’a jamais vu. Le premier soir, alors que le chanteur Michel Raven interprète son récent succès, une voix résonne soudain, accusant chacun des convives d’un meurtre resté impuni et qu’elle jure de venger. C’est alors que Raven s’écroule, empoisonné. Owen se trouve parmi les hôtes restants…

Avis :

En marge des enquêtes d’Hercule Poirot, Dix petits nègres constituent l’un des romans emblématiques de l’œuvre d’Agatha Christie. L’intrigue se distingue par un whodunit implacable où chaque protagoniste est exposé aux méfaits d’un mystérieux tueur. Il en ressort un récit policier original et distrayant qui interpelle sur la notion de justice, a fortiori sur la sentence qui incombe aux criminels impunis. Après deux premières adaptations relativement légères et perfectibles, le livre fait l’objet d’une nouvelle interprétation cinématographique par Peter Collinson. Une occurrence au casting prestigieux qui augure des productions ultérieures, à l’instar de Mort sur le Nil et Le Crime de l’Orient-Express.

Au regard de son modèle littéraire, Dix petits nègres marque la quintessence du huis clos policier. Qu’il s’agisse du roman ou de ses adaptations, la sensation de prise au piège tient au cadre. Ce fut le cas du manoir insulaire, du chalet niché au creux d’une montagne ou, dans le cas présent, d’un palais perdu au beau milieu du désert iranien. D’emblée, on observe un contraste entre cet environnement hostile et le confort tout illusoire des lieux. On éprouve bien souvent des impressions contradictoires, où le faste ambiant se heurte à un sentiment d’insécurité croissant. D’ailleurs, le film de Peter Collinson s’appuie aussi sur une gestion de l’espace labyrinthique.

« Il en émane des personnages à la limite du caricatural. »

Cette particularité porte sur l’alternance des parties communes, des chambres et des zones extérieures. Ces dernières ne sont pas sans rappeler les excursions égyptiennes ou irakiennes du détective belge… Au demeurant, l’atmosphère s’avère pesante et s’affranchit de la légèreté, sinon de la tonalité humoristique, propre à la version de René Clair. Le réalisateur suggère une présence invisible et omnipotente avant de mettre l’accent sur la suspicion au sein même du groupe de victimes potentielles. Si l’on devine cet aspect en amont de l’histoire, il n’en reste pas moins qu’elle entretient l’impression de vulnérabilité qui découle de la situation ; à titre individuel ou collectif.

Malheureusement, le présent métrage n’est pas exempt de reproches. À commencer par la caractérisation et les protagonistes eux-mêmes. Ils se résument à leurs crimes présumés, leur statut social, voire leur profession. Il en émane des personnages à la limite du caricatural qui ne parviennent pas à atteindre le niveau de profondeur escompté. De même, on peut regretter des réactions qui confèrent à l’indolence. Qu’importe les assassinats commis ! Qu’importe que le prochain à passer ad patres se trouve parmi eux ! Leurs comportements et leurs agissements multiplient les platitudes, voire les invraisemblances en plusieurs occasions.

« On déplore aussi des meurtres en retrait, pour ne pas dire absent du cadre. »

Même s’il est question d’un film grand public, on déplore aussi des meurtres en retrait, pour ne pas dire absent du cadre. En un certain sens, cela peut justifier les réactions dépeintes précédemment. Néanmoins, cette violence édulcorée vient contredire le propos initial sur la notion de crime impuni. Au fil de son évolution, le scénario s’affranchit du récit originel pour étayer sa propre conception de l’autojustice et de la sentence qu’il convient d’appliquer. Cela sans compter sur un dénouement beaucoup moins pessimiste qui tend vers des considérations moralisatrices douteuses et un manque de pertinence au regard de ce qui a été amorcé jusqu’alors.

Au final, Dix petits nègres est un film policier qui prévaut surtout pour son ambiance et sa progression en vase clos dans un cadre adéquat. Sur ce point, le métrage de Peter Collinson reste une incursion appréciable pour étayer la série de crimes. Toutefois, on peut déplorer des protagonistes qui manquent de relief et de crédibilité, et ce, malgré l’illustre casting qui occupe le devant de la scène. La faute à des interprétations monotones et sans fulgurance, le tout affublé de comportements inattendus, voire fantasques au regard du danger qu’ils encourent. On regrette également des libertés prises par rapport au roman. Choix artistiques qui laissent perplexes, car les notions de morales avancées restent surfaites, stériles et discordantes au regard des bases narratives.

Note : 12/20

Par Dante

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.