Titre Original : Death on the Nile
De : John Guillermin
Avec Peter Ustinov, Jane Birkin, Lois Chiles, Bette Davis
Année : 1978
Pays : Angleterre
Genre : Policier
Résumé :
La belle et riche héritière Linnet Ridgeway vient d’épouser le fiancé de sa meilleure amie Jacqueline de Bellefort. Pour leur voyage de noces, les jeunes mariés décident de faire une croisière sur le Nil à bord du Karnak. Le détective Hercule Poirot et son ami le colonel Race figurent parmi les passagers. Un soir, Jacqueline fait irruption sur le bateau et tire sur son ex-fiancé, le blessant à la jambe. Choquée par son geste, elle fait une crise de nerfs, obligeant l’infirmière venue à son chevet à lui administrer une sévère dose de morphine qui l’assomme toute la nuit. Le lendemain, le corps sans vie de Linnet est découvert. Si Jacqueline, son ennemie jurée, n’a pu commettre ce crime, qui en est l’auteur ? Hercule Poirot va bientôt découvrir que chacun des passagers avait une bonne raison de la tuer…
Avis :
Mort sur le Nil fait partie de ces ouvrages intemporels du roman policier. L’œuvre d’Agatha Christie se distingue tout d’abord par son cadre et son atmosphère exotiques. D’ailleurs, l’auteure a profité d’un séjour à Assouan pour entamer la rédaction de son livre. L’histoire est également réputée et appréciée pour la qualité de sa caractérisation, ainsi que la subtilité de son affaire. Après le succès du film de Sidney Lumet, Le Crime de l’Orient-Express, John Brabourne récidive avec la mise en chantier d’un nouveau métrage. Si ce dernier emprunte la structure qui a fait la notoriété de sa créatrice, le producteur convie à nouveau un casting de premier choix pour ce qui s’avance comme la première adaptation d’un récit d’Agatha Christie réalisée à titre posthume.
À l’image d’autres intrigues de la célèbre écrivaine, Mort sur le Nil expose avec patience les enjeux et les faits propres à son scénario. Toute la singularité du rythme ne tient pas à une enquête menée au cordeau, sur la base d’une progression nerveuse. En l’occurrence, on privilégie une mise en contexte méticuleuse où chaque évènement trouve une importance particulière par la suite. Du point de vue du spectateur, le procédé permet ainsi d’étayer plusieurs pistes de réflexion. Il peut ainsi mieux appréhender l’interaction et les rapports entre les différents protagonistes. Par ailleurs, cela contribue grandement à développer leur personnalité et leurs motivations respectives.
Si l’on n’a pas connaissance de l’histoire, on tente alors de procéder à ses propres investigations, à distinguer les intérêts qui prévalent pour expliquer le crime. L’une des grandes particularités de l’affaire en question est de n’épargner personne quand il s’agit d’élaborer une liste de suspects. Chaque intervenant possède un mobile, le tempérament, ainsi que les moyens et l’opportunité de commettre l’assassinat. Même les séances d’interrogatoire ne visent pas à apporter un semblant de réponse, mais à avancer les éléments qui permettent de conforter tel individu dans le rôle du suspect principal. À l’écran, les déductions d’Hercule Poirot restent relativement discrètes.
Ce n’est pas tant la reconstitution des faits que les échanges captés de manière fortuite qui prévalent pour mieux appréhender les tenants de l’affaire. Disséminés çà et là pour attester d’une machination grossière, les indices incriminent une ou plusieurs personnes. Par conséquent, ils ne sont pas forcément révélateurs de ce qui a pu se dérouler. Ils se destinent davantage à perdre les enquêteurs, à tout le moins les induire en erreur ou les entraîner sur une fausse piste. Là encore, le meilleur moyen pour entrevoir la résolution de l’intrigue tient à percevoir certaines réactions en apparence anodine ou à ces conversations dont la formulation possède un sens dissimulé.
Dans le roman d’Agatha Christie, la toile de fond de l’Égypte reste relativement discrète. Certes, on pose le cadre et on s’immerge facilement, mais les descriptions demeurent succinctes. Aussi, le film de John Guillermin offre une dimension supplémentaire au récit. Une approche visuelle magnifiée par les sites archéologiques visités, le caractère pittoresque du souk d’Assouan ou la progression lancinante d’une croisière sur le Nil. Le dépaysement est alors au rendez-vous, effectuant un trait d’union entre le faste des témoignages de l’Égypte antique et la retranscription d’une période contemporaine qui tend à perdre de son insouciance. Au regard du contexte, on peut estimer qu’il s’agit des années 1920 ou 1930.
Au final, Mort sur le Nil est encore aujourd’hui un fleuron du genre policier. Particulièrement respectueux du roman, on apprécie une narration de qualité qui prend le temps de présenter les faits dans leurs détails, sans pour autant sombrer dans des longueurs accablantes. L’intérêt de l’affaire criminelle reste constant, évoquant tour à tour la cupidité, l’amour ou la fidélité dans les mobiles potentiels. On retrouve l’ambiance unique qui se dégage du cadre de l’Égypte, offrant un lieu aussi idyllique que majestueux pour démêler les fils de l’enquête en question. Le film de John Guillermin s’avance comme une version éloquente, juste et minutieuse de l’œuvre d’Agatha Christie.
Note : 18/20
Par Dante
2 réflexions sur « Mort sur le Nil »