avril 28, 2024

The Card Counter – Un Oscar pour Oscar?

De : Paul Schrader

Avec Oscar Isaac, Tye Sheridan, Tiffany Haddish, Willem Dafoe

Année : 2021

Pays : Etats-Unis

Genre : Thriller

Résumé :

Mutique et solitaire, William Tell, ancien militaire devenu joueur de poker, sillonne les casinos, fuyant un passé qui le hante. Il croise alors la route de Cirk, jeune homme instable obsédé par l’idée de se venger d’un haut gradé avec qui Tell a eu autrefois des démêlés. Alors qu’il prépare un tournoi décisif, Tell prend Cirk sous son aile, bien décidé à le détourner des chemins de la violence, qu’il a jadis trop bien connus…

Avis :

Paul Schrader est un immense réalisateur et scénariste américain qui est en place depuis maintenant plus de cinquante ans. Au fil de sa grande carrière, le metteur en scène nous a livrés aussi bien dans ses écrits que dans ses réalisations des morceaux de cinéma extraordinaire. À la volée comme ça, quand on pense au cinéma de Paul Schrader, on pense à « Taxi Driver » dont il a écrit le scénario, à « Hardcore« , à « American Gigolo« , à « Affliction« , ou encore plus récemment à « Sur le chemin de la rédemption« . D’ailleurs, ce dernier film fut comme une renaissance pour le cinéaste après les échecs de « Dog Eat Dog » et surtout de « La sentinelle« , film qu’il renie purement et simplement (et il a bien raison).

Quatre ans après ce film, Paul Schrader s’apprête à revenir sur le devant de la scène et clairement le metteur en scène de soixante-quinze ans fait un retour en demi-teinte. « The Card Counter » est un film duquel on ressort assez mitigé, car s’il tient de bonnes idées, notamment dans sa mise en scène, il se pose aussi comme un film confus et qui se complique l’intrigue pour pas grand-chose. Abordant trop de sujets à la fois, Paul Schrader nous perd quelque peu dans les tiroirs de son histoire. Restera alors une classe dans ses plans, ses cadrages, ou encore dans la façon de mettre en scène ses acteurs qui, même s’ils peuvent tenir des personnages assez flous, crèvent tout simplement l’écran.

William Tell est un ancien militaire qui a passé quelques années en prison. C’est en prison que William a appris à compter les cartes et quand il est sorti, il s’est lancé dans un petit jeu d’arnaques aux casinos, comptant de manière raisonnable les cartes. Un jour, lors d’une conférence, William fait la connaissance de Clirk, un jeune homme en colère et désireux de se venger d’un ennemi qu’il a en commun avec lui. William va alors prendre la décision d’aider Clirk, quitte à mettre sa nouvelle vie en péril.

Parmi les films qui sont présents au Festival de Deauville, « The Card Counter » était de ceux que j’avais très envie de voir pour la bonne et simple raison qu’il est réalisé par Paul Schrader. Vingt-deuxième film pour le réalisateur américain, « The Card Counter » est un film qui tient de très bonnes idées qui avaient tout pour rendre le film intéressant.

Son scénario, qui est évidemment écrit par Schrader lui-même, s’aventure à peindre une Amérique complexe. Une Amérique en colère, une Amérique qui se perd dans les jeux, ou dans des pratiques peu glorieuses du côté de son armée, ou encore de sa justice. « The Card Counter« , dans son écriture, est un film qui mixe trois intrigues qui se rejoignent. Trois intrigues pour trois personnages, même si le film développe vraiment deux des personnages, le troisième, celui de La Linda, joueuse de poker et surtout investisseuse, est quelque peu mis de côté. Paul Schrader fait s’entrecroiser ses personnages, et il va prendre le temps (trop de temps), pour nous les présenter. Failles, blessures qui ne cicatriseront jamais, ou encore une colère nourrie par le système américain sont au cœur de ce qui va animer ces personnages.

Mais voilà, si ces personnages et ce qui leur arrive est intéressant, sur l’ensemble du film de Schrader, il y a trop d’intrigues dans son intrigue et l’on a bien du mal à comprendre de quoi le réalisateur veut vraiment parler avec son film. Schrader tient ici des sujets forts avec d’un côté tout ce qui tourne autour des jeux, et notamment le poker. La façon d’y jouer, pourquoi y jouer ou encore comment en vivre, et de l’autre, il y a l’horreur d’acte passé qu’il faut assumer, une colère omniprésente et une rédemption. On ajoute à cela que l’espace de quelques scènes affolantes dans leur mise en scène, le réalisateur s’aventure sur des sentiers militaires au camp de Guantanamo, ou du moins quelque chose qui s’en approche, mais comme je le disais plus haut, toutes ces intrigues très lourdes, très dures, ont du mal à fonctionner ensemble, et l’on finit par être pris dans une sorte de confusion, car on ne sait pas vraiment de quoi le réalisateur a envie de nous parler vraiment, et au-delà de ça, on se dit que chacune des intrigues, prises en solo pour un film qui les explorerait plus en profondeur, ça aurait été terrible.

« The Card Counter« , c’est un film qui dans sa mise en scène, même si elle aussi sur son ensemble offre un film confus, démontre encore une fois le sacré talent de Paul Schrader pour poser une ambiance ou construire une scène. Bluffant à plus d’un titre, nous offrant des scènes à couper le souffle parfois, nous offrant un cinéma assez classe, il est vraiment dommage que parfois l’ensemble ne s’accorde pas vraiment. Longueurs et confusion pour faire muter son film et s’aventurer autre part s’invitent pour abîmer la fête. Après, « The Card Counter » se suit avec intérêt et intrigue, et malgré tous ces défauts, il demeure un petit divertissement.

Puis enfin, même si ces personnages auraient mérité d’être plus travaillés et surtout pour ce qui les anime, ils auraient mérité un film sur chacun d’entre eux, du côté de l’acting, on n’aura rien à reprocher tant Oscar Isaac, Tye Sheridan, Tiffany Haddish ou encore Willem Dafoe sont excellents de bout en bout.

Le nouveau film de Paul Schrader est donc un film aussi intéressant qu’il est décevant. « The Card Counter » nous tient clairement grâce à ses intrigues, ses sujets et ses personnages. Son scénario, même s’il nous apparaît comme confus et l’on a bien du mal à s’y retrouver, nous réserve quelques surprises, qui augmentent l’intérêt qu’on a pour ces histoires. « The Card Counter » n’est donc pas un grand cru pour Paul Schrader, et même s’il se pose comme un film décevant, je ne regrette pas de m’y être arrêté, car même un petit Schrader a toujours quelque chose d’intéressant à proposer, alors vivement son prochain film.

Note : 11/20

Par Cinéted

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