
De : Dan Trachtenberg
Avec Elle Fanning, Dimitrius Schuster-Koloamatangi, Patrick Aison, Rohinal Nayaran
Année : 2025
Pays : Etats-Unis
Genre : Action, Science-Fiction
Résumé :
Dans le futur sur une planète lointaine, un jeune Predator, exclu de son clan, trouve une alliée improbable en la personne de Thia et entreprend un voyage en territoire hostile, à la recherche de l’adversaire ultime.
Avis :
Dan Trachtenberg est un réalisateur qui aime prendre des licences cultes pour les retourner comme une chaussette, parfois pour le meilleur, parfois pour le pire, où l’on a envie de dire : qu’est-ce que tu fais, Dan ?! Révélé par l’excellent « 10 Cloverfield Lane« , il a un vrai talent pour les films de tension à échelle humaine, les huis clos nerveux, les récits intimes avec un monstre qui rôde. C’est un cinéaste qui a souvent de bonnes idées… mais qui, comme on va le voir, aurait peut-être dû réfléchir deux fois avant de faire copain-copain avec l’une des créatures les plus badass du cinéma.

Chasseur iconique du septième art, le « Predator », c’est une culture. Un mythe même. Un rugissement dans la jungle. L’ADN des années 80. Débarqué en 1987 sous la caméra de John McTiernan, il a connu des suites plus ou moins glorieuses, des spin-offs discutables, notamment lors de bagarre contre l’Alien de Ridley Scott. Et une fois encore, Hollywood, jamais fatigué de nous ressortir ses jouets fétiches, nous a tiré la carte « Predator ». Sauf que cette fois, la chasse ressemble étrangement à une petite balade bucolique entre amis. Un choix pour le moins étrange, et surtout franchement agaçant tant l’image du chasseur intergalactique en prend un coup. Mais alors, un gros coup.
« le film est plutôt bien foutu en termes d’action, de rythme et de spectacle »
Un jeune Predator doit effectuer sa première chasse pour être accepté par son clan. Son père ne croit pas en lui. Il veut même s’en débarrasser. Mais grâce au sacrifice de son frère, le jeune Predator part en chasse sur une planète où règne l’un des prédateurs les plus terrifiants. La tête de ce dernier sera son trophée de chasse…
Confié une nouvelle fois à Dan Trachtenberg, le réalisateur à qui l’on doit donc « 10 Cloverfield Lane« , « Predator : Badlands » a ses bons côtés. Oui, oui, on ne va pas être négatif d’emblée, car le film a ses bons côtés. Son ouverture, par exemple, offre un bon spectacle et pose des bases intéressantes sur cette civilisation de chasseurs : les rituels de passage, la faiblesse dans un clan, le sacrifice. Franchement, l’introduction intrigue. Elle pique la curiosité. Elle promet quelque chose.
Ensuite : le film est plutôt bien foutu en termes d’action, de rythme et de spectacle. Effets visuels solides, quelques bastons qui ont de la tronche. Puis il y a ces décors, et au-delà de ça, toute la faune et la flore de cette nouvelle planète aux décors impressionnants. On mentionnera aussi le travail sur le maquillage du Predator : c’est propre, c’est pratique, ça respire le latex et les prothèses. On est loin d’un amas de CGI moches, et ça, ça fait plaisir. Même si, soyons honnêtes, il a l’air beaucoup moins menaçant que ses ancêtres. Presque sympa le mec… Enfin, Elle Fanning, dans ce qu’on lui demande de jouer, s’en tire bien dans un double rôle convenu certes, mais pas dégueu.
« Comédie buddy-movie avec un Predator victime de ses traumas »
Mais voilà, rien de tout ça ne suffira à effacer la gigantesque trahison faite à l’univers. Si l’idée d’explorer un Predator en profondeur, histoire d’en faire autre chose qu’une machine à dépecer des humains, pouvait sembler intéressante, il ne fallait pas non plus tomber dans le gouffre du « petit être sensible abîmé par ses traumas familiaux ». Parce que là, franchement, fallait oser. Et ils ont osé. « Predator : Badlands« , c’est le récit d’une émancipation. C’est l’histoire d’un gentil Predator, abîmé, plein de colère, qui, grâce à une rencontre totalement imprévue, s’apaise. Les traumas deviennent des cicatrices. Une famille trouvée remplace celle du sang. Et ensemble, ils décident de partir, main dans la main, pour botter le cul à la Weyland-Yutani, façon nouveaux « … Gardiens de la Galaxie« . Oui, oui, on en est là.
Et comme si ce n’était pas assez, notre petit chasseur s’ouvre aux autres comme une huître trop cuite. Alors, pour enrichir cette relation naissante, il fait des blagues. Oui, on a le droit à un Predator qui fait des blagues. Celle-là, honnêtement, personne ne l’avait vue venir. Pas même les fans les plus ouverts d’esprit. On reste là, médusé, à ne pas trop savoir ce qu’on regarde. Émancipation adolescente ? Road trip initiatique ? Comédie buddy-movie avec un Predator victime de ses traumas et une synthétique curieuse du monde qui l’entoure ? C’est compliqué. Très compliqué. Comment on a pu livrer ça ? Et c’est vraiment dommage, parce que derrière cette aberration scénaristique, Dan Trachtenberg a de vraies qualités. Sa mise en scène est bonne, il sait tenir un décor, dynamiser une scène, rendre un combat lisible.

Peut-être que le vrai problème, finalement, c’est que le film s’appelle « Predator ». Parce qu’avec un autre titre, un autre design de monstre, un autre univers, pourquoi pas. Mais là, on parle d’une créature mythique, reine des chasseurs, silhouette terrifiante et insaisissable. Et on nous la transforme en ado en quête de développement personnel, qui découvre l’amitié et la puissance du vivre ensemble. Hollywood, vraiment… parfois, il faut lâcher les licences et aller se coucher.
Note : 06/20
Par Cinéted
