Titre Original : Dracula’s Daughter
De : Lambert Hillyer
Avec Gloria Holden, Otto Kruger, Marguerite Chrurchill, Edward Van Sloan
Année : 1936
Pays : Etats-Unis
Genre : Horreur
Résumé :
A la mort de son père, le comte Dracula, sa fille décide de trouver un médecin pour échapper à sa malédiction, celle de boire du sang tous les soirs pour survivre. Elle pense avoir trouvé un médecin parfait pour l’aider, mais son addiction n’est-elle pas trop forte ?
Avis :
Parmi toutes les créatures fantastiques de la littérature contemporaine, Dracula de Bram Stoker a une place de choix. Véritable icone aussi bien littéraire que cinématographique, le plus célèbre des vampires a donné lieu à bien des adaptations et à bien des descendants plus ou moins convaincants. Depuis sa première apparition en 1921, Dracula n’a cessé de fasciner et de susciter des thèmes plus ou moins intéressants. Jusqu’à se créer une véritable descendance avec des enfants, et notamment un fils et une fille. Sorti en 1936, soit cinq ans après le Dracula de Tod Browning, La Fille de Dracula est une suite directe au film de chez Universal et va permettre d’aborder une thématique peu répandue dans le monde vampirique, celui de la malédiction de ne pas connaitre le jour et de devoir prendre une vie tous les soirs pour survivre.
A partir de là, difficile de dire que ce film est un film d’horreur. A la rigueur, en recontextualisant le métrage dans son époque, on peut aisément comprendre sa catégorisation, mais en l’état, aujourd’hui, le film est plus un drame fantastique qu’un véritable film d’épouvante. S’éloignant volontairement de l’aspect gothique du premier film, La Fille de Dracula se veut plus social et surtout plus dramatique dans la thématique qu’il brasse. Principalement, le film aborde le vampirisme comme une malédiction. Dès le départ, la fille du comte parle ouvertement de sa volonté de connaître le monde extérieur en plein jour et de combattre cette soif de sang qui malheureusement l’assaille tous les soirs. Du coup, le film va parler de cela comme d’une maladie qu’il faut guérir. Cela va donner lieu à une confrontation intéressante entre le « héros » du film et la comtesse qui voit en lui un sauveteur inespéré. Bien plus axé sur l’aspect psychologique de la chose, le film ne montrera aucune canine et s’évertuera à ne jamais tomber dans la surenchère d’effets effrayants. Si cela peut s’avérer payant, permettant de montrer que le vampirisme peut s’éloigner du simple film d’horreur, il y a aussi le revers de la médaille, celui de ne pas donner au spectateur ce qu’il attend. Et c’est bien là tout le problème de ce film qui manque réellement de rythme.
Si l’ambition de faire un film différent est bien présente, on ressent tout de même une certaine facilité dans sa mise en scène et dans sa narration. Constituer de saynètes entrecoupées de fondu au noir, le film suit une ligne temporelle très simple et l’évolution des personnages reste très basique. Cela a pour lieu de ne pas surprendre et de rendre le film assez prévisible, jusqu’à son dernier acte. En effet, le réalisateur a l’intelligence de brasser un deuxième thème qui n’est pas si éloigné du mythe vampirique, celui de la jalousie suscitée par la beauté. Durant tout le métrage, les compliments fusent autour de la beauté de la comtesse et on sent une véritable passion de la part de son serviteur, lui-même pas très beau ni gracieux. Opposé de la comtesse, celle-ci va user de ses charmes pour s’abreuver le soir, se faisant passer pour une artiste, alors que majordome la regarde faire impuissant. Si cet amour caché se transformant en jalousie n’est pas forcément évident durant l’entièreté du film, la fin montre bien que cela peut détruire une relation. C’est là toute l’intelligence du réalisateur de montrer cela en filigrane pour infliger une belle surprise sur la fin, qui fera office de twist final.
Enfin, difficile de parler de la Fille du Dracula sans parler d’une chose qui était totalement absente du précédent film, l’humour. Et c’est là aussi une surprise tant le thème ne s’y prête pas vraiment. Si la saga de Deux Nigauds a fait fureur avec Abbott et Costello, c’est bien après et il se pourrait bien que la Fille de Dracula soit le premier film de monstre abordant des notions humoristiques. Que ce soit avec les deux policiers incompétents et peureux ou avec l’assistante du docteur qui fait des blagues, le ton potache fait opposition à une certaine lourdeur dans la thématique du film. Alors bien entendu, cela a deux effets, d’une part une dédramatisation de la situation autour de la comtesse, apportant un peu de légèreté, mais d’autre part, on sent un vrai décalage de ton et cela surprend, mais pas forcément dans le bon sens.
Au final, La Fille de Dracula est un bon film mais qui n’est pas vraiment un métrage d’épouvante ou d’horreur. S’octroyant la malice d’aborder le vampirisme comme une malédiction à laquelle on ne peut échapper, le film se perd parfois en dialogues inutiles et dans un humour assez douteux qui ne colle pas avec l’ambiance générale. Fort heureusement, la prestation glamour de Gloria Holden ainsi que l’intelligence des deux thèmes brassés font que ce film est un digne successeur du Dracula de Tod Browning sans jamais l’égaler, mais faisant quelque chose de différent et finalement surprenant.
Note : 15/20
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Par AqME