Titre Original : Aru Otoko
De : Kei Ishikawa
Avec Satoshi Tsumabuki, Sakura Andô, Masataka Kubota, Akira Emoto
Année : 2024
Pays : Japon
Genre : Thriller
Résumé :
Rie découvre que son mari disparu n’est pas celui qu’il prétendait être. Elle engage un avocat pour connaître la véritable identité de celui qu’elle aimait.
Avis :
Kei Ishikawa est un cinéaste japonais qui a débuté sa carrière à la fin des années 90. Pendant une quinzaine d’années, il ne va cesser de tourner et c’est au milieu des années 2010 qu’il réalise son premier long, « Gukôroku« . Le film se fera remarquer au Japon, et il lui ouvre des portes. À force de travail, très vite, Kei Ishikawa va s’imposer dans le paysage du cinéma japonais, tournant un film par an environ. Puis il y a avoir « A Man« , qui recevra le prix du meilleur film au Japan Academy Prize.
Le cinéma regorge de merveilles et de surprises, et au rayon des films qui sont loin de ce que l’on pouvait s’attendre, « A Man » fait incontestablement partie de ceux-là. Commençant comme un petit drame amoureux, Kei Ishikawa livre un film bien plus profond que cela. S’aventurant dans le film d’enquête, « A Man » est aussi un regard sur la société japonaise, sur ses problèmes sociaux, sur le poids de la culpabilité, et le jugement des autres. En deux heures, le metteur en scène nous entraîne dans un film passionnant, qui marque de par ce qu’il raconte, de par ses personnages, et puis il y a ce final qui peut laisser dubitatif, mais certainement pas indifférent.
« Ce qui est très bien et surprenant avec ce film, c’est la façon dont il est imaginé. »
Un an après la mort de son mari, Rie découvre que ce dernier n’était pas celui qu’elle croyait. C’est le frère de ce dernier, qu’elle rencontre pour l’année de sa disparition, qui lui révèle que l’homme qu’elle chérit sur la photo n’est absolument pas son frère. Choquée et perdue, Rie engage alors un avocat pour connaître et comprendre comment l’homme qu’elle aimait a pu usurper l’identité d’un autre, et au-delà de ça, s’il n’est pas Daisuke, alors qui est-il ?
« A Man » est donc le film que je n’attendais pas vraiment malgré sa bande-annonce qui donnait très envie de s’y arrêter. Avec cette histoire, je pensais trouver un film judiciaire, avec une enquête de police pour retrouver l’identité de la personne décédée. Et si j’ai trouvé de ça, car il y a bien une enquête qui tient sur une très grande partie de ce film, « A Man » va être bien plus que ça, aussi bien dans ce qu’il raconte, que dans sa façon de raconter cette histoire.
Ce qui est très bien et surprenant avec ce film, c’est la façon dont il est imaginé. Ici, on commence par une rencontre entre une femme qui travaille dans une papeterie, et un client mystérieux et taiseux. Entre eux, c’est un joli coup de foudre et toute la première partie est joliment soutenue par une émotion palpable. Les personnages se découvrent et l’on se laisse attraper par leur rencontre. Puis arrive le drame, la mort accidentelle, et la découverte de l’inimaginable. L’homme que l’on nous a présentés n’est pas celui que l’on croit. À ce moment-là, Kei Ishikawa fait basculer son film autre part, et ce qui va être intéressant ici, c’est le fait que la recherche de l’identité et le pourquoi de cette usurpation vont primer sur tout.
« Autant de sujets qui donnent un fond incroyable au film. »
On aurait pu se dire que le scénario irait dans quelque chose de judiciaire, mais absolument pas. Non, ce que cherche Kei Ishikawa avec cette histoire, c’est qui est cet homme, et derrière ça, pourquoi a-t-il changé d’identité ? Commence alors une enquête, et avec elle, le réalisateur va y injecter tout un tas de sujets de société qui ne font qu’étoffer son film. « A Man » regarde la société japonaise à travers le choix de quelques personnages et ce qui en ressort est vraiment passionnant, en plus de se poser comme une leçon d’humanité. Rédemption, poids du regard de la société, injustice, honte, immigration… Autant de sujets qui donnent un fond incroyable au film. Puis avec ça, Kei Ishikawa ne juge en aucun cas ses personnages. Non, il nous les présente avec leur passé, leur motivation, leurs blessures et leurs émotions, et c’est ce qui les rend encore plus beaux.
Avec ça, à force d’indices et de découvertes, on sera là encore surpris, car l’intrigue a tendance à partir dans tous les sens, mais au final, elle est le reflet d’une vie, avec ses incohérences, ses hésitations, ses choix parfois fous, parfois rationnels, et là encore, ne fait qu’étoffer le fond. Un fond que l’on doit aussi à ses comédiens, qui sont merveilleux. Si tous trouvent une belle place, le film se repose surtout sur trois d’entre eux, Satoshi Tsumabuki, Sakura Andô et Masataka Kubota, et ce dernier trouve sûrement là l’un des rôles les plus torturés de ce début d’année.
« »A Man » est un film doux. »
Du côté de la réalisation de Kei Ishikawa, « A Man » est assez étonnant, car alors que son histoire est très sombre et qu’à travers le metteur en scène approche tout un tas de sujets d’actualité, et plus encore tout un tas d’émotions, il y a comme un sentiment de mélancolie qui enveloppe tout le film. « A Man » est un film doux, et c’est aussi un film qui prend son temps pour raconter ce qu’il a à raconter. Très lent, parfois même on sent bien que le film fait ses deux heures, mais malgré cela, jamais la mise en scène a une faiblesse, et jamais Kei Ishikawa ne propose quelque chose en trop, même s’il nous emmène vers un final qui ne laissera pas indifférent. Un final qui se laisse digérer, mais une fois ceci fait, il se pose comme intelligent dans ce qu’il raconte des personnages, et peut être même de chacun d’entre nous, si l’on extrapole.
Ainsi, « A Man » est un excellent film qui mérite tout à fait sa récompense. Profond, dur, triste et doux en même temps, Kei Ishikawa propose une passionnante enquête, doublée d’un film qui pose une belle analyse, voire une sacrée critique, de la société japonaise. Bref, on peut parler d’un très joli coup de cœur !
Note : 17,5/20
Par Cinéted
Une réflexion sur « A Man – Trouver le Mari »