décembre 12, 2024

La Boîte Noire – Mauvais Souvenir

De : Richard Berry

Avec José Garcia, Marion Cotillard, Michel Duchaussoy, Bernard Le Coq

Année : 2005

Pays : France

Genre : Thriller

Résumé :

A la suite d’un accident de voiture, Arthur est plongé pendant quelques heures dans un coma. Durant sa phase d’éveil, dans un délire verbal, il exprime des phrases incohérentes qui trouvent leurs racines directement dans son inconscient.

A son réveil, il est face à une curieuse énigme : Que faisait-il la nuit sur cette route, proche de Cherbourg ?

Ses phrases inquiétantes, dérangeantes et libératrices ont été notées dans un carnet noir par Isabelle, une des infirmières de l’hôpital. Pour l’aider à répondre à ses questions, Isabelle remet à Arthur, comme si elle lui offrait un trésor, le témoignage écrit de son délire.

Dès cet instant commence pour Arthur une incroyable aventure ; il sera à la fois la victime, le coupable et l’enquêteur…de sa propre vie.

Envahi par les traumatismes de notre inconscient, nous faut-il pour autant écraser les souvenirs qui nous encombrent ?

Avis :

Réduire le cinéma français à des drames et des comédies est d’une bêtise affligeante. On a bien vu qu’au cours de son histoire, la France a su proposer des films de genre et possède un vivier de réalisateurs impressionnant qui veulent sortir d’un carcan un peu trop pépère. Choquer le public, montrer au monde que l’on sait aussi faire des films visuellement impactant, ou encore prouver, si besoin l’en est, que notre imagination est toujours aussi fertile. Car oui, est-il encore besoin de rappeler que la science-fiction est d’origine française (merci Jules Verne) et que Georges Méliès, l’un des piliers du septième art, a commencé avec des films expérimentaux qui s’apparentent au genre. Néanmoins, certains noms surprennent lorsqu’ils s’engagent là-dedans, à l’instar de Richard Berry, que l’on a plus l’habitude de voir dans des drames. Enfin, ça, c’était avant son histoire sordide.

Mais revenons-en à notre film qui nous préoccupe ici, à savoir La Boîte Noire, sorti en 2005, et qui est l’adaptation d’une nouvelle de quarante pages signée Tonino Benacquista. Troisième film avec Richard Berry derrière la caméra, le long-métrage peut interroger pour plusieurs raisons. La première est qu’il s’agit d’un thriller à tendance fantastique, avec la volonté de faire une mise en scène particulière et étrange. La deuxième, c’est qu’il s’agit-là d’un rôle étonnant pour José Garcia, qui sort de son rôle de clown pour offrir une prestation dramaturgique, loin de ses poncifs habituels. Enfin, troisième raison, il s’agit d’un film qui s’attarde sur une nouvelle très courte, et donc le scénario a dû être réécrit plusieurs fois afin de mieux tromper le spectateur, au sein d’un twist final qui est très attendu. Mais est-ce un bon film, et est-ce que ces trois raisons trouvent égards à nos yeux ?

« cette mise en scène, qui se veut trop tape-à-l’œil »

Dès l’introduction du film, on navigue sur une mise en scène qui essaye d’être expérimentale. On prend la place d’un conducteur de voiture (ou de moto, on ne sait pas trop) qui va à toute berzingue sur une route sinueuse, jusqu’à ce qu’il percute un jeune cycliste. Par la suite, on va suivre le personnage principal, qui ne comprend pas pourquoi il se réveille à Cherbourg. Il va alors mener une enquête, mais toutes les personnes qui sont autour de lui sont bizarres, à commencer par son père qui tient des discours incongrus, ou encore par cette infirmière étrange dont il tombe éperdument amoureux. Richard Berry tente de nous plonger au cœur d’un cauchemar éveillé, où l’éclairage et les décors sont là pour nous désorienter. On aurait pu croire cela intéressant, si seulement Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro n’étaient pas déjà passés par là.

C’est tout le problème de cette mise en scène, qui se veut trop tape-à-l’œil et qui manque cruellement de nuances. On comprend rapidement où le réalisateur veut nous mener, dans ce dédale étrange, dans ces lieux qui n’ont rien de commun, et qui semblent sortir d’un cauchemar entre horreur et steampunk suintant. Très vite, on se doute que nous sommes dans les pensées du personnage principal, qu’il ne s’est toujours réveillé de son coma, et forcément, tout l’environnement nous amène à cette réflexion qui sera… véritable. En faisant des chichis de mise en scène, des simulacres de pseudos cauchemars, Richard Berry ne nous berne jamais longtemps et n’arrive pas à maintenir un suspens optimal. De plus, ceux qui sont rompus à ce genre de film arriveront rapidement à la même conclusion, enlevant alors le peu d’intérêt qu’avait le film.

« ce scénario qui n’arrive jamais à créer de l’empathie »

Mais ce n’est pas tout. Une fois réellement sorti de son coma, le personnage va alors mener l’enquête et interroger ses proches pour comprendre ses rêves, et faire un rapprochement avec son passé, et un lourd secret de famille. Là encore, le cinéaste nous plonge dans un film noir, aux teintes grisâtres, où le désespoir semble s’être installé pour de bon. Si l’idée est plutôt bonne, le résultat est moins convaincant, la faute à un scénario trop alambiqué pour arriver à une réponse décevante et sans intérêt. Un intérêt qui se dégonfle au fur et à mesure de l’intrigue à cause d’un personnage de plus en plus antipathique. Et là, ce n’est pas la faute des acteurs et actrices, mais bel et bien de l’écriture de ce scénario qui n’arrive jamais à créer de l’empathie autour de cette victime qui broie du noir.

Alors certes, les acteurs sont plutôt bons, à commencer par José Garcia dans un rôle à contre-emploi, bien loin de ses clowneries habituelles. Il est convaincant dans ce rôle dramatique, à la lisière de la folie, et il prouve qu’il est un comédien polyvalent. A ses côtés, on peut compter sur un casting assez luxueux, avec notamment Marion Cotillard, encore un peu timide, Michel Duchaussoy en père de famille, Bernard Le Coq en thérapeute très étrange ou encore Héléna Noguerra en hôtesse de l’air relativement coquine. Malgré ce beau monde, les personnages vivotent plus qu’ils ne vivent, et certains n’auront qu’un rôle mineur alors qu’ils auraient dû avoir plus d’impact dans la vie du héros. Bref, un beau gâchis malgré des prestations correctes.

Au final, La Boîte Noire est un thriller français qui demeure assez irritant. On y sent un fort potentiel, et surtout, une volonté de sortir des carcans d’un cinéma français parfois trop auteurisant. Malheureusement, Richard Berry paye certainement son inculture au genre en délivrant un film qui pique des idées de mise en scène et d’imagerie à droite et à gauche, sans jamais créer une véritable atmosphère, ou encore des personnages bien vivants. On se retrouve donc face à un film qui possède de bonnes choses, mais qui ne les exploite jamais vraiment, offrant un film hybride à la fin décevante.

Note : 10/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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