Auteurs : Grant Morrison et Dan Mora
Editeur : Urban Comics
Genre : Fantasy
Résumé :
Dans un monde médiéval fantastique, un trappeur itinérant du nom de Klaus entre dans l’enceinte de Grimsvig. Mais la ville a bien changé depuis sa dernière visite… Celle qui respirait la joie de vivre est désormais dirigée d’une main de fer par le tyran Magnus, qui a enrôlé de force tous les hommes valides pour travailler aux mines de charbon de la région. Et ce n’est pas tout : ses soldats sèment la terreur, interdisant la cérémonie du solstice d’hiver et sa traditionnelle remise de cadeaux. Sous ses airs taciturnes, Klaus sera-t-il l’homme capable de faire revenir le soleil dans le cœur des habitants ?
Avis :
Le père Noël n’est-il pas le plus connu de tous les super-héros ? On peut se poser la question tant il possède des pouvoirs, peut se déplacer à la vitesse de la lumière, possède des acolytes qui l’aident dans sa tâche et fait constamment le bien autour de lui. C’est le postulat de départ que s’est imposé le scénariste Grant Morrison lorsqu’on lui a refilé les clés de Klaus, à savoir une réinterprétation de la légende du père Noël en version comics. Ni une, ni deux, le célèbre artisan autour de Batman et de Animal Man va inventer tout un nouveau lore, en s’inspirant aussi bien de Disney que de tous les capés que l’on connaisse. Ainsi donc, Klaus tient deux embouts, celui du folklore autour du 25 Décembre, et celui des super-héros de comics, où il va devoir affronter une menace pour faire revivre la magie de Noël.
Ici, Klaus est un homme qui vit en harmonie avec la nature. Il décide de revenir à la ville de son enfance, Grimsvig, mais il va se rendre compte que la vie là-bas a bien changé, notamment à cause de Magnus, qui dirige la bourgade d’une main de fer et interdit quiconque de s’amuser, même les enfants. Klaus n’est pas accueilli de la meilleure des façons, et voir des enfants malheureux lui fait prendre conscience du danger imminent qui risque de s’abattre sur la ville. Il décide alors de renouer avec l’esprit de Yule afin d’apporter de la joie et des couleurs dans cette ville devenue si terne et triste. Grant Morrison ne prend pas beaucoup de risque en apposant cette histoire à celle du conte de Noël. On y retrouve des thèmes similaires, avec l’apport de la joie, l’importance de jouer et la générosité qui rend heureux.
Pour pimenter son récit, il va tout de même inclure quelques éléments qui collent plutôt à la Fantasy. Ainsi donc, on retrouve tous les clichés du conte, avec le méchant tyrannique qui se cache derrière une cape, le héros qui tient des liens ténus avec le méchant depuis l’enfance ; la princesse qui se rend compte du mal qu’elle a fait, ou encore le loup blanc, sidekick indispensable à la réussite de la mission. De plus, on navigue dans un univers médiéval, ce qui accentue un peu plus le côté « connu » de cette histoire, qui s’inspire même de quelques dessins-animés de chez Disney pour peaufiner ses décors, et notamment la ville de Grimsvig. Mais derrière ce récit qui parait si simple, il réside un vrai travail d’équipe entre Dan Mora et Grant Morrison. Et pour s’en rendre compte, il suffit de feuilleter l’ouvrage et de regarder le découpage.
En effet, chaque page est pensée pour définir quelque chose d’important. Par exemple, on a un dessin sur une double page qui montre Klaus en train de chasser un cerf. L’envergure montre la puissance de la nature, un sentiment de liberté teinté de danger, mais dans une beauté à couper le souffle. Cela redonne une origine sauvage au personnage, mais honore aussi la nature. Au sein de ce même dessin, on retrouve alors trois cases étriquées, qui montrent Magnus en plein repas avec sa femme et son fils. Le but ici est de faire un contraste entre une vie pleine et une vie réduite à une vie de château triste et misérable, où l’amour et la joie n’ont plus leur place. Il y a vraiment une intelligence dans la gestion des cases et ce qu’elles veulent exprimer, démontrant alors un véritable récit fait à deux.
Néanmoins, tout n’est pas parfait non plus. La première histoire est passionnante, et se termine en apothéose avec un immense démon qui évoque le Krampus. Mais pour les trois autres petites histoires, on sent un petit peu le forcing de la part des auteurs, qui ont certainement répondu à des attentes. Ici, on va voir Klaus se battre très succinctement avec la Reine des Glaces, ou encore prendre Jack Frost avec lui pour combattre quelques menus ennemis. Les intrigues ne sont pas très intéressantes, et heureusement que les graphismes font le taf. Pour autant, cela permet d’approfondir un peu plus le lore de Klaus, qui pourrait très bien s’intégrer dans un Batman de Noël pour prêter main forte au Dark Knight. Et l’une des histoires critiquent ouvertement l’aspect mercantile de Noël avec un humour acerbe, lorsqu’il faut sauver des gens d’une ville qui fête Noël à l’année.
Au final, Klaus est tout de même une réussite dans ce qu’il entreprend. C’est-à-dire faire un amalgame concret entre une légende folklorique connue dans le monde entier et une origin story digne d’un super-héros. Dessiné d’une main de maître par Dan Mora (qui a dû faire de nombreuses recherches pour ses dessins, étant originaire du Costa Rica, et n’ayant jamais vu la neige !), Klaus est une lecture parfaite pour les fêtes de fin d’année, lien incongru entre comics modernes et légende antédiluvienne.
Note : 15/20
Par AqME