Titre Original : Sleeping With my Enemy
De : Joseph Ruben
Avec Julia Roberts, Patrick Bergin, Kevin Anderson, Elizabeth Lawrence
Année : 1991
Pays : Etats-Unis
Genre : Thriller
Résumé :
Dans leur maison de rêve sur la plage de Cape Cod, Laura et Martin semblent former un couple parfait. Seulement Martin, sous son air aimable, cache une personnalité froide et violente. Pour Laura, la seule solution est de quitter cet homme qui a gâché 3 ans de sa vie. Elle se fait porter disparue afin de recommencer une nouvelle existence…
Avis :
Avec le mouvement MeToo, la parole de la femme s’est vraiment libérée afin de dénoncer les actes sexistes et violents des hommes. Cela a permis de mettre en exergue des comportements toxiques et dangereux inacceptables dans notre société de la part de la gent masculine, ainsi que de pointer du doigt les exactions de certains hommes ayant du pouvoir, notamment dans l’industrie du cinéma. Ce qui semble être le plus grave, c’est surtout que depuis bien des années, le cinéma montre, à travers divers films, le comportement plus qu’inapproprié des hommes envers les femmes et leur femme. Au début des années 90, Julia Roberts a vraiment le vent en poupe, notamment grâce à Pretty Woman, et elle va enchaîner les rôles de femme forte, comme elle le prouve dans Les Nuits avec mon Ennemi, film signé Joseph Ruben qui met en avant un mari des plus pervers.
Ici, on va suivre un couple qui semble bien sous tout rapport. Il habite une grande villa à Cape Cod, au bord de la mer et l’homme de la maison semble couvrir de cadeaux sa belle femme. Sauf que derrière le paraître, cet homme bat littéralement sa femme. Et pour tout et n’importe quoi, comme des serviettes qui ne sont à la même hauteur ou des placards de bouffe mal rangés. Le début du film ne tergiverse pas et ne tente même pas de flouter cette relation toxique. D’emblée, on nous met face à un mari qui prend toutes les décisions, frappe sa femme pour n’importe quel prétexte, et surtout, achète son amour avec des cadeaux ou une insertion pernicieuse dans les émotions de cette dernière. Bref, on rentre vite dans le vif du sujet, avec une femme qui est prisonnière d’un grand malade mental.
« Ce sous-traitement de l’homme violent est relativement intelligent. »
Pour se sauver de ce mari violent, l’héroïne va prendre des cours de natation, sa seule bulle d’air qu’elle s’octroie en cachette, pour tromper son mari. Et lors d’une balade en bateau qui tourne mal, elle se fait passer pour noyée, mais en profite pour s’échapper et tenter de se construire une nouvelle vie. Dès lors, le film se divise en deux parties qui se chevauchent, celle d’une femme qui tente de reconstruire en refaisant confiance à un homme, et celle d’un homme qui va découvrir que sa femme n’est pas vraiment morte. Et le long-métrage va surtout s’appesantir sur cette femme qui vit dans une peur constante, celle de voir son mari revenir dans sa vie. Une peur qui se traduit par une méfiance exacerbée de l’homme, et qui va trouver une sorte de refuge chez son voisin, un homme bon, qui lui laisse prendre son temps.
De l’autre côté, le film ne prend pas trop de temps pour la recherche lancée par le mari. Ce dernier apprend que sa femme est vivante via un coup de fil inopportun, et il va engager des détectives privés pour pouvoir remonter jusqu’à elle. Sa violence éclate lors de quelques coups de colère sans surprise, et on va voir sa folie lorsqu’il va prendre en otage des inconnus pour remonter la piste de sa bien-aimée qu’il veut maltraiter. Mais finalement, ce sous-traitement de l’homme violent est relativement intelligent, car il permet de mieux mettre en avant la reconstruction de cette femme qui a perdu son honneur, et même son statut d’être vivant avec son libre-arbitre. Si on reste dans un thriller simple, il met en avant la victime plutôt que le bourreau, montrant alors l’importance d’un accompagnement en douceur, où toute violence est occultée.
« On flirte même avec le thriller horrifique. »
Néanmoins, il est dommage que le film possède une mise en scène aussi aléatoire. En effet, au début, on sent que Joseph Rubin n’a pas vraiment d’idée pour poser une ambiance pesante. Il s’appuie surtout sur son actrice principale, Julia Roberts, qui joue très bien la femme victime, qui ne veut surtout pas déplaire à son mari pour éviter de se faire battre. Le montage n’est pas forcément intéressant, et on reste sur quelque chose de très classique qui manque de personnalité. Et étonnement, au fur et à mesure que l’intrigue se pose, on va avoir quelque chose de plus intéressant. Que ce soit dans la relation entre l’héroïne et son voisin, ou encore dans la traque du mari qui va se terminer par une dernière scène très sombre. On flirte même avec le thriller horrifique, chose que maîtrise le réalisateur puisque c’est à lui que l’on doit Le Beau-Père.
Au final, Les Nuits avec mon Ennemi est un thriller qui était très en avance sur son temps. Si on peut lui reprocher un début un peu approximatif dans sa mise en scène, et un léger ventre mou en son milieu, lors de la reconstruction de cette femme, on fait tout de même face à un film qui fait des choix intéressants sur la représentation de la reconstruction, sur une relation toxique qui semble inextinguible, et sur le fait que pour s’en sortir, sans la justice pour nous aider, il faut se faire violence et combattre le mal par le mal. Bref, un film qui n’a pas vraiment vieilli dans son propos et qui met en avant une Julia Roberts qui ne quittera plus le devant de la scène pendant un long moment.
Note : 15/20
Par AqME