décembre 21, 2025

Mad Heidi – Une Vague Histoire de Fromage

De : Johannes Hartmann et Sandro Klopfstein

Avec Alice Lucy, Max Rudlinger, Casper Van Dien, David Schofield

Année : 2022

Pays : Suisse

Genre : Horreur, Action

Résumé :

Heidi est de retour… pour se venger. La petite fille des Alpes devenue adulte part en croisade dans une Suisse totalitaire contre un magnat du fromage mégalo.

Avis :

L’horreur est clairement un terrain d’expérimentation idéal pour les apprentis cinéastes. C’est un lieu dans lequel on peut laisser libre cours à sa pensée, et faire un peu tout et n’importe quoi. Puis c’est aussi le genre le plus produit, ce qui permet à certains producteurs d’être moins frileux quand il faut mettre quelques billets. Certaines sociétés sont même devenues des maisons mères de l’horreur, comme Blumhouse ou encore A24 (ce qui n’empêche pas cette dernière de produire aussi d’autres genres). Mais si cela est valable pour les Etats-Unis, ce n’est pas la même chose en Europe. On sait que les producteurs français sont très réticents à mettre des sous dans des films d’horreur, mais visiblement, c’est aussi le cas en Suisse. La preuve en est avec le financement de Mad Heidi, projet zinzin entre comédie et horreur, qui veut se la jouer Grindhouse, avec plein de références à Tarantino.

Porté par deux bonhommes inconnus des services que sont Johannes Hartmann et Sandro Klopfstein, le film ne va jamais trouver de producteurs pour se faire. En même temps, il semble difficile de convaincre quelqu’un de mettre des billets sur une relecture de Heidi, dans une Suisse totalitaire, où les intolérants au lactose sont immédiatement tués avec du fromage. Même en lisant ces lignes, vous vous dites sûrement que c’est une vilaine blague. Ne trouvant donc personne, les deux zoziaux ont décidé de faire appel aux fans de l’horreur avec un financement participatif sur les réseaux sociaux. Le pari fut payant, puisque le projet va récolter pas moins de deux millions de francs suisses (ce qui équivaut à un peu moins de deux millions d’euros), et le film va pouvoir voir le jour. Mais bien entendu, avec un budget si riquiqui, il ne faut pas s’attendre à du grand art.

« Le scénario de ce film est une vaste plaisanterie »

D’ailleurs, dès le début, on a droit à un petit carton qui explique comment fut financé le film, qui a financé le film, et de ce fait, d’être tolérant quant au résultat. Cette approche peut laisser dubitatif. Même si les ambitions des deux cinéastes étaient assez grandes, on a l’impression qu’ils ne croient pas du tout en leur entreprise, et qu’ils demandent alors au public de ne pas juger trop sévèrement leur œuvre. Un mouvement qui aura tendance à créer l’exact inverse. C’est un aveu de faiblesse, et autant dire que l’on ne part pas confiant en cette comédie gore qui va aller très loin dans le délire. Sauf qu’aujourd’hui, il suffit d’allier les mot « comédie » et « gore » pour susciter un réel engouement, et si en plus, c’est estampillé « grindhouse », alors la boucle est bouclée.

Le scénario de ce film est une vaste plaisanterie, mais qui aurait pu avoir un impact intéressant. Dès l’introduction, on nous présente une usine de fromage qui semble très polluante, et des miliciens qui ressemblent étrangement à des nazis tirent sur une foule de manifestants. Le ton est donné, il se pourrait bien que le film ait une portée politique autour du totalitarisme et de la pseudo neutralité d’un pays quia caché l’or du troisième reich. Mais rapidement, le film va partir vers d’autres contrées en se plaçant du côté de Heidi, une jeune femme dévergondée qui couche avec un jeune berger qui lutte clandestinement contre l’usine de fromage. Ce dernier se fait buter, tout comme son oncle qui protégeait la jeune femme, et elle va alors décider de se venger, et de buter tout ce petit monde à son tour.

« tout ce mauvais goût assumé en devient indigeste »

Il ne faut pas chercher bien loin mais le délire va partir encore plus en eau de boudin lorsque Heidi rentre dans une prison et se forme alors à un jeu de baston avec deux femmes bodybuildées qui sont jouées par des hommes. Le mauvais goût est poussé à l’extrême, avec un dirigeant complètement frappé, qui se fait servir du lait à des heures précises par une femme torse nu. C’est du grand n’importe quoi, et il sera compliqué de tout suivre sans ressentir une profonde tristesse. Car oui, même si on fait un film débile, on peut toujours lui apporter une réflexion en filigrane, et là, c’est le néant total, c’est de la débilité pour de la débilité, et tout ce mauvais goût assumé en devient indigeste. L’écriture est bancale, l’héroïne n’est guère intéressante, et plus globalement le film n’est pas forcément beau à regarder.

Là encore, on pourrait imputer ça au budget, c’est vrai. Mais les incrustations sont vilaines, les fonds verts sont visibles, et rien ne vient sortir le film d’un marasme qui sera sanglant à plus d’une reprise. Oui, le film est gore et s’avère généreux en tête qui explose ou en couilles qui pissent du sang, mais ça reste une notre d’intention, un camouflet pour attirer le chaland autour d’une histoire ringarde et d’une mise en scène qui, in fine, ne fait que ressasser ce que l’on connait déjà avec des films comme Planète Terreur. Et c’est tout là le problème, c’est sensation de regarder un film qui ne fait que singer ses aînés, ne proposant rien de nouveau, sinon le cadre de la Suisse et le délire autour du fromage et des nazis. On a la sensation de nous prendre pour des débiles.

Au final, Mad Heidi est un coup d’épée dans l’eau, un projet qui pouvait être intéressant, mais qui sombre dans le mauvais goût et la débilité la plus crasse. Alors certes, il y a de bonnes idées de mise en scène, les effets gores sont bien fichus et bien cracras, mais c’est raccrocher à peu de chose. Et le plus triste dans tout ça, c’est qu’il y avait vraiment matière à faire mieux, notamment sur le scénario, en se faisant plus acerbe sur l’arrivée d’un gouvernement totalitaire en Suisse, mais les deux compères ont préféré jouer la carte de la bêtise, et on ne peut que constater ce qu’aurait pu être Mad Heidi avec une meilleure écriture.

Note : 08/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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