De : Virginie Sauveur
Avec Karin Viard, François Berléand, Maxime Bergeron, Nicolas Cazalé
Année : 2023
Pays : France
Genre : Policier, Drame
Résumé :
À la mort d’un prêtre, la chancelière du diocèse découvre abasourdie qu’il s’agissait d’une femme ! Contre l’avis de son évêque qui souhaite étouffer l’affaire, elle mène l’enquête pour comprendre comment et avec quelles complicités une telle imposture a été possible…
Avis :
Venant de Caen, Virginie Sauveur est une cinéaste qui a débuté sa carrière à la fin des années 90. Après des études de cinéma à ESRA, Virginie Sauveur entre chez K’ien Production en tant qu’assistante de production. Après s’être un temps orientée vers l’écriture, la jeune cinéaste commence à réaliser ses premiers courts en 1999. Très vite, elle va aller vers le format télé, réalisant dès 2003 des téléfilms, dont certains vont recevoir plusieurs prix dans des festivals. En dix ans, elle va réaliser quatre téléfilms, puis en 2012, avec l’avènement des séries télé, elle s’essaie à ce format, réalisant quatre épisodes sur la série « Engrenages« . Par la suite, elle va réaliser la mini-série « Virage nord » pour Canal +, puis on la retrouvera aux commandes de quelques épisodes des « … rivières pourpres« .
2023 voit passer un nouveau cap pour Virginie Sauveur, puisque « Magnificat » est son premier long-métrage de cinéma. Adapté du roman « Des femmes en noir » d’Anne-Isabelle Lacassagne, ce premier film pour Virginie Sauveur est particulièrement intéressant, car la cinéaste, au travers d’une enquête, soulève tout un tas de sujets, et son film a le mérite de poser d’excellentes questions quant à la place des femmes au sein de l’église, et plus largement dans notre société. Tenu par une excellente Karin Viard, « Magnificat » a cette facilité d’osciller entre plusieurs histoires (une personnelle, et l’autre bien plus grande), sans jamais se perdre. Se posant quelque part entre le drame social et sociétal et le film d’enquête, tout en brossant le portrait d’une femme mère célibataire, ce « Magnificat » intéresse de bout en bout, et surtout, jamais ne faiblit.
« »Magnificat » ose aller jusqu’au bout de son questionnement. »
Charlotte, la cinquantaine, est une mère de famille célibataire. Charlotte est la chancelière du diocèse de Paris. Une nuit, Charlotte est appelée en urgence, car un prêtre qui était atteint d’un cancer vient de mourir. Alors qu’elle ne comprend pas vraiment pourquoi on la fait venir, très vite, sur place, elle va découvrir l’impensable, car le Père Pascal était en réalité une femme. Comment est-ce possible ? Comment cette femme a pu toutes ces années tromper l’église et ses paroissiens ? Alors que l’évêque Monseigneur Mevel veut absolument étouffer l’affaire, contre l’avis de tout le monde, Charlotte va enquêter afin de comprendre ce qui a bien pu se produire…
La religion est un sujet qui est aussi intéressant qu’il est tabou. Bien des films d’ailleurs ont créé des polémiques dès qu’ils se sont frottés à la religion (çà et là, on peut mentionner « Grâce à Dieu« , « Da Vinci Code« , « Benedetta« , « La dernière tentation du Christ« , « Sous le soleil de Satan« …) et sans aller jusqu’à ces polémiques-là, le film de Virginie Sauveur s’aventure sur un terrain glissant, puisque son « Magnificat » questionne la place de la femme au sein de l’église, et plus loin encore, la réalisatrice pose une autre question, l’évolution de l’église au sein d’une société moderne.
Avec une bonne idée de départ, la découverte d’une femme qui s’est faite passer pour un prêtre pendant des années, Virginie Sauveur nous entraîne dans un film qui se pose comme une enquête. L’enquête d’une femme pour savoir comment cette supercherie fut possible, et derrière ça encore, qu’est-ce que cela implique pour l’église. Tenu par un scénario qui est sans cesse une source d’intérêt, « Magnificat » ose aller jusqu’au bout de son questionnement, avec une enquête qui se fait plus complexe qu’elle n’y paraît, et surtout qui réserve son petit lot de surprises.
« »Magnificat » tient un bon scénario. »
Alors, c’est vrai que pour trouver certains personnages, l’enquête en question jouit de quelques facilités, et nous demande d’accepter une intuition ou un coup de chance, mais sur l’ensemble, ce scénario se tient bien et il sait tenir son intrigue, voire son mystère jusqu’au bout. Bien sûr, avec cette histoire, comme je le disais, la question de la place de la femme, et notamment au sein des prêtres, se pose. Pourquoi l’église n’évolue-t-elle pas ? Les réponses s’opposent à des arguments, et si jamais le film ne répond pleinement, il offre des pistes et au-delà ça, le simple fait qu’il mette en lumière ces questionnements est intéressant, d’autant plus que jamais Virginie Sauveur ne fait un procès à l’église. D’ailleurs, les personnages qu’elle présente sont partagés sur la question, avec certains qui pourraient évoluer, qui sont prêts, et d’autres absolument pas.
Puis derrière cette grande intrigue, « Magnificat » s’aventure aussi à explorer une autre intrigue. Une intrigue plus personnelle pour le personnage principal, et ce qui est bien là encore, c’est que derrière ce côté personnel, cette deuxième intrigue pose aussi d’autres questions autour de la femme, de l’église et son fonctionnement. Au bout de tous ces maux, « Magnificat » tient un bon scénario qui en plus a la chance d’être bien mis en scène, ce qui fait qu’il nous tient de bout en bout de film.
« Karin Viard sera aussi très touchante. »
On ajoutera à cela une Karin Viard très investie dans la peau de cette femme qui tient à comprendre ce qui a bien pu se passer pour arriver à cette découverte. Puis derrière ça, cette femme cherche aussi à comprendre pourquoi en arriver jusque-là, et comment l’église peut faire face. De plus, le personnage étant complexe, Karin Viard sera aussi très touchante lorsque le film aborde un côté plus intime de son histoire (même si, très vite aussi, on comprend de ce côté-là où le film va aller…). Pour le reste du casting, entre sérieux et humour parfois, on trouvera François Berléand en évêque dépassé, un Patrick Catalifo assez sombre et suspicieux, une Anaïde Rozam adorable, ou encore un Benoît Allemane très tendre, voire même assez touchant dans ses confessions.
Ce « Magnificat » se pose donc un bon film qui soulève tout un tas de questions intéressantes. Virginie Sauveur fait une belle entrée dans les salles obscures, avec un film qui oscille bien entre sujets de société, drame social et film d’enquête, pour une réflexion vraiment intéressante. À voir.
Note : 14/20
Par Cinéted