janvier 26, 2025

Showgirls – Le Film Maudit de Verhoeven

De : Paul Verhoeven

Avec Elizabeth Berkley, Kyle MacLachlan, Gina Gershon, Glenn Plummer

Année : 1996

Pays : Etats-Unis, France

Genre : Drame

Résumé :

Sans famille, sans amis et sans argent, Nomi Malone débarque à Las Vegas pour réaliser son rêve : devenir danseuse. A peine arrivée, elle se fait voler sa valise par l’homme qui l’a prise en stop. Perdue dans la ville, Nomi doit son salut à Molly Abrams, costumière au «Cheetah», un cabaret réputé de la ville. Molly lui trouve un job de stripteaseuse dans une boîte où elle fait elle-même quelques extras. Cristal Connors, la vedette du «Cheetah», très attirée par Nomi, la fait engager dans son show où elle gravit rapidement les échelons. Dans les coulisses impitoyables de Vegas, Nomi devient très vite une rivale gênante.

Avis :

Réalisateur sulfureux et sans concession, Paul Verhoeven fait partie de ces cinéastes qui ont été blacklistés par Hollywood suite à une paire d’échecs commerciaux, alors même que le monsieur est l’artisan de quelques chefs-d’œuvre, comme Robocop, La Chair et le Sang, Total Recall ou encore Basic Instinct. Alors qu’il est au top de sa forme, en 1995, il décide de s’atteler à Showgirls, un drame autour d’une jeune femme paumée qui rêve de devenir danseuse à Las Vegas. Mais suite à divers problèmes de production, il laisse tomber le script original pour partir sur le fameux film Croisades avec Schwarzenegger, qui ne verra jamais le jour, la faute à des producteurs à la masse. Il revient alors sur Showgirls, aidé par une maison de production française, et change le scénario pour le rendre plus percutant. Il en résultera un film qui va faire couler beaucoup d’encre.

D’après les dires de Paul Verhoeven lui-même, il a voulu tout exagérer. Ainsi, Showgirls est un film qui est vulgaire, dans le sens où tout est grandiloquent, frénétique, aussi bien les personnages que l’histoire en elle-même. Ici, on va suivre Nomi, une jeune femme qui fait su stop pour se rendre à Las Vegas. Elle se fait alors arnaquer par un type, se retrouve à la rue et va faire la connaissance de Molly qui va l’aider à s’en sortir. Nomi débute alors comme stripteaseuse dans un bouge avant de se faire repérer par la superstar du moment, Cristal, qui voit en elle une danseuse née. Seulement, une relation d’amour/haine va s’installer entre Cristal et Nomi, au point que cette rivalité va dépasser les limites de l’argent et de l’amour, dans un monde de hyènes où tous les coups sont permis.

« On va être dans un film qui ressemble à Paul Verhoeven. »

Bref, on va être dans un film qui ressemble à Paul Verhoeven, où le sulfureux, le sexe et le sang sont là pour montrer la médiocrité de l’être humain, mais aussi pour pointer du doigt un monde du showbiz puant et perverti. Il n’est pas étonnant que lors de sa sortie, le film n’ait pas plu au public, puisqu’il lui renvoie une image salace d’une Amérique sans cœur. Et c’est clairement le but de ce film, qui pousse tous les potards au maximum pour mieux servir la confiture aux cochons. Afin d’appuyer son propos et d’être le plus explicite possible, le réalisateur met en avant une jeune femme caractérielle, pénible, extrême dans ses coups de colère, mais qui a un mental d’acier et de battante. A force de se faire avoir, elle va devenir à son tour une prédatrice dans un monde sans foi ni loi.

Son évolution est logique, bien qu’un peu trop rapide, mais il faudrait presque faire une série pour aborder pleinement tous les thèmes qu’embrasse le film. Ici, elle passe de la fille campagnarde à la star du moment, jusqu’à se rendre compte qu’elle se prostitue presque pour du boulot, renouant avec un passé trouble que l’on découvrira sur le tard. Outre ce personnage, qui se rend compte du monde dans lequel il végète et décide de prendre une décision radicale, on aura droit à toute une flopée de protagonistes détestables, qui ne sont là que pour paraître et briller. Cristal, par exemple, est une saloperie sans nom, qui joue avec Nomi comme un chat avec sa proie. Cette relation ambiguë mène à des situations à la fois chaudes et tendues, qui auront pour finalité un dépassement de limite et une lutte sans merci pour la première place.

« Un aspect désenchanté totalement assumé. »

Du côté des hommes, là aussi, on baigne dans le panier à crabes, avec des types opportunistes, qui prennent les stripteaseuses et les danseuses pour des putes, s’adjugeant des relations sexuelles moyennant finance. On aura droit au producteur véreux, infidèle et qui ne voit que son intérêt propre. Il y aura aussi ce danseur raté, qui enchaine les petits boulots sur Las Vegas pour s’en sortir et va se faire moquer par le public. Et puis il y a aussi ce tenancier d’une boîte de striptease, tout d’abord immonde dans ses propos par rapport à ses nouvelles danseuses, mais qui va venir nous cueillir le cœur au détour d’une scène où il vient dire bonjour à son ex star. Bref, on a droit à un panel de personnages qui sont tous plus détestables les uns que les autres, mais qui offrent aussi des thèmes importants, et toujours d’actualité.

Bien évidemment, que serait un film de Paul Verhoeven sans un peu de violence et un aspect désenchanté totalement assumé. Avec Showgirls, cela se traduit par une fin qui résonne comme un uppercut. On y retrouve une star de la chanson qui s’avère être une abomination, et Nomi va venger sa meilleure amie qui sera une victime de ce type. En avance sur son temps, le cinéaste évoque la masculinité toxique et les violences faites aux femmes. De manière crue, histoire de bien appuyer son point de vue et de se laisser aller à une vengeance qui l’est tout autant. On retrouverait presque un peu de Abel Ferrara sur la fin, faisant penser à L’Ange de la Vengeance, notamment. Et puis il y a cette mise en scène nerveuse, percutante, avec de superbes tableaux de danse où les corps transpirent et bougent de façon lascive.

Au final, Showgirls est sans doute le film maudit de Paul Verhoeven, mais il reste un vrai objet cinématographique dans toute sa vulgarité. Violent, offrant un portrait désenchanté et dépressif d’une Amérique qui ne jure que par le sexe et l’argent, le cinéaste pousse tous les potards dans l’excès et délivre une vraie baffe à la tronche d’un pays qui n’acceptera pas cette critique acerbe et percutante. Heureusement, malgré ses Razzies injustes, le film connaîtra une belle réhabilitation en vidéo-club, devenant ainsi un film autant apprécié que détesté, mais ne laissant jamais indifférent.

Note : 17/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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