Avis :
Si la France n’est pas le pays le plus connu pour ses groupes de Métal, il n’en demeure pas moins qu’il y a des artistes de zinzin qui gratouillent avec maestria leur guitare pour nous fournir leur lot de violence musicale. Le problème, c’est que c’est rarement mis en avant, et de nombreux groupes galèrent pour percer, ou tout simplement trouver un label pour vivre de leur talent. The Great Old Ones est à la base un One Man Band, ou tout du moins le projet solo de Benjamin Guerry, qui va écrire tous les textes du premier album, et va se décider à trouver des musiciens après coup pour enregistrer tout cela. Passionné par les écrits de H.P. Lovecraft, chaque album s’inspirera de l’univers de l’écrivain, allant même jusqu’à imaginer une suite au Cauchemar d’Innsmouth. Cosmicism est le quatrième album de la formation.
Et il a un petit truc en plus cet album, ou en moins en fonction de comment on voit les choses, puisque c’est le dernier sur lequel officie Léo Isnard à la batterie. Cependant, on notera l’arrivée de deux nouveaux membres, à savoir Alexandre Rouleau à la gratte et Benoit Claus à la basse. Bref, on pourrait presque croire que Cosmicism est un renouveau pour les bordelais, qui ne vont faire aucune concession sur cet effort, toujours à la lisière d’un Post-Black atmosphérique, mais avec de gros rouleaux compresseurs qui frappent fort. Bien évidemment, comme tout groupe de Post-Black qui se respecte, on a droit à une petite introduction assez sombre. Cosmic Depths annonce la couleur avec quelque chose d’assez mélancolique, mais de relativement ténébreux et inquiétant. Une bonne entrée en matière qui donne bien envie de se lancer dans la suite des évènements.
Déboule alors The Omniscient, qui commence assez lentement, reprenant presque le ton lancinant de l’introduction. Cependant, on sent qu’avec la batterie, le morceau ne demande qu’à partir, et c’est ce qu’il va se passer. The Great Old Ones ne va pas faire dans la demi-mesure et va balancer un gros blast pour ensuite trainer ses pattes dans un Black Métal assumé, qui tire vers quelque chose de plus mélodique en fond, notamment avec les riffs de guitares. C’est relativement bien fichu, et surtout, malgré la durée du titre, qui dépasse allègrement les huit minutes, on ne ressent pas d’ennui. Alors certes, on aurait aimé un break plus puissant, ou un solo de guitare plus prégnant, mais en l’état, c’est propre et on sent que le groupe a signé chez Season of Mist pour avoir un impact plus massif.
Aimant les morceaux très longs, le groupe ne fait pas dans la demi-mesure et présente toujours des pistes qui dépassent un temps d’écoute « calibré ». Avec Of Dementia, on est encore sur un titre qui déborde d’envie et d’atmosphère macabre, notamment avec des chœurs qui peuvent faire penser à des chants de cultistes. Porté par des breaks bien rugueux, le morceau se détache du reste de par sa richesse et sa structure massive. On sent bien que tout est bossé en amont et rien n’est laissé au hasard. Lost Carcosa (belle référence à Ambrose Bierce qui inspira Robert W. Chambers pour le Roi en Jaune) va pousser le bouchon encore plus loin, puisqu’avec l’ambiance ténébreuse, on aura droit à quelques glissements de riffs qui ajouteront une plus-value indéniable. Et en prime d’une violence accrue, on aura enfin droit à un vrai solo qui tient la route.
Mais tout cela n’est rien face à A Thousand Young, pièce maîtresse de plus de onze minutes qui démontre tout le talent du groupe pour écrire des compositions à la fois complexes, violentes, tonitruantes et grandiloquentes. Alors oui, on est sur un sous-genre qui n’est pas à la portée de tous, mais on comprend mieux, avec un tel titre, pourquoi le groupe a fait les premières parties de Behemoth pendant un temps. Dreams of the Nuclear Chaos va sortir un peu du lot, car il s’agit d’un morceau plus brut, plus court, et qui manque peut-être d’une ambiance plus délétère. On a l’impression d’entendre un moment de relâchement de la part du groupe. Enfin, Nyarlathotep termine le skeud de la meilleure des façons, accentuant encore le côté malsain de l’ambiance, faisant une belle révérence à l’un des plus connues des grands anciens.
Au final, Cosmicism, le quatrième album de The Great Old Ones, est une immense réussite, et certainement l’une des meilleures portes d’entrée dans leur discographie, si ce n’est dans le Post-Black plus ou moins atmosphérique. Dense, porté par des morceaux très longs et maîtrisés à la perfection, il est assez triste de voir que le groupe perce si peu, tout du moins en France, et on lui souhaite le meilleur à l’international, certainement plus ouvert que notre pays de la soi-disant culture.
- Cosmic Depths
- The Omniscient
- Of Dementia
- Lost Carcosa
- A Thousand Young
- Dreams of the Nuclear Chaos
- Nyarlathotep
- To a Dreamer (Bonus Track)
Note : 17/20
Par AqME