novembre 9, 2024

Alcest – Les Chants de l’Aurore

Avis :

On associe toujours la scène Black Métal à quelque chose de noir, d’extrême, de sombre et de dépressif. Pour autant, certaines personnes tendent à faire changer les choses. Si on peut compter sur des projets Black qui jouent avec des pochettes rigolotes ou rayonnantes, il y en a un qui a décidé de faire bouger les choses de façon musicale. Alcest est un duo français composé de Neige et de Winterhalter et les origines du groupe remontent à la toute fin des années 90. Mélangeant allègrement le Shoegaze avec des éléments Black, certaines critiques accordent à Alcest l’invention du Blackgaze, à savoir de grosses nappes de claviers lancinantes, avec quelques saillies Black où le blast et le chant crié sont de mise. Les Chants de l’Aurore est le septième album de la formation, et il fait le pari d’un Blackgaze lumineux et poétique.

Neige est une personnalité assez solaire, tout en étant énigmatique. Malgré des chansons qui sont mélancoliques, et parfois tristes, le chanteur/compositeur possède, d’après ses dires, une luminosité en lui qui fait qu’il a envie de bousculer les codes du genre et de se tenter à une expérience presque mystique avec un Black envoûtant et lumineux. Dès le début, avec Komorebi (mot japonais qui exprime les rayons du soleil qui passe à travers les nuages et les feuilles), Alcest nous plonge dans quelque chose d’onirique et de doux. Outre la mélodie qui est calme et reposante, on entend une jolie ligne de basse et le refrain va permettre au batteur de se lâcher un peu plus, avec notamment quelques éléments plus « Black », tout en gardant un chant clair et solaire. L’ensemble est beau et fonctionne à plein régime. Pour une entrée en matière, c’est maîtrisé à la perfection.

Quand on aborde L’Envol, on sent que le côté métal d’Alcest est toujours bien présent. Il y a de la percussion, les riffs sont puissants, et on ressent cette envie de mettre de la double-pédale au niveau de la batterie. Mais rapidement, outre le chant clair de Neige, on aura droit à un break d’une rare douceur, qui permet, pendant un temps, de voyager très loin. C’est onirique, c’est très beau, mais ça n’oublie jamais de retomber sur ses pattes dans le dernier tiers, avec quelques fulgurances plus puissantes et un chant qui va aller vers le growl. La construction est longue et lente, mais elle permet aussi de ressentir toute une flopée d’émotions, ce qui fait un bien fou. On retrouvera les mêmes sensations avec Améthyste, qui va tout de même se faire plus rugueux, même si on reste sur quelque chose d’aussi onirique.

Mais c’est à travers ces deux morceaux que l’on va voir tout le talent d’écriture d’Alcest. Les paroles sont poétiques, elles sont une invitation au voyage, à la fois introspectif, mais aussi ouvert à la nature et aux autres. On va bien au-delà de certains thèmes généralement abordés dans le Black (ou même le Shoegaze) et cela fait un bien fou. Flamme Jumelle poussera le délire encore plus loin, avec des élans Pop totalement assumés et un refrain qui bouge un peu plus, mais qui reste dans une rythmique calme et posée. Ce titre pourrait presque passer pour un long interlude lumineux, mais le break est magnifique et démontre tout le talent du groupe pour brouiller les pistes sur son style et son genre. Réminiscence sera le vrai interlude de l’album, avec un superbe piano/violoncelle et une douceur qui vient nous envelopper comme du coton.

Cela va permettre au groupe de mieux nous percuter par la suite avec L’Enfant de la Lune et son début en japonais. Un peu comme pour les deux titres phares déjà évoqués, ce titre nous plonge dans un onirisme sublime, alors même que les riffs et la rythmique font écho à un Black classique. Mais tout cela est contrebalancé par une luminosité incroyable, et cette envie de contourner les codes pour mieux nous surprendre et nous toucher. C’est fait de manière intelligente, avec un sens mélodique inégalable. Enfin, Alcest clôture son album avec L’Adieu et c’est un titre déchirant au possible. A l’image du reste de l’effort, c’est doux, beau, tendre et très mélancolique. Un morceau à écouter les yeux fermés pour se laisser bercer. C’est juste sublime et d’une maîtrise à toute épreuve.

Au final, Les Chants de l’Aurore, le dernier album d’Alcest, est une réussite totale. Entre onirisme et virtuosité, brouillant les pistes en affublant certains morceaux de passages plus Black et nerveux, on peut aisément dire que les français possèdent un savoir-faire hors normes et nous surprennent à chaque nouvel album. Bref, une réussite indéniable, qui change radicalement du Post-Black que l’on peut entendre en ce moment. Et c’est français !

  • Komorebi
  • L’Envol
  • Améthyste
  • Flamme Jumelle
  • Réminiscence
  • L’Enfant de la Lune
  • L’Adieu

Note : 17/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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