Un Stupéfiant Noël!

De : Arthur Sanigou

Avec Eric Judor, Matthias Quiviger, Alex Lutz, Lison Daniel

Année : 2023

Pays : France

Genre : Comédie

Résumé :

À la veille de Noël, Greg, un policier solitaire et taciturne, n’hésite pas à abandonner sa fille pour partir en mission. Pour lui donner une leçon, le Père Noël décide d’exaucer le souhait de sa fille : que son père ressemble à Richard Silestone, le bon père de famille un peu benêt et lourdement endetté du film de Noël qu’elle adore. Alors que Greg est envoyé dans ce monde improbable, Richard atterrit par erreur dans le monde réel. En se réveillant, les deux hommes comprennent qu’ils n’ont d’autre choix que de réussir la mission de l’autre pour regagner leurs vies respectives : démanteler un dangereux réseau de drogue pour Richard et sauver la maison familiale pour Greg en remportant le concours de patinage artistique local.

Avis :

On n’y échappe pas, chaque année on a droit aux films de Noël. Et bien souvent, si l’on met de côté tous les téléfilms de merde qui sortent à la télévision avec des stars déchues, on se retrouve face à des longs-métrages à destination des enfants, utilisant la comédie et le fantastique pour créer un truc autour du Père Noël ou de la famille. Les exemples sont multiples, et cela est encore plus prégnant avec les différentes plateformes de streaming qui s’en amusent. Fort heureusement, il existe aussi des films de Noël sulfureux, qui jouent sur l’horreur ou sur un côté grinçant pour se démarquer. Ainsi, quand Un Stupéfiant Noël ! d’Arthur Sanigou sort sur Prime Video, on ne sait pas sur quel pied danser, puisque sous ses airs de comédie familiale, on trouve un Eric Judor moustachu et une sombre histoire de drogue.

Et après visionnage, Un Stupéfiant Noël ! est bien un film de Noël, c’est même une comédie de Noël, mais qui n’est pas pour les enfants, puisque ça joue avec le trafic de drogue, ça se moque des téléfilms de Noël, et surtout, c’est à la fois vulgaire, con comme les blés et parfois gentiment grinçant. On pourrait alors croire qu’un tel pot-pourri ne marcherait pas (d’autant plus si on rajoute un Youtubeur en co-star), et pourtant, le film va s’avérer être une bonne surprise, à la fois déjantée, touchante, mais aussi hyper inventive dans son concept tiré par les cheveux. Car ici, on va suivre un flic infiltré délaissant sa famille pour des missions qui va se retrouver à la place d’un père de famille aimant au sein d’un téléfilm de Noël moisi, et ce dernier se retrouve à la place du flic, chacun prenant la place de l’autre.

« Le film se fait relativement drôle, jouant avec tous les codes pour mieux les détourner et s’en moquer. »

Bien évidemment, le premier thème que l’on voit dans le film concerne la famille, et surtout son importance. Dans les deux cas, on voit deux pères totalement différents, mais qui doivent se battre pour les mêmes objectifs, garder sa famille unie. D’un côté, on a ce flic bougon et virulent qui délaisse sa fille pour son boulot, et qui va se rendre compte de ce qu’il perd en allant dans ce téléfilm. Et de l’autre, on a ce père timide qui pense ne pas avoir les forces pour se battre pour sa famille, et va devoir montrer des ressources insoupçonnées pour se découvrir, et ainsi sauver sa maison et l’amour de sa femme. C’est relativement simple à comprendre, et le film ne cache jamais ses intentions sous des couches de sous-thèmes qui auraient été lourds. Bref, dans le fond, on est sur un film de Noël.

Mais c’est oublier la présence d’Eric Judor dans les parages, avec son humour burlesque et sa propension à surprendre. Même s’il n’est pas derrière le scénario, il y a toute une équipe derrière qui manipule avec prouesse l’art du ubuesque et du non-sens, et on retrouve quelques amis à lui, dont Hafid F. Benamar (présent dans Platane et Week-end Family). Tout ce petit monde va alors jouer avec les codes du policier lorsqu’il s’agit du monde réel, et du téléfilm américain surjoué lorsqu’il faut aller dans le monde fictif. Et c’est là-dessus que le film se fait relativement drôle, jouant avec tous les codes pour mieux les détourner et s’en moquer. De nombreux parallèles sont alors faits, montrant des enjeux similaires, mais dans des cases différentes. Si un père doit apprendre le patinage artistique alors que c’est un gros bourrin, l’autre va cuisiner de la drogue de façon naïve.

« Certains moments sont totalement débiles. »

Le film va donc trouver des éléments humoristiques qui se répondent dans les deux univers. D’un côté, Eric Judor va jouer le gros bêta qui fabrique des bonhommes de pain d’épice truffés de drogue, affrontant alors un monde réel avec un fort décalage. Et de l’autre, Ragnar le Breton va mettre des bourre-pifs à tout le monde dans un univers naïf où les problèmes se règlent avec des patins au pied. La distance est souvent drôle, et même si ça peut paraître facile de se moquer de tout ça en jouant sur les dissonances, il n’en demeure pas moins que là, c’est plutôt bien fichu. Certains moments sont totalement débiles, à l’image de ce père de famille de petite taille que l’on présent comme un cowboy revêche, ou encore les discussions ubuesques entre un Eric Judor neuneu et un monde de la drogue en pulls de Noël.

Le film jouit aussi d’un casting assez impressionnant, avec une pléiade de comédiens issus de la comédie française. Si on retrouve un petit caméo de Philippe Lacheau, on sera surtout ravi de découvrir un Alex Lutz en méchant caricatural, un Bruno Sanches complètement allumé en fan du père Noël, ou encore un Monsieur Poulpe en tueur à gages raté, qui se blesse constamment tout seul. Le long-métrage utilise tout ce petit monde pour camper des personnages caricaturaux, certes, mais qui s’amuse follement à surjouer comme dans tous ces téléfilms américains de Noël. Le seul bémol que l’on peut apporter au métrage, c’est qu’il faut vraiment entrer dans le délire, et parfois accepter que ça aille très loin, à l’image du personnage de Bruno Sanches, qui en fait des caisses pour offrir un final complètement barge et burlesque.

Au final, Un Stupéfiant Noël ! est un film qui est surprenant. Derrière ses atours de comédie débile et lourdingue au concept éculé et déjà-vu, on se retrouve face à un film qui a conscience de ce qu’il est, et va à fond dans le n’importe quoi pour mieux nous surprendre au sein d’une écriture qui tient la route. On retrouve alors des éléments burlesques, du non-sens, une certaine candeur dans les personnages, et un final assez touchant bien qu’attendu. Sans être un film inoubliable, ou même marquant, le long-métrage d’Arthur Sanigou a le mérite de prendre à revers tous les films de Noël, et de proposer quelque chose de foutraque et sulfureux, ce qui fait un bien fou en cette période un peu trop cul-cul la praline.

Note : 14/20

Par AqME