Avec Christian Clavier, Gérard Depardieu, Jamel Debbouze, Gérard Darmon
Année : 2002
Pays : France
Genre : Comédie
Résumé :
Cléopâtre, la reine d’Égypte, décide, pour défier l’Empereur romain Jules César, de construire en trois mois un palais somptueux en plein désert. Si elle y parvient, celui-ci devra concéder publiquement que le peuple égyptien est le plus grand de tous les peuples. Pour ce faire, Cléopâtre fait appel à Numérobis, un architecte d’avant-garde plein d’énergie. S’il réussit, elle le couvrira d’or. S’il échoue, elle le jettera aux crocodiles.
Celui-ci, conscient du défi à relever, cherche de l’aide auprès de son vieil ami Panoramix. Le druide fait le voyage en Égypte avec Astérix et Obélix. De son côté, Amonbofis, l’architecte officiel de Cléopâtre, jaloux que la reine ait choisi Numérobis pour construire le palais, va tout mettre en œuvre pour faire échouer son concurrent.
Avis :
Adapter une bande-dessinée franco-belge en film avec de vrais acteurs n’est pas une chose aisée. Déjà, on se confronte à une imagerie un peu loufoque qui ne correspond pas forcément à une projection « réelle », mais en plus de cela, il faut prendre des scénarios qui peuvent se transposer sur grand écran. Les échecs furent multiples, de Lucky Luke en passant par Benoit Brisefer, mais on retiendra aussi de bons succès, comme le fameux Astérix et Obélix Mission Cléopâtre d’Alain Chabat. Véritable carton au box-office lors de sa sortie en 2002 (devant Spider-Man ou encore Harry Potter et la Chambre des Secrets en France), le film va aussi bien marquer par sa réalisation pharaonique que par son humour ultra référencé qui n’arrête pas une seule seconde. Afin de fêter ses vingt ans d’existence (vingt-et-un si on veut être précis), Alain Chabat redonne un coup de fouet à son film.
Bénéficiant d’une ressortie remasterisée avec de plus belles couleurs, on va pouvoir se rendre compte que le film n’a pas pris une ride, mais qu’en plus de ça, son humour n’a pas (trop) vieilli, continuant de faire rire un public plus jeune. Il faut dire que le talent d’Alain Chabat n’est plus à démontrer en tant que comique, utilisant des dialogues incongrus, jouant avec les caractéristiques de ses comédiens, ou encore arrivant à trouver un juste équilibre entre la tonalité de la BD et celle d’un véritable film. Alors, il est sûr que ce n’est pas sur le scénario qu’il va falloir compter. Ici, ça suit scrupuleusement la bande-dessinée, avec quelques ajouts, mais globalement, on reste dans l’essence même d’Uderzo et Goscinny. C’est simple à comprendre, mais on retrouve des thématiques intéressantes autour de la cupidité, de l’amitié ou encore du choc des cultures.
« Le film a beau avoir plus de vingt ans d’existence, il reste très d’actualité. »
Derrière son humour potache, le film montre l’altruisme des gaulois envers le peuple égyptien, et notamment Numérobis, un pauvre architecte avant-gardiste mis au pied du mur par Cléopâtre pour flatter son égo. L’entraide deviendra encore plus forte lorsque la concurrence va tout faire pour saccager ce projet de palais. En plus de cette entraide pour réussir, on va aussi y voir des allusions au monde du travail, et à son évolution. Les révoltes des employés, les coups de fouet pour faire travailler plus, tout cela a encore une résonance aujourd’hui, où l’on nous vend du travailler plus pour gagner plus, alors qu’il y a de plus en plus de burn-out et autre mal-être au boulot. Le film a beau avoir plus de vingt ans d’existence, il reste très d’actualité et joue avec des thèmes contemporains.
Néanmoins, on va aussi se rendre compte que certaines blagues ne marchent plus trop. La faute à une société qui évolue très vite au niveau de la télécommunication, et cela touche principalement le personnage d’Itinéris. Sa vanne sur le réseau qui ne passe plus ne fonctionne pas forcément avec le public actuel qui ne peut comprendre cette blague. Certains passages sont aussi un peu plus fades qu’auparavant, et on ressent des passages presque forcés, comme la référence à Star Wars, qui est drôle, mais arrive un peu comme un cheveu sur la soupe. Fort heureusement, d’autres moments, devenus cultes, sont toujours autant plaisant, du monologue d’Edouard Baer à la bagarre d’arts martiaux entre Gérard Darmon et Jamel Debbouze. On ressent toutes les influences de Chabat, mais aussi celle des Nuls, avec quelques séquences ubuesques comme le coup de Cartapus (Chantal Lauby).
« On ressent aussi un amour profond pour le matériau de base. »
Au niveau de la mise en scène, force est de constater que ça n’a pas trop vieilli. Alors peut-être que cela est dû à la remasterisation (Ciné Boost est vraiment magique), mais on sent que le film a vraiment essayer d’utiliser au maximum des effets visuels artisanaux plutôt que de faire appel au numérique. D’ailleurs, les quelques scènes qui font appel à ça sont assez visibles et pas forcément jolies. Mais dès qu’il y a des animatronics (les crocodiles) ou de vrais décors gigantesques, le film prend une autre dimension, et il reste très impressionnant pour une comédie française. Certains plans sont même très beaux, notamment lorsqu’il faut filmer le désert sur des plans larges avec le soleil couchant. Alain Chabat est inspiré et cela se ressent dans le moindre détail. On ressent aussi un amour profond pour le matériau de base.
Un amour qui ne se contente pas d’un alignement de guests pour faire des farces. Et qui ne s’appuie pas non plus sur un casting moderne pour faire venir les petits jeunes dans les salles. Même si on retrouve un parterre de comédiens gargantuesque, chacun a un rôle assez important, ou tout du moins, ne fait pas une apparition pour contenter le fan de base. Ici, les rôles sont bien définis, et ne font pas forcément référence à carrière de tel ou tel « acteur ». De ce fait, on sera sous le charme de Monica Bellucci, en empathie avec un Jamel Debbouze épatant, ou encore accroché aux lèvres d’Edouard Baer, dont le monologue reste encore dans nos têtes plus de vingt ans après. Comme quoi, on peut réunir un gros casting, et réussir à donner de vrais rôles à chacun, sans tomber dans la farce ponctuelle et opportuniste.
Au final, Astérix et Obélix Mission Cléopâtre est un très bon film, et sans doute la meilleure adaptation de BD franco-belge à ce jour. A la fois drôle, maline, dynamique et multi-référencée, cette comédie a beau voguer sur ses plus de vingt ans, elle reste une belle réussite, et la preuve du talent humoristique incroyable d’Alain Chabat. Bref, cette remasterisation permet de redécouvrir un film qui a bercé de nombreux adolescents dans les années 2000, et qui arrive encore aujourd’hui à faire rire les plus jeunes et à se rendre compte qu’on peut faire un Astérix réussi au cinéma, sans être un dessin-animé.
Note : 17/20
Par AqME