Avis :
Quand on évoque le Métal Industriel, on pense immédiatement à Rammstein, qui a marqué le genre d’une trace indélébile. Pourtant, ce n’est pas le seul groupe teuton à être catégorisé dans ce sous-genre, et on retrouve quelques itérations, à l’image de KMFDM. Fondé en 1984 comme une performance artistique autour de Sascha Konietzko, ce qui va devenir un groupe à part entière (avec de nombreux changements de line-up et des participations sur de nombreux albums) devient alors un phénomène qui dépassera les frontières de l’Allemagne, pour s’expatrier aux Etats-Unis. Aujourd’hui, le groupe est toujours actif, mais il n’a pas de genre à proprement parler. C’est-à-dire que si le métal industriel s’invite sur quelques pistes, on est clairement plus sur un groupe électro qui tabasse fort et s’octroie parfois de gros riffs, histoire d’enfoncer le clou sur des paroles très politiques et engagées.
Hell Yeah est le vingt-et-unième album studio du groupe, et il syncrétise tout ce que représente KFMDM, c’est-à-dire un mélange parfois incongru d’électro-beat, de métal et d’électro hardcore des familles. D’ailleurs, dès le premier morceau, on sait dans quoi on tombe. Hell Yeah laisse parler les beats et ne s’embête pas forcément avec une certaine complexité. On reste sur quelque chose d’assez basique, de plutôt plaisant, mais qui surprend si on s’attend à subir des assauts répétés de grattes bien nerveuses. Ce ne sera pas le cas, et on sent que le frontman a plus envie de faire parler l’électro que le métal. Cela se confirmera d’ailleurs avec Freak Flag, électro jusqu’à la lie, avec son refrain pénible et ses allitérations débilitantes. C’est dommage, on aurait aimé quelque chose d’un peu plus sulfureux, rentre-dedans et moins « je fais danser les amateurs du genre ».
Néanmoins, preuve d’une certaine ouverture d’esprit, on aura droit à une première interlude avec Oppression, qui se permet un petit pas de côté vers du Reggae. Tout ça pour mieux nous fracasser la tête avec Total State Machine, où là, on se retrouve avec de grosses guitares qui vont venir marteler une ambiance sombre et puissante. Il faut allier cela à des paroles très engagées et qui ne laissent rien au hasard. Un discours contre les gouvernements actuels (your gourvement hates you) qui fait du bien à attendre, et cela même si l’album fête ses six ans d’existence. Après cela, la deuxième partie d’Oppression permet un petit calme avant d’attaquer la suite. Et comme à chaque fois que Lucia Cifarelli chante, on a droit à un titre plus électro-pop qu’autre chose, mais là, avec Murder my Heart, ça cartonne, avec un bon relent des années 80.
Puis le groupe de revenir à des fondamentaux électro, mais toujours avec un sens de l’engagement, avec Rip the System V.2.0. Le titre n’est pas forcément le meilleur de l’album, la faute à un rythme qui ne décolle jamais, mais si on ligne entre les lignes, on retrouve des paroles qui ont du sens, et un groupe qui n’a pas peur de dire les choses. Shock sera aussi assez calme, et c’est là que l’on va entendre les limites du groupe, qui a du mal à innover et à trouver des ressorts pour mieux nous percuter au sein des titres. On reste sur une ligne rythmique plate, et c’est dommage qu’il n’y ait pas quelques saillies pour venir nous réveiller entre temps. Fake News peut presque se poser en titre salvateur, notamment parce qu’il possède un gros beat qui permet d’imposer un rythme plus nerveux à l’ensemble.
Parfois, mettre des paroles sulfureuses ne suffisent pas à emporter l’adhésion du public, et on sent qu’il manque quelques éléments pour vraiment nous conquérir. Rx 4 the Damned est un peu dans le même moule, et même s’il apporte de belles lignes de basse, ça reste assez décousu, et il faut s’accrocher pour rester concentrer tout du long. Et même si parfois, le refrain peut faire penser à The Prodigy. Burning Rain est peut-être le morceau qui est le plus dans la mouvance Métal Indus, notamment grâce à des grattes puissantes. Puis Only Lovers va fonctionner pleinement grâce à une mélodie qui marque de suite. Le rythme, assez lent, permet d’imposer une jolie grâce qui manquait à l’ensemble. Enfin, Glam, Glitz, Guts and Gore conclut l’album d’une belle manière, fracassant tout sur son passage, avec notamment de grosses guitares grasses et un beat infernal.
Au final, Hell Yeah, le vingt-et-unième album de KMFDM, peut se voir de deux façons. Soit on adhère au parti pris du groupe de faire beaucoup d’électro, et à ce moment-là, l’album peut paraître bon. Soit on est déçu de l’absence flagrante de métal indus, et là, l’effort nous parait assez fade, avec trop d’électro. Le groupe a toujours eu le don de diviser, et il continue de peaufiner cette image. Mais une chose est sûre, c’est qu’au niveau des paroles, il y a de la matière et le groupe est très engagé, ce qui est une chose devenue trop rare de nos jours.
- Hell Yeah
- Freak Flag
- Oppression ½
- Total State Machine
- Oppression 2/2
- Murder my Heart
- Rip the System V.2.0
- Shock
- Fake News
- Rx 4 the Damned
- Burning Rain
- Only Lovers
- Glam, Glitz, Guts and Gore
Note : 12/20
Par AqME