octobre 9, 2024

Mona Lisa

De : Neil Jordan

Avec Bob Hoskins, Cathy Tyson, Michael Caine, Robbie Coltrane

Année : 1986

Pays : Grande-Bretagne

Genre : Drame, Thriller

Résumé :

Malfrat de petite envergure, George vient d’être libéré de prison après sept ans derrière les barreaux. Sa femme lui claque la porte au nez et refuse de le laisser voir leur fille. Accompagné de Thomas, son compère de toujours, il se met en quête d’un certain Mortwell. Faute de le trouver, il accepte de servir de chauffeur à Simone, une call-girl noire qui écume les hôtels de luxe. Celle-ci lui demande de l’aider à localiser Cathy, une jeune prostituée qu’elle cherche désespérément…

Avis :

Neil Jordan est un réalisateur qui, durant sa carrière, a touché un peu à tous les genres. Sa carrière débute au début des années 80, et il se fait remarquer dès son deuxième film, La Compagnie des Loups. Par la suite, malgré des longs-métrages réussis qui alternent entre drame, thriller et comédie fantastique, il faudra attendre dix ans avant que Neil Jordan se retrouve devant le feu des projecteurs, avec Entretien avec un Vampire. A partir de là, le cinéaste passe un cap et devient fort recommandable. Mais avant de devenir connu du grand public, il est passé par des phases très différentes, et entre un film de loup-garou et une comédie avec des fantômes, l’homme s’est essayé au thriller dramatique et un peu sensuel avec Mona Lisa. Porté par Bob Hoskins en petit voyou bougon, ce film est une petite réussite trop mal connue.

L’histoire débute comme une comédie dramatique, où l’on va suivre un petit type qui sort de prison, et souhaite revoir son ex-femme, ainsi que son ancien employeur pour retrouver un travail rapidement. Mais les choses ne vont pas se passer comme prévu, puisque sa femme le rejette, l’empêchant ainsi de voir sa fille, et son patron lui propose un boulot un peu ingrat, chauffeur pour une prostituée de luxe. Ce démarrage va permettre au réalisateur de présenter avec précision son personnage principal. Un homme colérique, qui n’a jamais fait les bons choix, et qui se retrouve coincé dans une vie qui ne lui convient pas. Les seuls moments où il est posé, c’est avec son ami, amateur de polars, où les discussions tournent autour des romans policiers et de la revente d’œuvres d’art particulières. Bref, une entrée en matière qui pose un personnage intéressant qui ne demande qu’à évoluer.

« Le film dévie vers le drame pur, tout en gardant en tête de livrer des moments assez touchants. »

Par la suite, Neil Jordan va transformer son film. En effet, la rencontre avec l’escort-girl va bouleverser le quotidien de ce petit voyou, qui va se faire entretenir et tisser des liens affectueux avec cette femme. Petit à petit, cette amitié, on le sent, se transforme en amour pour notre « héros », qui va comprendre que finalement, sa vie n’est pas si morose que cela. On retrouve des phases assez dures, notamment lorsque Cathy Tyson demande de passer par King’s Cross, quartier connu pour ses prostituées, et où l’homme va découvrir qu’il y a des filles qui ont l’âge de sa propre fille en train de faire le tapin. Un choc, qui permet de relativiser sur sa propre vie et ses choix. Là, le film dévie vers le drame pur, tout en gardant en tête de livrer des moments assez touchants, assez sensuels, renforçant un lien ambigu entre les deux personnages.

Encore une fois, le film va muter par la suite, lorsque la prostituée lui demande alors un service, celui de retrouver une amie, droguée, qui vivote aussi dans la prostitution. Bob Hoskins ne peut alors refuser, répondant à un appel de détresse, mais aussi à des sentiments de plus en plus amoureux. Cela se voit lorsque les deux personnages se dévoilent, à travers des discussions tantôt intimes, tantôt rugueuses, où l’on décèle les blessures d’une vie antérieure. En trustant les peep show, le « héros » de l’histoire va découvrir un monde atroce, ignoble, où de jeunes filles sont obligées de se prostituer pour gagner leur vie, ou se faire tabasser par des patrons véreux. Mona Lisa devient alors un thriller lugubre, qui ne va faire que s’enfoncer dans des méandres douteux, où l’humanité n’a finalement pas sa place. Et cela de renforcer la force du personnage principal.

« Cette montée progressive dans la violence reste mesurée, le réalisateur ne sombrant pas non plus dans le crado ou le voyeurisme. »

Montée progressive vers un final inéluctable, où la violence ne demande qu’à éclater, on va alors ressentir toute la détresse de Bob Hoskins qui va exploser en plein envol amoureux. L’homme se fait avoir, il se sent blesser, flouer, et il décide quand même de venir en aide et de répondre à ses sentiments contradictoires. Cette montée progressive dans la violence reste mesurée, le réalisateur ne sombrant pas non plus dans le crado ou le voyeurisme. Il entretient juste une belle ambiguïté autour de son personnage principal, ne sachant vraiment si l’on suit un humain avec ses faiblesses, ou un voyou de bas étage qui laisse son code moral de côté. De ce fait, l’explosion de violence sur la fin est plus expressive, plus marquante, et on ressort du film avec une impression percutante, où nos sentiments sont mis à rude épreuve.

Au final, Mona Lisa est un film plutôt inclassable, puisqu’il aborde plein de genres en son sein, et réussit presque dans tout ce qu’il aborde. Construit comme un polar dont le personnage central est amateur, le film de Neil Jordan est à la fois une comédie romantique autour d’un tendre voyou bougon, un drame suffocant qui dresse un portrait horrible de la prostitution en Angleterre, et un thriller qui monte crescendo pour offrir un final percutant et violent. Mona Lisa demeure alors un film trop méconnu et pourtant réussi, qui démontre aussi tout le talent de Bob Hoskins.

Note : 16/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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