avril 27, 2024

Vald – Agartha

Avis :

Qui aurait pu prédire un tel destin pour le rappeur Vald ? Ayant grandi à Aulnay-sous-Bois, bénéficiant d’un collège et d’un lycée privé catholique, le petit Valentin se dirige alors vers des études de médecin avec son Bac S. Mais il arrête pour faire ingénieur du son avant de tomber dans le rap en écoutant notamment Kery James, qu’il cite dans ses références. En très peu de temps, après quelques vidéos sur Youtube et une paire de mixtapes, Vald se lance dans l’aventure du premier album en 2017 avec Agartha. Mais comment se démarquer rapidement au milieu de ce vivier de talents que possède la France en matière de rap ? Tout simplement en jouant les trolls et en faisant le débile sur les plateaux télé. Pourtant, si l’on met de côté l’aspect « guignol » de Vald, ce premier album est bien plus profond qu’il n’y parait.

C’est un peu une mode dans le monde du rap, les albums sont bien fournis et ils durent en général une plombe. C’est le cas ici avec dix-sept pistes et plus d’une heure d’écoute, où des morceaux fantaisistes côtoieront des titres plus sérieux, parlant de la politique, de l’amour ou des théories du complot, l’un des sujets favoris du rappeur. Bien évidemment, au milieu de toutes ces pistes, il y a à boire et à manger, et autant commencer par ce qui est le moins intéressant. Que ce soit au niveau de l’instru ou des paroles, dès que ça aborde l’amour et les sentiments amoureux, on rentre dans quelque chose de sirupeux et qui manque de verve. Je t’Aime en est un exemple flagrant, avec un morceau mou et fainéant, blindé d’autotune dans le refrain. Le seul intérêt réside dans la dualité des couplets masculin, puis féminin.

Mais le titre le moins percutant et intéressant reste encore Ma Meilleure Amie. Ici, Vald aborde le fait de tomber amoureux de sa meilleure amie, et que cette dernière met des barrières. Le problème est que c’est inoffensif, et l’instru au piano, avec un petit air pop dansant, ne marche pas. De plus, on assiste à un seul couplet avec un refrain qui revient sans cesse, posant des rimes pauvres qui ne sont pas dans les habitudes de l’artiste. Parmi les morceaux moins plaisants, on peut aussi citer Petite Chatte, qui se veut sulfureux mais peine à convaincre à cause de sa mollesse et ses paroles sans intérêt. Et globalement, toute la fin de l’album reste en deçà de l’album, avec notamment Libellule et son autotune insupportable, ou encore Vitrine et Strip qui sont deux titres avec une thématique maline, mais qui manquent de finesse.

Pour le reste, c’est plutôt du bon rap, avec des textes malins, de bons jeux de mots et surtout des thèmes intelligents. Si on retrouve quelques traces d’egotrip comme sur Eurotrap, Neo ou L.D.S., il y a toujours un sous-texte derrière qui apporte un vrai plus. Par exemple, outre une instru nerveuse et percutante, Eurotrap parle surtout de l’ennui et des bêtises que cela amène, comme la prise excessive de drogue pour avoir un sentiment de vivre pleinement. L.D.S. parle aussi de l’image que l’on renvoie envers les autres, mais aussi de cette envie de ne pas se voir comme l’on est vraiment, de rester aveugle à certains sentiments. Alors, bien évidemment, il faut faire le tri dans les paroles, qui sont parfois cryptiques, et il faut être concentré tant le flow de Vald est particulier.

Parfois, on tombe aussi sur des morceaux qui sont complètement à la masse, mais qui ont du sens. Par exemple, Lezarman est un gros délire qui pourrait ne pas avoir de sens, mais il s’agit de se moquer des théories du complot autour des reptiliens, et le texte prend alors une autre dimension. Mais Vald n’est jamais aussi bon que quand il se politise un peu et dévoile des textes âpres sur notre quotidien. Mégadose est une véritable bombe qui critique notre société de consommation, mais aussi nos politiques et les riches qui continuent de s’enrichir sur notre dos. Le texte est ciselé et précis, envoyant du lourd avec en prime une instru qui frappe fort. Avec Blanc, Vald crée aussi la polémique, pointant du doigt la couleur de peau des tueurs en série et des pédophiles, mettant à mal les racistes et leurs idées de merde.

Au final, Agartha, le premier album de Vald, est plutôt une bonne réussite. Malgré une trop grande générosité et des titres dont on aurait pu facilement se passer, il réside dans cet album assez d’autodérision et de sérieux pour satisfaire tout le monde. Avec des instrus très électro et des rythmiques dynamiques, l’artiste peaufine ses textes et délivre, quand il s’engage, des moments de vraie bravoure et une envie de secouer un peu notre société. Un album imparfait donc, mais qui reste dans le haut du panier du rap récent français.

  • Acacia
  • Mégadose
  • Si j’Arrêtais
  • Je t’Aime
  • Totem
  • L.D.S.
  • Ma Meilleure Amie
  • Neo
  • Lezarman
  • Blanc
  • Eurotrap
  • Petite Chatte
  • Vitrine
  • Strip
  • Kid Cudi
  • Libellule
  • Dernier Verre

Note : 14/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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