avril 26, 2024

La Fleur de Dieu – Jean-Michel Ré

Auteur : Jean-Michel Ré

Editeur : Albin Michel

Genre : Science-Fiction

Résumé :

An 10996. Dans les déserts suspendus de la planète sacrée Sor’Ivanyia, un des dix-huit mille mondes de l’Empire, pousse la Fleur de Dieu. Ce remède à de nombreux maux est aussi un vecteur privilégié pour accéder au divin. Grâce à la Fleur de Dieu, l’Homme sait désormais ce qui advient de la mémoire après la mort. Alors qu’un impitoyable seigneur de la guerre fomente un coup d’état, la formule chimique de la Fleur de Dieu est dérobée par une organisation anarchiste paradoxalement très organisée. Au même moment, l’apparition sur Sor’Ivanyia d’un enfant aux pouvoirs extraordinaires bouleverse toutes les certitudes scientifiques et religieuses de l’Empire. Qui est cet enfant ? Est-il seulement humain ? Est-il ce Messie que certaines religions ont cessé d’attendre ?

Avis :

À l’image de la fantasy, la science-fiction regorge de sagas et d’histoires s’étendant sur plusieurs tomes. Comme si le fait de créer un monde ou de partir à la découverte de l’univers offrait un potentiel inexploitable sur un simple ouvrage. Des œuvres-fleuves, comme la saga Vorkosigan de Lois McMaster Bujold ou l’Odyssée de l’espace d’Arthur C. Clarke, sont représentatives de cet exercice dans le domaine du space opera. Genre dans lequel s’immisce Jean-Michel Ré pour son premier roman. Avancée comme une trilogie, La Fleur de Dieu prend place à l’aube du 111e siècle de notre ère. Un bon temporel qui nous projette également aux confins de l’univers…

Face à la démesure d’un tel projet littéraire, il est toujours difficile de trouver un angle d’approche pour présenter son histoire. De même, l’auteur doit concilier une exposition des faits et de l’époque avec une mise en contexte dynamique pour happer son lectorat. Comme d’autres œuvres qui le précèdent, le présent ouvrage opte non pour l’essor d’une civilisation, mais pour les prémices de son déclin. Celles-ci se traduisent par une multitude de dissensions politiques, sociales et religieuses. On peut alors considérer que ces valeurs constituent la Sainte Trinité censée régir le fonctionnement de l’Empire et de ses 18 000 mondes, soit une estimation équivalente à 800 milliards d’humains déambulant aux quatre coins de l’univers.

Il est vrai que l’histoire nécessite une bonne préparation pour apprécier ces subtilités, ainsi que l’ensemble de ces mécanismes. En fin d’ouvrage, le glossaire de plusieurs dizaines de pages sert à bien appréhender les néologismes et les termes que l’on retrouve çà et là au fil de l’intrigue. Il est donc recommandé de s’y pencher avant d’entreprendre ce voyage intergalactique. Par la suite, la familiarisation avec les tenants et les différents intervenants ne s’en retrouve que plus aisé. De même, ce choix permet de conserver une certaine dynamique et évite d’enliser la progression dans un enchaînement de descriptions, toutes légitimes sont-elles.

Car La Fleur de Dieu développe un monde complexe aux multiples ramifications, à l’image de l’espèce d’arbre Ha’lya koldisia, qui abrite le végétal (également assimilable au minéral) tant convoité. Dans la quête d’une appropriation des ressources naturelles, la fleur de Dieu n’est pas sans rappeler l’épice de Dune. À cet égard, on distingue plusieurs allusions et références à l’œuvre de Frank Herbert. Cela tient autant à la connotation écologique qu’à l’avancement de conflits politiques, préliminaires à des affrontements autrement plus brutaux. Cela sans compter le choix d’une période temporelle similaire que l’on peut qualifier de « proche », même si 800 ans les séparent.

La progression de ce premier volet se fait donc sur fond de convoitises, mais aussi d’un climat social particulièrement houleux. Cela ne se résume pas uniquement aux contrôles des ressources et des masses, mais également à une profonde crise existentielle. En considérant la portée spirituelle de la fleur de Dieu (censée faire la lumière sur ce qu’il advient de l’âme après la mort), l’histoire se penche sur les religions et les croyances de tous horizons. On ne parlera pas de syncrétisme, mais d’une projection pertinente de leur évolution à travers les siècles. Il est intéressant de constater cette dichotomie qui les sépare, et ce, malgré l’avidité commune qui gravite autour de leur objet de convoitise.

Au final, La Fleur de Dieu s’avance comme une œuvre de science-fiction prometteuse qui, malgré la lointaine période évoquée, résonne en écho aux enjeux et problématiques du XXIe siècle. Certes, un premier tome implique une présentation méticuleuse et une entame assez généraliste. Il n’en demeure pas moins que Jean-Michel Ré parvient à conjuguer le plaisir de la découverte à des questionnements et des préoccupations propres à l’homme, son devenir. On songe aux mécanismes qui font et défont les civilisations, mais surtout à la portée existentielle de l’individu. La fleur de Dieu se révèle alors le catalyseur des espoirs, des peurs et de la convoitise qu’elle provoque. Sur fond d’écologie et de spiritualité, un roman dense et ambitieux, dont le potentiel ne demande qu’à éclore vers de nouvelles perspectives pour la suite…

Note : 15/20

Par Dante

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