De : Robert Eggers
Avec Alexander Skarsgard, Nicole Kidman, Anya Taylor-Joy, Claes Bang
Année : 2022
Pays : Etats-Unis
Genre : Action
Résumé :
Le jeune prince Amleth vient tout juste de devenir un homme quand son père est brutalement assassiné par son oncle qui s’empare alors de la mère du garçon. Amleth fuit son royaume insulaire en barque, en jurant de se venger. Deux décennies plus tard, Amleth est devenu un berserkr, un guerrier viking capable d’entrer dans une fureur bestiale, qui pille et met à feu, avec ses frères berserkir, des villages slaves jusqu’à ce qu’une devineresse lui rappelle son vœu de venger son père, de secourir sa mère et de tuer son oncle. Il embarque alors sur un bateau pour l’Islande et entre, avec l’aide d’Olga, une jeune Slave prise comme esclave, dans la ferme de son oncle, en se faisant lui aussi passer pour un esclave, avec l’intention d’y perpétrer sa vengeance.
Avis :
Il y a sept ans de cela débarquait dans nos salles de cinéma un petit film d’horreur bien sombre, qui n’avait pas fait grand bruit, mais qui avait révélé un cinéaste. Ce film, c’est « The Witch« , et ce cinéaste, c’est Robert Eggers. Depuis ce premier film, le metteur en scène américain a démontré qu’il avait l’envie de faire du cinéma autrement, et surtout de faire un cinéma qui laisse une empreinte, bousculant le spectateur. Ainsi, parmi tous les réalisateurs et les réalisatrices qui débutent leur carrière, Robert Eggers se fait une très belle place, notamment avec son deuxième film, le déroutant, dérangeant et incroyablement hypnotisant « The Lighthouse« . Vous savez, ce film avec Willem Dafoe et Robert Pattinson coincés sur une île en gardiens de phare. Le film fut un choc et le curseur au niveau des attentes venant de la part de Robert Eggers est monté d’un cran.
On dit souvent que dans une carrière, le cap du troisième film est un cap décisif, car c’est celui où les cinéastes confirment ou non les espoirs placés en eux, et en ce qui concerne Robert Eggers nous y voilà. Après deux incursions dans le cinéma d’horreur, le réalisateur nous revient cette année là où on ne l’attendait pas, avec un film sur des vikings. Conte vengeur incroyable où se mélange drame familial et mysticisme, film sombre comme la cendre, simple dans son intrigue et en même temps bien plus complexe qu’il n’en a l’air, avec « The Northman » Robert Eggers nous offre un film d’une grande violence, passionnant de bout en bout. Un film qui se déguste, qui se vit, et qui se pose d’ores et déjà comme l’un des meilleurs films qu’on n’aura vu en salle de cinéma.
En Islande, un jeune prince vient de passer avec honneur une cérémonie dans laquelle il est devenu un homme. Mais voilà que le jeune prince va être obligé de quitter le royaume, lorsque son père est assassiné par son oncle. En partant, Amleth se fait alors trois promesses.
« – Père, je te vengerais. Mère, je te sauverais. Fjölnir, je te tuerais ».
Il va mettre une vingtaine d’années à revenir sur ses terres, et accomplir son noir désir de vengeance.
De retour là où on ne l’attendait pas, Robert Eggers nous livre un film de vikings terrible, et derrière ça, un film autour d’une vengeance, celle d’un fils, absolument parfaite. Dès son ouverture, « The Northman » indique qu’il va être une sacrée expérience. Dès son ouverture, images, musique, cachet, caractère, acteurs, et envie de cinéma, ou plutôt vision de cinéma, sont réunis pour nous offrir un immense spectacle, et ce spectacle va tenir sans jamais faiblir, pendant les deux heures et presque vingt minutes que va durer ce drame Shakespearien au pays des vikings.
Ce qui est assez fou avec « The Northman« , c’est que dans sa trame, son fil rouge, Robert Eggers livre un film très simple. « The Northman« , c’est l’histoire d’une trahison, celle d’un oncle, et la vengeance d’un petit garçon, qui une fois adulte, bercé, nourri et rongé par ce désir de vengeance, mais aussi par l’amour paternel, va revenir sur ses terres et accomplir (ou pas) sa vendetta. Franchement, quoi de plus simple comme histoire. On peut même dire qu’on la connaît par cœur. Et pourtant, Robert Eggers nous la raconte d’une telle façon qu’on se laisse directement attraper, et jamais on ne sort du film.
Alors bien sûr, il n’y a pas que cette histoire de vengeance qui nous tient, Eggers nous offrant un film bien plus riche et surprenant que cela. « The Northman« , au travers de son intrigue, ce sont des trahisons, ce sont des révélations, des rencontres, et mieux encore, c’est un film qui entre conte, légendes et magie noire, va avoir un penchant dans le fantastique, voir le mysticisme, ce qui lui amènera encore un peu plus de saveur et de surprise. De plus, à travers cette histoire et toutes les révélations qu’elle peut offrir, Robert Eggers « s’amuse » à prendre nos émotions en otage, changeant le curseur de place et transformant son intrigue en quelques minutes, ce qui va encore un peu plus nous attraper.
Pour accompagner, et surtout élever, cette histoire de vengeance, et par la même nous marquer, « The Northman » est un film qui jouit d’une mise en scène folle, de paysages somptueux et d’un univers tenu d’une main de maître par son metteur en scène, qui sait parfaitement ce dont il a envie.
Comme je le disais, dès les premières minutes, « The Northman » nous entraîne dans un film à l’univers marqué. La photographie est froide comme la glace, Robert Eggers nous emporte dans un déchaînement de violence, de rage, d’émotions, et même de gore, car oui, « The Northman » est assez gore dans son genre, Robert Eggers n’hésitant jamais à aller dans le crade, le poisseux, mais jamais de manière gratuite. Ici, la violence est toujours justifiée par l’histoire, et surtout, par le désir de vengeance qui a rongé le personnage principal.
On notera aussi la virtuosité de plus d’une séquence, où la maestria de Robert Eggers explose, le film ayant vraiment des plans, des cadres, des séquences grandioses, qui n’ont pas fini de s’imprégner dans nos esprits, et je ne parle pas seulement des scènes de combats ou de batailles. Non, ici, les scènes de rituels, les scènes de danses et les scènes de « légendes nordiques » sont très importantes et définissent parfaitement l’univers, les rites, et plus largement la vie de ces personnages.
À noter aussi que le film est accompagné par une BO affolante et jouissive à la fois. Une BO imaginée et composée par Robin Carolan et Sebastian Gainsborough qui réinventent des sons « vikings » à merveille, pour une BO qu’on pourrait écouter seule.
Enfin, Robert Eggers nous offre un casting percutant avec un Alexander Skarsgård presque terrifiant en jeune prince déchu avide de vengeance. L’acteur se donne totalement et il en est bouleversant, d’autant plus que cette histoire, comme je le disais plus haut, va lui réserver deux ou trois surprises et rencontres. Par la suite, « The Northman« , c’est aussi Ethan Hawke peu présent, mais diablement marquant, une Nicole Kidman encore une fois grandiose, un Claes Bang étrangement touchant, un Willem Dafoe marquant, une Anya Taylor-Joy, elle aussi touchante, étant même la touche sensible de ce film et au-delà de ça, et plus vulgairement parlant, « – Putain, mais qu’est-ce qu’elle est douée cette actrice ! ». Puis enfin, il y a l’espace d’une scène, une Björk qui fait son retour sur le grand écran, dans la peau d’une sorcière.
Pour son troisième film, Robert Eggers voit plus grand, plus gros, plus dur, plus brutal et « The Northman » se pose comme un film incroyable. Derrière son histoire extrêmement simple, le réalisateur nous livre un drame passionnant, au visuel bluffant et à l’univers tenu. D’ailleurs, plus qu’un film, entre les émotions, les grandioses de son visuel et l’immersion grâce au son et la BO, « The Northman » est une expérience de cinéma démentielle, ce qui certifie bien tout le talent de son réalisateur, dont on attend désormais son remake de « Nosferatu » avec encore plus d’impatience.
Note : 20/20
Par Cinéted
Une réflexion sur « The Northman – Eggers est-il un Futur Grand? »