Mektoub my Love – Canto Due – L’Ennui au Soleil

De : Abdellatif Kechiche

Avec Shaïn Boumedine, Ophélie Bau, Jessica Pennington, Salim Kechiouche

Année : 2025

Pays : France

Genre : Drame, Romance

Résumé :

Amin revient à Sète après ses études à Paris, rêvant toujours de cinéma. Un producteur américain en vacances s’intéresse par hasard à son projet, Les Principes essentiels de l’existence universelle, et veut que sa femme, Jess, en soit l’héroïne. Mais le destin, capricieux, impose ses propres règles.

Avis :

La saga commence avec « Mektoub, My Love : Canto Uno« , présenté à Venise en 2017 et sorti en salles en 2018, qui pose les bases d’un projet fleuve marqué par un tournage long, coûteux et une ambition qui dépasse les moyens de production. En 2019, Abdellatif Kechiche présente « Mektoub, My Love : Intermezzo » en compétition à Cannes : le film déclenche immédiatement une énorme polémique, notamment à cause d’une scène sexuelle non simulée, ainsi que par la durée du film qui frôle les quatre heures. Le scandale est tel que le film ne sortira jamais réellement en salle.

À partir de là, tout se bloque : la société de production fait faillite, les droits sont gelés et Abdellatif Kechiche perd l’accès à son propre film, ainsi qu’à son troisième volet, « … Canto Due« . Tourné depuis 2019, il reste enfermé pendant des années en post-production. Après un long silence, le film réapparaît finalement en 2025, rouvert, terminé et présenté à Locarno, marquant la fin improbable d’un projet qui aura été successivement lancé, freiné, attaqué, abandonné, puis miraculeusement exhumé plus de six ans après.

« Quelle déception que ce film »

On ne verra donc pas « Mektoub, My Love : Intermezzo« , on passera directement à sa suite, « … Canto Due« . On ne croyait tellement plus avoir un film de cette « saga » que le fait de le voir arriver en salle comme ça, presque en catimini, pique forcément la curiosité. Pour ma part, j’avais plutôt apprécié « … Canto Uno« , et l’idée de voir une suite avec ces personnages était loin d’être déplaisante. Loin des trois heures du premier, cette suite ne fait que deux heures et quart et malheureusement, qu’est-ce que c’est long !

Quelle déception que ce film. Abdellatif Kechiche est un réalisateur qui aime filmer l’unique. Ici, on retrouve cette lumière magnifique et chaleureuse qui avait envoûté avec « … Canto Uno« , mais malheureusement ce sera tout. Le reste est un film bavard pour rien, cliché au possible et, au-delà de ça, « Mektoub my Love : Canto Due » ne raconte absolument rien. Visuellement, c’est beau, mais scénaristiquement, c’est vide et surtout d’un ennui total et unique, dont seul l’agacement ressenti nous tire un peu de cet ennui.

Amin est de retour à Sète le temps d’un été. Un été chargé entre le mariage d’Ophélie qui arrive et cette rencontre avec Jessica Patersson et son mari, qui sont dans le cinéma américain et qui sont bien intéressés par un scénario qu’écrit Amin.

« Cliché au possible avec son intrigue »

J’avais envie d’y croire. La polémique de Cannes étant très loin maintenant, et avec les souvenirs tendres du premier « Mektoub my Love… », j’avais vraiment envie d’y croire. D’ailleurs, le film commence bien. Comme je le disais, on retrouve cette lumière forte du cinéma d’Abdellatif Kechiche. Puis derrière ça, on retrouve ces personnages qu’on avait découverts et appréciés. Avec ça, le film, sur certains points et certains instants, nous offre ce que l’on aime du cinéma d’Abdellatif Kechiche, c’est-à-dire un cinéma vérité, au plus proche de ses acteurs et de ses ambiances.

Difficile de résister à son introduction qui tient un charme des plus justes. Puis d’autres fois, ici et là, on pense à des scènes avec que des femmes, comme celles avec Ophélie Bau, quelle magnifique et talentueuse actrice. Ou encore, même si ça fait très cliché de son cinéma, cette fête à la maison où, d’un coup, la musique orientale jaillit et toutes se mettent à danser. Bref, le film a ses points forts et mieux : il a des envolées.

Mais voilà, tout ça, c’est bien peu face à un film qui se prend les pieds dans sa trame. « Mektoub my Love : Canto Due« , c’est plus de deux heures de film qui ne racontent finalement pas grand-chose, voire absolument rien. Cliché au possible avec son intrigue autour d’un jeune homme qui écrit un scénario qui pourrait être acheté par un producteur américain en vacances dans le coin, le film d’Abdellatif Kechiche va de moments lourds à des scènes dont on finit par se ficher royalement. Et pourquoi cela ? Parce qu’on n’y comprend pas grand-chose. Le film est bourré de trous. Alors oui, dans les grandes lignes, c’est compréhensible, mais il demande de faire des liens avec un film qu’on ne verra jamais.

« c’est plus que décevant »

Puis derrière ça, on sait bien qu’il y a un quatrième film de prévu, mais c’est tellement agaçant ce que raconte ce film que, même si certaines intrigues trouveront leur résolution dans la suite, le fait ici d’enchaîner cliché sur cliché et de tenir une intrigue qui n’a pas vraiment de matière, épuise mentalement.

Et le clou du spectacle sera la dernière partie qui, en plus d’être hystérique, s’aventure dans le cliché avec à peu près tout : encore une trahison, le coup de la panne, des flics qui en font des caisses… et surtout cette coupe de fin, qui donne l’impression d’avoir purement et simplement perdu deux heures et quart de sa vie. Oui, oui, c’est très rare, mais là, j’ai vraiment la sensation d’avoir perdu un bout de ma vie. Le temps s’est étiré. Le temps s’est fait agaçant. Et lorsque le couperet est tombé, un sourire déçu s’est posé sur mon visage. Tout ça pour ça…

Alors oui, l’ambiance est là. Oui, la lumière est magnifique. Oui, c’est vrai que dans cette image et cette façon de mener ses acteurs, le film est beau et dégage quelque chose. Mais face à une intrigue qui ne va nulle part, qui ne raconte rien et qui nous laisse là comme ça, juste pour le plaisir de rien, c’est plus que décevant. Ça peut même me faire dire que là, j’en ai fini avec le cinéma d’Abdellatif Kechiche ! C’est dire !

Note : 05/20

Par Cinéted