mars 29, 2024

Le Chien Jaune de Mongolie

Titre Original : Die Höhle des Gelben Hundes

De : Byambasuren Davaa

Avec Batchuluun Urjindorj, Buyandulam Daramdadi, Nansal Batchuluun, Nansalmaa Batchuluun

Année : 2006

Pays : Allemagne, Mongolie

Genre : Drame

Résumé :

Nansal, une gamine de six ans, est l’aînée d’une famille de nomades du Nord de la Mongolie.
Un jour, elle ramène chez elle un chien abandonné, mais son père pense qu’il va leur porter malheur et veut qu’elle s’en débarrasse.
Nansal tente de le cacher, mais le jour où la famille déménage, elle doit abandonner le chien…

Avis :

Alors qu’elle commence ses études pour le cinéma en Mongolie, c’est en Allemagne que Byambasuren Davaa va poursuivre son cursus et s’amuser avec les caméras. Se rapprochant volontairement d’un cinéma naturaliste tout en lorgnant du côté du documentaire, son cinéma est très particulier et laisse souvent sur le carreau ceux qui veulent de la fiction à proprement parler. D’ailleurs, c’est avec L’Histoire du Chameau qui Pleure qu’elle va se faire un nom, jetant un regard singulier sur le peuple mongol et sa façon de vivre. En 2004, elle commence les repérages pour son nouveau film, Le Chien Jaune de Mongolie. Voulant filmer une vraie famille de nomades, elle va mettre du temps à trouver son casting idéal, et surtout, elle va avoir du mal à « apprivoiser » sa jeune actrice en devenir. Pour autant, cela ne se voit pas à l’écran et ce film possède une aura particulière.

D’un point de vue scénaristique, le film ne semble pas raconter grand-chose, si ce n’est le quotidien d’une famille mongole nomade. On va suivre les journées répétitives d’une mère de famille qui élève ses trois enfants du mieux qu’elle peut, avec son mari qui doit partir vendre des peaux de bêtes en ville. Nansal, la plus grande des enfants, doit prendre ses responsabilités et aider aux tâches quotidiennes. Alors qu’elle se balade, elle trouve un chien dans une grotte et le ramène chez elle. Mais son père, avant de partir, lui demande de se débarrasser du chien, qui pourrait attirer les loups et mettre en danger le troupeau. Mais Nansal ne l’entend pas de cette oreille et crée un fort lien avec l’animal. C’est à partir de ce pitch que la réalisatrice va tenter de tisser une toile de fond, servant surtout à raconter le peuple de Mongolie.

Car malgré son aspect un peu mou du genou et très proche du documentaire, Le Chien Jaune de Mongolie essaye avant tout de montrer la dure vie des nomades, qui dépendent essentiellement du troupeau et de sa survie. Là-bas, les bouses servent de combustible, le lait est le premier aliment, servant aussi bien à faire du beurre que du fromage, et si les bêtes meurent, la viande sera mangée et les peaux vendues en ville. La cinéaste explore bien ce quotidien fait de petits riens, mais qui nous ramènent à l’essentiel. Avons-nous vraiment besoin de tous ces artifices dans nos vies ? Nansal et sa famille ne sont-ils pas plus heureux que nous en vivant avec mille fois moins ? Le film pose ces questions avec une justesse indécente, pointant du doigt un mode de vie peut-être plus sain que le nôtre.

D’ailleurs, durant tout le film, on ne voit pas les personnages se plaindre ou râler. Bien au contraire, ils sont heureux et vivent chichement, mais ils ne sont pas pervertis par la société moderne. On voit cela lorsque le père revient de la ville avec des cadeaux pour tout le monde, dont un récipient en plastique qui ne va pas durer bien longtemps. On voit que tout le monde est heureux de ces cadeaux alors que ce ne sont que des bonbons, une casserole en plastoc et un chien à piles. La réalisatrice capture tous ces moments avec délicatesse et ne pose aucun jugement sur les découvertes de ces gens, qui se font plaisir avec trois fois rien. Le scénario en profite aussi pour raconter la distance qu’il y a entre la vie en ville et celle dans les plaines.

Au détour de deux/trois conversations, on voit que le couple se tâte à vivre en ville pour les études de la petite. Se pose alors la question du travail et de l’argent, ainsi que du niveau de vie. Il y a aussi le respect des traditions qui pose problème, tout comme l’entraide. Lorsque Nansal se perd en cherchant son chien, elle rencontre une vieille dame, qui lui raconte la légende du chien jaune, et qui va lui venir en aide de façon désintéressée. Le film nous ramène sans cesse à cette humanité qui semble foutre le camp des villes. Cela est bien entendu appuyé par le jeu incroyable de la petite Nansal, qui oublie les caméras et fait preuve d’une sincérité sublime. Mais tout le casting est d’ailleurs dingue, faisant fi des objectifs et restant d’un naturel superbe. Il y a une vraie alchimie qui s’opère entre la réalisatrice et la famille.

Le seul gros point négatif du film provient de sa réalisation en elle-même, ou plutôt de son rythme. Le scénario n’est pas forcément surprenant dans sa ligne directrice, et on se doute bien de la finalité avec le chien. De ce fait, la cinéaste va avoir du mal à maintenir un certain suspens et ses nombreux plans larges assez longs vont donner au film un aspect contemplatif qui peu dérouter, voire ennuyer par moment. C’est clairement un film qui demande à ce que l’on rentre dedans très vite pour ne pas sombrer dans l’ennui, ou avoir l’impression d’être devant un documentaire sur une famille de nomades en pleine Mongolie.

chien jaune de mongolie real : Byambasuren Davaa COLLECTION CHRISTOPHEL

Au final, Le Chien Jaune de Mongolie est un très beau film, mais qui peut laisser des personnes sur le carreau. Très naturaliste dans son grain, proche du documentaire quand il faut aborder les tâches quotidiennes de cette famille, contemplatif dans son rythme, ce film n’est pas forcément facile d’accès, et pourtant, pour peu qu’on y rentre rapidement dedans, on est très touché et ému par le parcours de Nansal qui doit vite devenir adulte, et par ses parents qui font tout pour que tout se passe pour le mieux. Bref, il s’agit-là d’un très beau film, pour peu qu’on prenne le temps de se perdre dans les steppes sublimes de la Mongolie.

Note : 16/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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