avril 18, 2024

Bel Canto

De : Paul Weitz

Avec Julianne Moore, Ken Watanabe, Sebastian Koch, Christophe Lambert

Année : 2018

Pays : Etats-Unis

Genre : Drame

Résumé :

Une célèbre soprano américaine est invitée dans une dictature militaire en Amérique du Sud pour donner un concert privé pour l’anniversaire d’un riche industriel japonais. L’assistance est prise en otage…

Avis :

Drôle de filmographie que celle de Paul Weitz. Commençant tout d’abord dans l’écriture de scénario (c’est à lui que l’on doit Fourmiz, Shanghaï Kid et La Famille Foldingue), il tombe dans la réalisation en 1999 pour faire une comédie culte pour de nombreux trentenaires aujourd’hui, American Pie. Il réalise ce film avec son frère, Chris Weitz, et cette collaboration va durer jusqu’en 2005, toujours dans le registre de la comédie, avec une pointe drame et de romance. Sa carrière solo démarre alors avec En Bonne Compagnie, et là encore, il reste dans la comédie gentillette. Il s’essaye un temps au fantastique avec L’Assistant du Vampire en 2009, puis retourne très vite à la comédie, dans ses pantoufles. C’est avec Bel Canto qu’il va partir vers un autre registre, celui du drame. S’appuyant sur un best-seller, le réalisateur va tenter de parler d’une prise d’otages au Pérou.

La Castafiore à l’oreille cassée

Le film débute au Japon, chez un homme d’affaires fan d’opéra, et d’une chanteuse lyrique en particulier, Roxanne Coss. Il se rend avec son interprète au Pérou pour assister à un concert privé de cette chanteuse, donné à l’occasion d’un achat d’usine qu’il doit faire. Manque de bol, des dissidents décident de prendre le lieu en otage afin de réclamer la libération de prisonniers. Si l’attaque ne fait qu’un seul mort, elle ne fait pas forcément grand bruit, et les preneurs d’otages, bien décidés, établissent des règles de vie au sein de l’établissement. C’est ainsi que le film nous plonge au plus près de ces gens durant le mois de captivité. Paul Weitz ne s’intéresse ici pas tant aux demandes des attaquants qu’à la vie qui va s’établir au sein du lieu. On aura droit alors à des amourettes, des conflits et des liens qui vont se faire.

Et c’est bien là tout le problème du scénario. Le démarrage du film est très lent et tente de présenter un peu tous les personnages qui vont vivre une expérience étrange. Les discussions sont vaines et il n’y a pas vraiment de tension. Même lors de l’attaque, qui arrive comme un cheveu sur la soupe, il n’y a pas de dynamique. Le réalisateur ne veut pas faire dans le sensationnel, et pour cela, il ralentit au maximum sa mise en scène et étire des scènes qui n’en ont pas besoin. Ainsi donc, il va être difficile d’avoir peur pour tous les otages et donc de créer un suspens chez le spectateur. De plus, si le film se fixe sur le personnage tenu par Julianne Moore, les autres protagonistes seront à peine esquissés et sans la moindre épaisseur. Aussi bien chez les otages que chez les ravisseurs.

Amour, amitié et pas de rock’n’roll

En visant un film anti-spectaculaire, Paul Weitz ne va avoir d’autres choix que d’injecter du fond en créant des relations ambigües entre les personnages. La cantatrice va donc se montrer courageuse, et elle va se plier à quelques exigences pour avoir les faveurs des « méchants ». Son chant va, en quelque sorte, libérer des tensions, et tout ce petit monde va végéter dans une grande bâtisse, y trouvant finalement son compte. Cette chanteuse lyrique va même y trouver l’amour auprès d’un fan japonais (Ken Watanabe), pourtant marié. A côté de ça, on aura droit à un traducteur qui va tomber amoureux d’une des preneuses d’otages, et à force de vivre ensemble, on va voir que la limite entre ravisseurs et otages s’amenuise, amenant tout un chacun à cohabiter. Cela se traduit alors par des scènes joyeuses, comme une partie de foot ou du chant autour d’un piano.

Le message de fond du film est intéressant. Le but ici est de nous faire prendre conscience que les « méchants » ne le sont pas vraiment et ils se battent pour plus d’équité et de justice dans un pays en proie à la corruption. Si la violence est de mise au départ, on se rend vite compte que même eux ne croit pas vraiment en leur chance et ils savent pertinemment que leurs revendications ne seront pas entendues. Dès lors, malgré quelques tensions, le film va montrer comment l’enfermement va tisser des liens entre les personnages, et peu importe leurs idéaux. Cela se traduit en romance à l’eau de rose, en véritable coup de foudre ou encore en amitié profonde entre un homme d’âge mûr et un preneur d’otage qui a l’âge de son fils. En créant toutes ces relations, Paul Weitz espère une chose, choquer sur son final.

Confondre vitesse et précipitation

Le problème, c’est qu’il a beau inverser les rôles (les méchants deviennent les victimes), on ne croit tellement pas à toutes les relations que le film évoque, que cela ne nous fait absolument rien. Il faut dire aussi que les relations ne touchent que quelques personnes sur tous les otages, et forcément, on s’en bat un peu les noix de tout le monde. Et il ne suffit pas d’aligner deux lignes de dialogues entre Christophe Lambert et un jeune rebelle, pour nous faire pleurer sur la fin. Le réalisateur confond vitesse et précipitation, et il veut tellement en mettre, qu’au final, il ne raconte rien. Même sur le contexte politique du Pérou, où l’on n’apprend strictement rien, si ce n’est que le président semble asiatique, ce qui est très bizarre. En fait, à la fin, on se rend compte que le film n’a rien raconté d’intéressant ou d’important.

Au final, Bel Canto est un film qui brasse beaucoup de vent. Drame qui se veut à la fois touchant et percutant sur sa fin, le réalisateur ne parvient jamais à créer des tensions ou des relations crédibles pour mieux nous toucher. Pire, il arrive à faire mal jouer Julianne Moore et à ne rien raconter de probant sur les agresseurs et sur le contexte politique du Pérou. On se retrouve donc face à un film fade, triste, sans rythme et qui n’est animé par aucune passion. Sans être un très mauvais film, Bel Canto reste un long-métrage anodin, vide de substance et donc sans grand intérêt.

Note : 06/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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