De : Jacques Audiard
Avec Lucie Zhang, Makita Samba, Noémie Merlant, Jehnny Beth
Année : 2021
Pays : France
Genre : Comédie, Romance
Résumé :
Paris 13e, quartier des Olympiades. Emilie rencontre Camille qui est attiré par Nora qui elle-même croise le chemin de Amber. Trois filles et un garçon. Ils sont amis, parfois amants, souvent les deux.
Avis :
Jacques Audiard est un grand cinéaste français à qui l’on doit d’excellents, et même de grands, films : « Sur mes lèvres« , « Un prophète« , « De rouille et d’os« , « De battre mon cœur s’est arrêté« . À force de rigueur, cela fait des années que chaque nouveau film du metteur en scène est un petit ou grand évènement, ce qui fait que l’on attend toujours avec impatience et curiosité un nouveau film d’Audiard.
Après avoir fait un tour aux Etats-Unis pour un western, l’excellent « Les frères Sisters« , Jacques Audiard est de retour dans les salles, et cette fois, il quitte le far West pour poser sa caméra dans le treizième arrondissement pour y filmer les amours et les maux de plusieurs personnages. Très différent de ce que Jacques Audiard a proposé jusqu’à maintenant, esthétiquement sublime, intéressant dans son kaléidoscope qui propose plusieurs personnages qui s’entrecroisent, qui se découvrent, s’aiment ou se détestent. Plein de vie, d’une étonnante fraîcheur, Jacques Audiard, malgré des défauts et peut-être un manque d’enjeux, nous envoûte et l’on prend un joli plaisir à suivre ces « … Olympiades« .
Paris, treizième arrondissement, Emilie, une jeune femme d’origine asiatique, cherche un colocataire. Elle rencontre Camille, un jeune homme qui se présente pour ladite colocation. Si Emilie voulait absolument une femme pour habiter avec elle, elle cède au charme de Camille. Camille, lui, est attiré par Nora, une trentenaire qui vient d’arriver à Paris pour reprendre ses études. Même si Nora est attirée par Camille, elle se sent irrémédiablement attirée par Amber, une jeune femme qui gagne sa vie en faisant sur Internet des lives très chauds. Ces quatre jeunes trentenaires vont alors se découvrir, faire l’amour, et peut-être, au bout du compte, s’aimer…
Neuvième film pour Jacques Audiard, qui nous revient là où on ne l’attendait pas. Comme je le disais plus haut, après les plaines du grand ouest américain, le metteur en scène est de retour, et cette fois encore, il s’aventure dans un univers inédit pour lui.
Avec « Les Olympiades« , Jacques Audiard a décidé de filmer d’un côté la jeunesse et de l’autre le treizième arrondissement de Paris. Pour cela, il va conjuguer les deux, et ainsi nous offrir un joli (très joli même) kaléidoscope plein de spontanéité, de naturel, de fraîcheur et de culture. C’est même là-dessus que le réalisateur intéressera le plus. Peignant des personnages de tout horizon qui se rencontrent pour vivre de plus ou moins grandes histoires, Jacques Audiard, aidé de Céline Sciamma et Léa Mysius à l’écriture, présente ces jeunes qui ont tous un background intéressant derrière eux. Ainsi, même si on restera quelque peu sur notre faim dans les ressorts dramatiques que le film propose, cela ne nous empêchera pas de beaucoup apprécier cette virée dans le 13e et ces rencontres.
On apprécie suivre ces personnages qui se cherchent aussi bien du côté de leur cœur, que dans leur vie professionnelle. Jacques Audiard parle de la jeunesse qui a la trentaine, une jeunesse qui a fait des études, une jeunesse qui se sent perdue et qui aimerait autre chose, sans vraiment savoir quoi. Une jeunesse qui a peur de s’engager aussi. Il y a une très belle sensibilité, on peut même dire une étonnante sensibilité, qui se dégage des rencontres amoureuses de ces personnages. Des rencontres aussi bien sentimentales que sexuelles, que Jacques Audiard met en scène avec de très belles envolées, allant parfois même chercher dans le poétique.
Après, il est vrai que dans ce kaléidoscope, « Les Olympiades » déçoit quelque peu, car même si les personnages sont touchants et très beaux, ils leur manquent quelque chose, notamment dans leur relation avec leur famille, que tous fuient à plus ou moins grande échelle. Si « Les Olympiades » avait creusé ce côté-là, il est certain que ce nouveau Jacques Audiard aurait été plus qu’un bon film. Reste quand même ce chemin émotionnel que chacun fait pour arriver à ce très beau final. Un final peut-être attendu, mais un final qui reste très beau, ce qui fait qu’on ressort de ces « … Olympiades » le sourire aux lèvres.
Ce nouveau Jacques Audiard, comme je le disais, est un envoûtement, et ce charme fou vient de cette mise en scène qui est de toute beauté. Jacques Audiard nous enferme dans le treizième arrondissement de Paris et l’on s’y plaît énormément. Loin des appartements Haussmanniens, loin des clichés habituels de Paris, « Les Olympiades« , c’est de grandes envolées au-dessus de ce quartier avec une BO de Rone des plus somptueuses. « Les Olympiades« , c’est aussi un film qui tutoie une intimité, c’est un film qui est très près de ses personnages. Jacques Audiard s’enferme dans ces appartements, et filme très bien les maux de ses personnages. Si jamais ce « … Olympiades » est bouleversant, le film reste touchant, très touchant.
Ce Jacques Audiard, c’est un film qui est très étonnant dans son esthétisme, le réalisateur ayant choisi de raconter ses personnages et ce quartier en noir et blanc. Le choix est audacieux, et le rendu est tout bonnement magnifique. « Les Olympiades« , c’est une photographie à tomber, et au-delà de ça, c’est des plans, des cadres et des séquences parfaitement maîtrisées. Jacques Audiard touche au sublime avec ces images.
Enfin, « Les Olympiades« , c’est une mine d’or pour ses talents. Si on sait Noémie Merlant excellente actrice et ici, elle est encore une fois parfaite, « Les Olympiades » ce sont surtout les découvertes de deux jeunes acteurs magiques. Deux acteurs bourrés de charme et de talent. Ces deux acteurs sont Lucie Zhang et Makita Samba. Elle est merveilleuse dans le rôle d’une jeune femme paumée qui se sent forte, surtout en face de l’autre, car une fois face à elle-même, face à ses démons et ses émotions, elle est plus fragile qu’elle ne le croit. Lui est d’une beauté renversante et il tient un personnage solaire, d’une sensibilité incroyable. Il est même difficile de ne pas tomber en amour face à ce personnage, qui est à la fois fragile, viril, sensible, à l’écoute, et plus largement authentique. On notera que l’on se plaît à suivre aussi ce Paris 13ème, filmé comme un véritable personnage avec ses caractères, ses défauts et sa grâce.
Ce nouveau Jacques Audiard est étonnant, car il ne ressemble en rien à un film de Jacques Audiard et c’est ce qui en fait tout son charme et sa beauté. Certes, le réalisateur, au sein de son scénario, « oublie » de creuser certains sujets, et l’on tient un sentiment de déception sur certains aspects, mais face à toutes les qualités que tient ces « … Olympiades« , ce sentiment est finalement bien peu de chose. Beau, fragile, spontané, esthétique, romantique ou amical, charnel, délicat, chaleureux, sensoriel et plein de culture… Bref, ce nouveau Jacques Audiard est une très belle chronique, emporté par des acteurs magiques.
Note : 14/20
Par Cinéted