Avis :
Fondé au début des années 2000 par l’ancien batteur de Opeth, Soen va mettre du temps avant de se mettre en route. Si dès le départ, batteur et chanteur sont les membres solides de la formation, quelques changements de line-up font s’effectuer, fragilisant le groupe, avant de trouver une certaine stabilité. Ce n’est qu’en 2010 que Soen devient véritablement actif, avec notamment un premier album en 2012 avec Cognitive. Dès lors, le groupe est lancé, et tel un métronome, propose un album tous les deux ans environ. Officiant dans un Métal progressif à tendance rock, Soen a su imposer une identité propre, s’éloignant volontairement des carcans d’un Death bourrin ou d’un Prog trop complexe. En 2019, le groupe sort Lotus, son quatrième album, et il installe encore un peu plus la formation dans un genre à part, hybride, mais qui marche du feu de Dieu.
Complexe sans l’être
L’album débute avec Opponent, avec un riff qui tabasse bien et qui annonce uns emblant de tempête. Un orage qui sera maîtrisé rapidement grâce à la voix cristalline de Joel Ekelöf qui ne chante qu’en chant clair. C’est d’ailleurs l’une des particularités du groupe, de n’offrir qu’un chant, limpide, aérien et d’une réelle beauté. Sans jamais partir dans des hurlements ou des montées impressionnantes, le chanteur impressionne par son registre vocal, qui peut parfois être un peu profond, mais qui touche. Ce premier morceau n’échappe pas à la règle, notamment dans le refrain, d’une rare douceur. Une douceur que l’on retrouvera dans de nombreux morceaux, comme River, qui pourrait presque se voir comme une ballade. Une ballade mélancolique, presque triste, mais qui détient une véritable âme. C’est très rare d’avoir un groupe estampillé métal qui arrive à allier aussi bien des sentiments aussi beaux avec quelques passages plus rugueux.
On retrouve un tel sentiment de beauté avec le titre Lotus, qui est lui aussi une réussite sur tous les plans. Entre la voix du chanteur, les petits solos en arrière-plan, aérien et d’une rare douceur ou encore les quelques arrangements qui donnent au titre une épaisseur Rock insoupçonnée, on se retrouve avec l’un des meilleurs titres de l’album. Soen continue à surprendre et offre réellement ses lettres de noblesse au Métal Prog. Et en un sens, il s’éloigne des pas de Opeth, son modèle, en arpentant un chemin complexe, avec des pistes très longues (elles dépassent toutes les cinq minutes) mais qui demeurent accessibles. Il ne sera pas rare de chanter le refrain avec Joel Ekelöf, car tout est lisible. Le groupe ne part pas dans des délires psychédéliques ou des constructions arachnéennes qui pourraient perdre l’auditeur. Soen est clairement un groupe que l’on pourrait conseiller à des néophytes.
De la force brute tout de même
A travers ces lignes, on pourrait croire que cet album de Soen est un trip Rock tout calme, et ce n’est pas totalement vrai. En effet, le groupe connait son statut, sait dans quelle cour il joue, et pour cela, il arrive à présenter des passages plus nerveux, et des titres plus percutants. Si Opponent ouvre parfaitement le bal, on peut aussi compter sur Lascivious et ses élans bien bourrins. Ici, la double pédale sera de sortie, et les riffs ne laisseront pas indifférent. Les accords sont plus lourds, même au sein du refrain, pourtant porté par un chant puissant et aérien. Ici, tout le monde se plie en quatre et donne une amplitude superbe au morceau. Martyrs sera un morceau bien plus lourd, à la rythmique plus poussée, avec des variations très bien trouvées. Des variations qui permettent à tous les instruments de s’exprimer, et notamment la basse.
Là où le groupe aussi surprendre, c’est sur sa capacité à monter crescendo et partir dans des élans assez violents en fin de titre, on retrouve par exemple cela sur Penance, un titre calme et doux, mais qui possède un break dingue et très lourd. Rival ira dans le même sens, sauf qu’il trouve un équilibre juste sur toute la longueur du titre, alternant des phases nerveuses, avec des moments plus posés. Lunacy viendra conclure un album déjà bien complet, en offrant plus de champ au chanteur, qui fera éclater sa voix absolument incroyable. D’ailleurs, la conclusion du titre, uniquement a capella, est tout bonnement divine.
Au final, Lotus, le quatrième album de Soen, est une réussite sur tous les plans. C’est non seulement magistral dans la construction des morceaux, mais aussi dans les tonalités qui s’en échappent. Ce mélange de douceur, de mélancolie et de puissance force le respect, d’autant plus que l’équilibre est parfaitement trouvé, ne laissant aucune place au hasard et à l’ennui. Bref, les suédois prouvent tout leur talent, qui continuera avec Imperial, l’album suivant, qui assoit un peu plus la maestria du groupe.
- Opponent
- Lascivious
- Martyrs
- Lotus
- Covenant
- Penance
- River
- Rival
- Lunacy
Note : 18/20
Par AqME