De : Guillermo Del Toro
Avec Bradley Cooper, Cate Blanchett, Toni Collette, Willem Dafoe
Année : 2022
Pays : Etats-Unis
Genre : Thriller, Drame
Résumé :
Alors qu’il traverse une mauvaise passe, le charismatique Stanton Carlisle débarque dans une foire itinérante et parvient à s’attirer les bonnes grâces d’une voyante, Zeena et de son mari Pete, une ancienne gloire du mentalisme. S’initiant auprès d’eux, il voit là un moyen de décrocher son ticket pour le succès et décide d’utiliser ses nouveaux talents pour arnaquer l’élite de la bonne société new-yorkaise des années 40. Avec la vertueuse et fidèle Molly à ses côtés, Stanton se met à échafauder un plan pour escroquer un homme aussi puissant que dangereux. Il va recevoir l’aide d’une mystérieuse psychiatre qui pourrait bien se révéler la plus redoutable de ses adversaires…
Avis :
Guillermo Del Toro est un réalisateur mexicain qu’on ne présente plus aujourd’hui. Officiant depuis presque trente ans maintenant, Guillermo Del Toro est un cinéaste qui petit à petit s’est fait une très belle place dans le cœur des cinéphiles, et même de la profession. En 2013, il réalise « Pacific Rim« , un film qui s’inspire des films de kaijūs japonais, qui rencontre un énorme succès. Après un petit retour dans le film d’épouvante avec « Crimson Peak« , Del Toro va alors renoncer à tourner la suite de « Pacific Rim« , pour se lancer dans un film « plus petit », « La forme de l’eau« , un film fantastique avec comme toile de fond la guerre froide et là, c’est la consécration. « La forme de l’eau » sera un très beau succès en salle et en plus d’un Lion d’Or à Venise, le film décrochera les prestigieux Oscar du meilleur film et meilleur réalisateur.
Sorti en 2017, on n’avait plus vraiment de nouvelle de Guillermo Del Toro depuis sa « … forme de l’eau« . Bien sûr, on savait que le metteur en scène était sur deux projets en même temps, « Pinocchio » d’un côté et « Nightmare Alley » de l’autre, mais c’est à peu près tout. Le premier de ses deux projets qui voit le jour, c’est donc « Nightmare Alley« , que Del Toro avait commencé à tourner peu avant la pandémie qui arrêta le monde en 2020.
Après une reprise de tournage sous protection sanitaire, voici donc après quatre années d’absence en salle, le nouveau Guillermo Del Toro, et le moins que l’on puisse dire, c’est que ce « Nightmare Alley » est beau, et s’il n’entre pas dans ce que le réalisateur nous aura livré de plus beau, il demeure un bon moment de cinéma, qui s’aventure à peindre un personnage noir, cupide, et plein d’orgueil.
Etats-Unis, fin des années 30, Stanton Carlisle débarque un matin un peu par hasard dans une fête foraine. Bien bâti, on lui propose un petit job et bientôt l’univers des forains et leurs tours et autres envoûtements lui plaît, notamment celui de Pete, qui se dit télépathe. Créant des liens d’amitié, petit à petit Stanton apprend et voit en cet apprentissage la possibilité de se sortir de la misère, mais ce qu’il ne sait pas encore, c’est qu’il risque d’y avoir un prix à payer.
« Nightmare Alley« , le onzième film de Guillermo Del Toro, est un métrage duquel je ressors ravi et conquis, même s’il ne s’est pas autant imposé comme ce qu’ont pu le faire « Le Labyrinthe de Pan« , « La forme de l’eau » ou encore « Crimson Peak« .
Divisé en deux parties, le réalisateur propose une découverte du monde des forains avec son personnage, qui est absolument passionnante, et même impressionnante, que ce soit dans ce qu’il raconte ou comment Guillermo Del Toro la met en scène. D’emblée, la pâte du cinéaste est là, et l’on reconnaît tout son amour pour ces êtres mal formés, pour ces êtres à part et en dehors de la société, tout comme on reconnaît le goût du réalisateur pour proposer un film qui flirte avec le fantastique.
Toujours dans cette première partie, Guillermo Del Toro nous présente parfaitement ses personnages, et le monde dans lequel ils évoluent. La découverte de ces foires « aux monstres » et autres arnaques est terrible, et l’on se laisse très facilement entraîner. Puis il y a la peinture de ce personnage principal, Stanton Carliste, aussi intriguant qu’inquiétant, avec son envie de réussite, de s’en sortir, son assurance qui lorgne vers l’orgueil, et bien entendu vers la cupidité. D’ailleurs, « Nightmare Alley » est un film qui a bien des égards aborde la cupidité de l’être humain sous bien des angles différents.
De plus, en toile de fond, on sent les restes de la grande dépression, et il y a vraiment une distinction des classes. Une distinction que le réalisateur pousse un peu plus dans la deuxième partie de son film, transformant alors « Nightmare Alley » en un film d’arnaque et d’escroquerie. Là encore, visuellement parlant, c’est impressionnant, Guillermo Del Toro nous offrant une plongée dans l’Amérique des années 40 impressionnante.
Mais voilà, derrière tous ces bons points, c’est aussi dans cette deuxième partie que « Nightmare Alley » s’abîme, avec d’un côté une arnaque qui frôle le déjà vu, même si la mise de scène de son réalisateur assure une originalité et que ses comédiens sont excellents, et de l’autre, un rythme qui se casse et dans lequel plusieurs longueurs s’invitent dans la partie. Ainsi, « Nightmare Alley » perd en intensité, en profondeur, mais il réussit à garder notre intérêt, même si là encore, le final, si terrible et intéressant soit-il, reste assez prévisible.
« Nightmare Alley » est un film qui est tenu par un très bon Bradley Cooper qui tient là un personnage bien plus difficile et complexe qu’il n’y paraît. Sombre et charmeur à la fois, il se révèle dur, magnétique, et étrangement discret. Face à lui, on trouvera une Rooney Mara assez discrète, une Cate Blanchett magnétique, et pas mal de seconds rôles qui imprègnent, comme Richard Jenkins, Willem Dafoe ou encore le couple Toni Collette et David Strathairn.
« Nightmare Alley » est un bon cru de Guillermo Del Toro. Un cru qui a ses défauts et ses qualités et qui, sommes toutes conjuguées, se révèle moins grand et puissant que la bande-annonce nous le laissait présager, mais ce n’est pas pour cela que le moment ne sera pas intéressant, prenant et finalement beau, surtout quand on le découvre sur un grand écran, car tout dans ce film appelle le cinéma.
Note : 14/20
Par Cinéted