Un Héros – Au Cœur de l’Iran

Titre Original : Ghahreman

De : Asghar Farhadi

Avec Amir Jadidi, Mohsen Tanabandeh, Sahar Goldust, Fereshteh Sadre Orafaee

Année : 2021

Pays : Iran, France

Genre : Thriller, Drame

Résumé :

Rahim est en prison à cause d’une dette qu’il n’a pas pu rembourser. Lors d’une permission de deux jours, il tente de convaincre son créancier de retirer sa plainte contre le versement d’une partie de la somme. Mais les choses ne se passent pas comme prévu…

Avis :

Réalisateur iranien, Asghar Farhadi s’est taillé depuis une belle dizaine d’années une très belle réputation au sein du cinéma mondial. Arrivant sur la scène au début des années 2000, le réalisateur s’est imposé petit à petit jusqu’à ce qu’il présente en 2011, « Une séparation« , un drame poignant qui a marqué plus d’un spectateur. Depuis, le metteur en scène s’est diversifié, faisant un film sur deux chez lui. Ainsi, en 2013, il réalise un film en France, « Le passé« , puis en 2016, un film en Iran, « Le client« . Son avant-dernier film en date, le réalisateur l’avait tourné en Espagne avec la crème de la crème des acteurs espagnols.

Après cette escale en compagnie du couple Cruz/Bardem, Asghar Farhadi repose ses valises en Iran pour « Un héros« . Je ne sais pas pour vous, mais même si j’apprécie énormément les films d’Ashgar Farhadi, quand il tourne en demeure d’Iran, je trouve qu’il n’est jamais aussi bon que lorsqu’il regarde à la loupe son pays et ses dysfonctionnements. Après « A propos d’Elly« , « Une séparation » ou encore « Le client« , voici que le metteur en scène confirme encore une fois cette règle avec « Un héros« , un drame d’une grande injustice, porté par un acteur, Amir Jadidi, absolument incroyable !

Rahim est en prison car il n’arrive pas à payer une dette suite à la perte de son commerce. Rahim a deux jours de permanence, et il compte bien profiter de cette sortie pour tout faire pour que son créancier retire sa plainte. Or, ce qu’il avait prévu ne va pas se passer comme prévu, et bientôt, l’homme se retrouve embarqué dans une histoire qui le dépasse complétement.

Avec son avant-dernier film, Asghar Farhadi avait oublié quelque peu ce qui faisait son cinéma pour se lancer dans le thriller. Trois ans après « Everybody Knows« , le cinéaste iranien retrouve le cinéma social et sociétal qui l’avait propulsé et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il revient en très grande forme.

« Un héros » est un film qui tient un scénario aussi riche qu’il est dramatique et sombre. « Un héros » est un film qui s’intéresse à un certain fonctionnement de la justice iranienne, tout en allant plus loin encore, puisque Asghar Farhadi parle aussi des réseaux sociaux (il en fait même une virulente critique), de la famille, et de l’honneur. Son intrigue, c’est le portrait d’un personnage, Rahim, père de famille, optimiste, toujours souriant, essayant de toujours voir le bon côté des choses, et ce scénario ne va pas faire de cadeau à ce personnage pour pointer du doigt l’invraisemblance du système iranien. Très bon, très bien écrit, intelligent dans sa réflexion, et génial dans « son divertissement », « Un héros » est un film qui, comme son personnage, nous entraîne dans plusieurs stades d’émotions.

Asghar Farhadi a construit son intrigue comme un ascenseur émotionnel et l’on se laisse totalement embarquer dans cette histoire qui ne cesse alors de faire des bons dans tous les sens. On croit, on est touché, on sait qu’il va s’en sortir, puis d’un coup, le film part sur d’autres sentiers et les doutes, ainsi que les révoltes, s’installent. Bref, ce scénario est tout simplement passionnant, Asghar Farhadi livrant une grande œuvre politique, sans oublier de faire un film touchant.

« Un héros » est aussi une très belle réussite grâce à son comédien principal qui irradie tout le film dès son ouverture. Ainsi, on découvre ici Amir Jadidi, et autant le dire tout de suite, le comédien fait des merveilles. Bulle d’air frais dans un film sombre et injuste, il est certain que ce « … héros » ne serait pas le même sans cet acteur. Jadidi nous fait ressentir toutes les émotions, il nous fait autant rire qu’il sait nous émouvoir, et même bien plus. Pour l’accompagner, Asghar Farhadi a réuni autour de lui un sacré casting, dont ressort, pleine de naturel et de charme, Sahar Goldust, qui incarne la future épouse du prisonnier.

Si du côté de son scénario, Asghar Farhadi fait des merveilles, si du côté du casting, c’est impeccable, du côté de sa réalisation, même si le film est passionnant, il est vrai qu’on a déjà vu Asghar Farhadi plus inspiré et surtout plus percutant. Bien filmé, très bien filmé même, tenant une belle mesure de son émotion, tenant une excellente plongée dans l’ambiance des rues de la ville, il est vrai aussi qu’ »Un héros » est un film trop classique. Si le film tient quelques fulgurances (notamment la dernière scène qui est un bijou à elle toute seule), « Un héros » laisse la sensation que tout s’enchaîne de manière « convenue », arrivant à créer une sensation étrange, puisque dans un sens, le film est très surprenant et dans l’autre, il demeure logique dans ses enchaînements. Après, face à ce scénario, ce côté classique n’abîme pas le reste, car malgré tout, comme je le disais plus haut, on se laisse totalement prendre par cette histoire, par ses sujets et plus largement par son personnage.

Ce retour en Iran pour Asghar Farhadi est donc une très grande réussite. « Un héros« , de par ce qu’il raconte et pointe du doigt, est un film aussi puissant qu’il est passionnant. Encore une fois, le réalisateur iranien n’est jamais aussi bon que lorsqu’il observe la société iranienne. Touchant, injuste, virulent même, « Un héros » nous fait passer par tout un tas d’émotions, et c’est assez fou.

Note : 16/20

Par Cinéted