De : Shana Feste
Avec Vera Farmiga, Christopher Plummer, Lewis MacDougall, Bobby Canavale
Année : 2018
Pays : Canada, Etats-Unis
Genre : Comédie, Drame
Résumé :
Laura et son fils Henry sont contraints de conduire son père trafiquant d’herbe et insouciant à travers le pays, après avoir été expulsé de sa maison de retraite.
Avis :
Si l’on a l’habitude de voir Vera Farmiga dans des films d’horreur (Esther, Conjuring) et même des séries comme Bates Motel, on peut aussi la retrouver sur des comédies dramatiques comme ce Boundaries. Sorte de road trip familial pour mener un père et grand-père dealer d’herbe chez l’un de ses filles, le film de Shana Feste porte tous les atours d’un Little Miss Sunshine réarrangé. Il faut dire que le film de Valerie Faris et Jonathan Dayton est un véritable chef-d’œuvre et qu’il a fait un paquet d’émules après sa sortie. Mais Shana Feste n’est pas le couple de réalisateurs, et cela se ressent très vite dans ce petit film qui a du mal à décoller et qui ne propose pas de personnages attachants. Boundaries coche les cases sans passion et tente, dans un mouvement désespéré, de rajouter du loufoque sans pour autant réussir son coup. Retour sur un échec.
Femme débordée
Le scénario de ce film est assez simple. Une femme, mère d’un adolescent en décalage avec ses camarades, reçoit un appel de son père placé en maison de retraite. Ce dernier vient de se faire virer, car il ne respecte pas les codes du lieu. Elle doit alors le chercher et l’amener chez sa sœur, qui accepte de l’héberger. Mais plutôt que de prendre l’avion, le grand-père, souhaitant renouer des liens avec sa fille, la force à faire un road trip en voiture, en s’arrêtant au passage chez plusieurs amis à lui. Bien évidemment, le trajet va être semé d’embûches et de rencontre en tout genre, offrant une occasion en or de tisser de nouveaux liens entre père et fille, mais aussi grand-père et petit enfant. Le concept est connu, et Shana Feste va tenter d’y apporter un vent de fraîcheur avec des personnages décalés.
Cependant, on va vite constater que l’on ne comprend pas vraiment les personnages et ce qui fait leur attrait. A commencer par cette mère de famille qui aime tellement les animaux, qu’elle recueille toutes les bestioles errantes chez elle. Sa situation amoureuse est catastrophique, son boulot ne lui plait pas vraiment (il faut dire qu’être à la botte de sa riche meilleure amie n’est pas forcément agréable) et elle a rompu les liens avec son père. Cette femme, débordée, a aussi un ado qui dessine des gens nus et qui ne se sent pas à sa place dans son lycée. En gros, c’est le bordel dans sa vie. Pour autant, là où on aurait pu avoir de la compassion, voire même de l’empathie, pour cette femme, on ne ressentira rien, car elle sort complètement du cadre et ne mène pas de véritable combat. Elle subit même son père invasif.
Ado en crise et papy dealer
Ce cas de figure, on le retrouve aussi chez les autres membres de la famille. Le fils est un ado à problèmes qui est assez mutique. Il aime profondément sa mère, mais il est incapable de s’exprimer en dehors de dessins obscènes. Ce qui pourrait passer pour un running gag devient vite lourdingue et sans grand intérêt. De même, le grand-père, élément perturbateur et grande gueule, ne parvient pas à nous toucher. Il est trop exubérant et sans gêne pour vraiment nous toucher, en plus d’être ingrat avec sa propre fille. Plutôt que de ressentir des émotions positives à l’encontre des personnages, on se retrouve à les suivre de façon détachée, car peu importe leur sort, on s’en fiche pas mal. Et le pire dans tout ça, c’est que même les acteurs semblent effacés. Que ce soit Vera Farmiga, Christopher Plummer ou encore Lewis MacDougall, c’est la douche froide.
Boundaries se sauve à peu près avec sa trame qui explore plusieurs sujets de fond. Si la relation père/fille est le thème principal du film, il reste très téléphoné et sans grande surprise. On sera plus intéressé par la relation grand-père/petit-fils, ce dernier trouvant de la confiance en lui à l’aide de son papy, qui le fait bosser en dealant de l’herbe. Certes, ce n’est pas glorieux, mais on voit une réelle évolution entre les deux personnages. Au milieu de tout ça, on trouvera divers thèmes un peu survolés, comme la légalisation du cannabis pour calmer les douleurs, ou encore la douleur d’un père absent qui est un véritable connard. On peut aussi y évoquer la difficulté de gagner de l’argent aux States, avec une sœur généreuse, mais sans le sou. Bref, malgré des personnages inintéressants, le film avait des choses dans le ventre.
Solaire factice
On ne peut pas non plus reprocher grand-chose à la mise en scène de la réalisatrice. Elle utilise de façon maline le soleil pour rendre son récit crépusculaire et lui donner un joli petit cachet. Cela lui permet aussi de sublimer ce road trip et de rendre l’ensemble solaire. Mais c’est gâché par un humour et des situations qui sont complètement nulles. Que ce soit la danse sur la fin du film, les blagues du grand-père, le braquage chez Peter Fonda ou encore l’enrôlement d’un déficient mental chez Christopher Lloyd, rien n’est vraiment drôle et il manque au film une écriture digne de ce nom. Il manque du liant entre les personnages, mais aussi entre certaines séquences qui ne sont que des étapes pour faire avancer une intrigue téléphonée au forceps. Shana Feste n’arrive pas à rendre son film drôle, ni même touchant et c’est plutôt triste.
Au final, Boundaries est une amère déception. Si l’on aurait pu croire, à son affiche, à un film solaire, drôle et touchant à la Little Miss Sunshine, on va vite déchanter. N’arrivant jamais à créer des personnages attachants, Shana Feste tente de masquer tout ça avec une mise en scène sympathique, mais qui manque de liant et de cohérence avec le propos. Même l’humour est mal dosé, avec un côté décalé qui ne fonctionne jamais. C’est dommage, on avait envie de l’aimer ce film-là, mais force est de constater que c’est un échec…
Note : 07/20
Par AqME