avril 28, 2024

Titane – De Feu et d’Acier

De : Julia Ducournau

Avec Agathe Rousselle, Vincent Lindon, Garance Marillier, Laïs Salameh

Année : 2021

Pays : France

Genre : Thriller, Fantastique, Drame, Horreur

Résumé :

Après une série de crimes inexpliqués, un père retrouve son fils disparu depuis 10 ans. Titane : Métal hautement résistant à la chaleur et à la corrosion, donnant des alliages très durs.

Avis :

Réalisatrice française, Julia Ducournau, après des études à l’école de la Fémis, se fait gentiment remarquer avec ses courts-métrages, notamment « Junior« , son troisième court-métrage qui fait déjà son petit effet au Festival de Cannes en 2011. À force de travail, et après un téléfilm co-réalisé en 2012, la jeune cinéaste finit par arriver à convaincre et ainsi, elle peut se lancer dans un premier long-métrage. Ce sera « Grave« . Le film sort en 2016 et fait sensation, aussi bien dans les festivals où il est présenté que chez les spectateurs lors d sa sortie en salle. Avec ce premier long-métrage, Julia Ducournau trouve donc le succès, et on peut dire qu’elle fut attendue au tournant.

Après le succès de « Grave« , Julia Ducournau s’est très vite lancée dans l’écriture d’un nouveau film, et si la colonne vertébrale de son film a vite été mise en place, la metteuse en scène a eu des difficultés à peaufiner son scénario, se trouvant face à un blocage qui lui a tenu presque une année. Ducournau savait qu’elle était attendue au tournant, et elle ne voulait pas décevoir, mais elle voulait aussi ne pas se décevoir. Ainsi donc, elle aura pris son temps, et voici que cette année, son « Titane » réalisé, la jeune femme est sélectionnée en compétition officielle au Festival de Cannes et que plus étonnant encore, elle va y décrocher la récompense suprême, la très convoitée Palme d’Or.

Ovni aussi dérangeant que fascinant, film en mutation permanente influencé et en même temps inspiré, « Titane » est une expérience réjouissante, même si au sortir de la salle, il va falloir un peu de temps pour rassembler ses idées, ses ressentis, ses sentiments, ses amours, mais aussi ses flous, voire même ses déceptions.

Alexia est une danseuse qui a bien du mal avec le monde qui l’entoure. D’ailleurs, depuis quelques mois, la jeune femme a pris des décisions radicales. Des décisions qui vont bientôt l’emmener dans une voie totalement inattendue. Une voie qui va lui faire croiser le chemin de Vincent, un père de famille qui a perdu son fils voilà dix ans.

Un peu comme cela fut le cas pour « Grave« , il est difficile de trouver ses mots pour parler du nouveau film de Julia Ducournau tant ce dernier brasse beaucoup de choses dans son sillage. Plongée dans un cinéma qui est une belle proposition dans son genre, « Titane » est un film qui a ses bons côtés, ses envolées et au-delà de ça, sa beauté, aussi intrigante que dérangeante, et même passionnante. Mais « Titane » est aussi un film qui cache deux films en un seul. C’est un film qui va changer en cours de route, et s’il touche des éléments intéressants, s’il bouscule le cinéma français, s’il ose proposer quelque chose, il est aussi parcouru de maladresses, allant du génial (sa première partie) à quelque chose d’hybride, dont finalement, on ne sait pas vraiment où la réalisatrice veut nous emmener.

Ainsi donc, « Titane » partage. « Titane » est un film qui sait parfaitement nous prendre dans sa première partie. Une première partie qui va avoir ses touches d’étrange (qui lorgnent sur le « Christine » de Carpenter), mais aussi et surtout ses touches de jubilation, proposant le portrait assez antipathique d’une jeune femme qui se lance dans une série de meurtres. Certains passages valent leur petit pesant d’or, livrant même de très belles fulgurances qui peuvent aisément prétendre à devenir culte. Dans cette première partie, se tutoient une volonté de mélanger les genres, de mélanger les ambiances, de livrer quelque chose de sérieux et en même temps d’assez décomplexé, ce qui pourra facilement nous fait sourire, et même plus, nous faire rire.

Puis arrive cette deuxième partie et c’est là où personnellement ça se complique, car « Titane » va prendre un virage totalement inattendu et si là encore Julia Ducournau va faire des propositions très intéressantes aussi bien dans son récit que dans ce qu’elle va raconter de ses personnages, de cette histoire, ou encore dans son ambiance, « Titane » laisse aussi la sensation de s’aventurer sur certains terrains sans trop savoir pourquoi il va ici. Si le film de Julia Ducournau peut être sujet à interprétation, si métaphores se conjuguent avec un soupçon de science-fiction, voire même plus encore, sur son ensemble, cette intrigue, et plus largement le pourquoi de ce récit, cette histoire-là nous apparaît assez flou et dans une certaine mesure, on se demande où est-ce que la réalisatrice veut en venir, ou est-ce que ces personnages vont et sont censés nous amener. Si cette sensation est bien là, si le flou que laisse « Titane » sur plus d’un plan se fait sentir, étrangement, ces sensations, voire ces déceptions, ne nous empêcheront pas d’apprécier « Titane » et de finalement passer un bon moment devant le film de Julia Ducournau, qui entre ses qualités et ses défauts, propose quelque chose qui fait « du bien » au cinéma français et plus largement au spectateur que nous sommes.

Si « Titane » est une expérience dans son intrigue, il l’est tout autant dans son visuel, Julia Ducournau livrant une mise en scène où se mélangent et se conjuguent des influences, des idées, une imagerie forte et des scènes assez folles. Certes, tout n’est pas incroyable et tout n’est pas à garder non plus. Dans « Titane« , il y a de la gratuité, des scènes qui sont là pour choquer, et l’on a l’impression qu’elles ne sont là que pour cela, puis il y a des influences qui peuvent être trop appuyées, l’ombre de David Cronenberg plane sur tout le film. Mais derrière ça, et au-dessus de ça, l’expérience est plaisante au final. Très bien shooté, doté d’une photo sublime, dotée d’une ambiance aussi dérangeante qu’elle est prenante, accompagné d’une forte BO, si « Titane » a ses maladresses, Julia Ducournau livre un film marquant et plaisant à plus d’un titre.

Enfin, si l’on pourra reprocher à « Titane » des personnages troubles dans le sens où ils auraient mérité d’être plus développés, ces derniers sont toutefois tenus par deux acteurs imposants. Deux acteurs que sont Agathe Rousselle et Vincent Lindon, et l’un comme l’autre en impose à l’écran. À noter le plaisir de revoir encore et toujours chez Ducournau la talentueuse Garance Marillier.

« Titane« , deuxième long-métrage de Julia Ducournau, est donc une expérience dont on ressort partagé. Trouvant du bon et du cheap, conjuguant fascinant et dérangeant, intéressant et gratuit, mélangeant les genres pour livrer un film hybride, qui mute tout au long de son intrigue, qui est intéressante dans ce qu’elle raconte, tout en nous laissant une part de flou, dont on peut se poser la question du pourquoi cette histoire… Bref, « Titane » est une proposition de cinéma, qui entre ses bons et ses mauvais côtés, ses fulgurances et ses déceptions, fut somme toute plaisante. Ainsi, après « Grave« , et maintenant « Titane« , j’attends le prochain film de sa réalisatrice avec encore un plus de curiosité.

Note : 14/20

Par Cinéted

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