Avis :
Sortir un film autobiographique, voilà un projet qui tient à cœur pour celui qui écrit et réalise. Et qui aurait pu prédire que ce fainéant d’Orelsan, rappeur de son état, arrive à fournir un travail d’une telle constance en si peu de temps. Accompagné de son meilleur ami Gringe, celui qui se nomme Aurélien dans la vraie vie est inarrêtable depuis deux ans maintenant qu’il a percé dans le milieu du rap. Après un excellent premier album concept racontant une journée dans leur vie de branleur, les Casseurs Flowters (les cinéphiles comprendront l’allusion) sont de retour au cinéma et dans les bacs. Parce que Comment c’est Loin n’est pas seulement un album, il est surtout le premier film d’Orelsan sorti le 09 décembre et la bande-originale l’accompagnant fait office de second album pour le duo. Mais comme bien souvent, un album audio est bien différent du film en lui-même et il arrive qu’un film soit bon malgré un BO inefficace ou transparente. Et le film d’Orelsan a de très bons échos, mais qu’en est-il vraiment de cet album/Bande Originale ? Et bien que l’on se rassure, c’est toujours aussi bon et le duo a le culot d’offrir un visage différent sur certains morceaux, se dévoilant dans leur vie intime et se révélant très touchant.
Le skeud démarre avec Nouvelle Journée et marque ainsi la même démarche que sur l’album précédant, à savoir une journée chantée sur toute la longueur. Sauf que ce ne sera pas forcément le cas, le duo étalant certains titres d’autres journées ou dans des situations bien précises. Mais le plus surprenant, c’est que cette intro est un morceau instrumental sans parole et ce ne sera pas le seul. En effet, on pourra compter sur Faut qu’on Rentre Bosser, Promenade Imprévue ou encore Quand on Descend vers le Centre qui clôture l’album. Ces titres sont relativement intéressants car même s’ils relèvent de l’électro lounge, ils sont bien orchestrés et s’insèrent parfaitement dans l’album. D’ailleurs, c’est à partir de là que l’on ressent une certaine mélancolie dans les choix du duo, ce qui montre leur palette artistique. D’ailleurs l’émotion sera la nouveauté de ce skeud qui sort un petit peu des paroles comiques qui ont souvent valu au duo d’être comparé à Stupeflip. Non pas que ces paroles soient absentes, bien au contraire, mais l’album regorge de morceaux plus calmes avec des moments plus intimistes, comme Quand ton Père t’Engueule où Orelsan parle amoureusement de son père et de son addiction à l’alcool. Ou encore sur le titre J’essaye, J’essaye, qui montre la difficulté de réussir dans notre société actuelle. Le duo livre un album plus personnel, qui surprenant et n’hésite pas à sortir de son confort pour se mettre en danger, profitant d’instruments comme des cuivres ou des guitares sèches.
Mais Gringe et Orelsan ne s’arrête pas seulement à l’émotion et offre aussi des titres plus simples, plus directs et critiquant de temps à autre une industrie musicale à la dérive. Ainsi, on pourra entendre les galères du duo avec les titres Si Facile ou Inachevés, qui montre toute la pugnacité de la formation pour réussir, sur un rythme plein de fougue et de hargne. Mais les deux rappeurs n’oublient pas aussi leurs premiers succès avec des morceaux plus humoristiques comme Wondercash (même si ce dernier critique le monde du marché) ou encore Pas N’importe Quel Toon, un excellent titre à l’humour ravageur. Enfin, l’album contient quelques titres qui sortent du carcan « rap » comme Xavier, un morceau presque disco qui bizarrement rentre parfaitement bien dans l’album. Cependant, tout n’est pas parfait dans ce second skeud. Quelques titres sont un poil plus faibles, à l’image de la plage Le Mal est Fait qui reste anecdotique avec un refrain très puéril et des paroles moins percutantes. Et c’est bien dommage parce que les paroles, c’est qui fait la force du duo, alternant critique acerbe, sexualité débridée et références geek à la seconde, ce que l’on retrouve parfaitement dans cet album, fort heureusement.
Au final, Comment c’est Loin, la bande originale qui fait office de second album aux Casseurs Flowters, est encore une fois une belle réussite. Entre une rythmique et un flow parfaitement maîtrisés, le groupe aborde des sujets plus personnels, plus sensibles et donnent une ampleur supplémentaire à leur œuvre qui commence à se dessiner comme un immanquable. Bien loin des invectives des rappeurs ratés qui s’évertuent à utiliser de l’autotune pour fournir un semblant de son, les Casseurs Flowters sont une référence dans leur domaine, possédant un véritable univers urbain, entre violence, humour et espérance.
- Nouvelle Journée
- Au Bout du Compte
- A l’Heure où je me Couche
- Quand ton Père t’Engueule
- En Boucle
- Faut qu’on Rentre Bosser
- Freestyle Radio Phoenix
- Le Mal est Fait
- C’est Toujours 2 Connards dans un Abribus
- Pas n’Importe quel Toon
- J’Essaye, j’Essaye
- Promenade Imprévue
- Xavier
- Wondercash
- On est Resté à l’Hôtel
- Si Facile
- Inachevés
- Quand on Descend vers le Centre
Note : 17/20
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Par AqME