
Auteur : Stéphane Przybylski
Editeur : Le Bélial
Genre : Uchronie
Résumé :
Des agents américains, anglais et nazis se livrent une guerre sans merci afin de mettre la main sur des armes extraterrestres. Saxhäuser et ses alliés tentent de les en empêcher et parviennent à détruire un engin volant échoué dans la vallée du Petit Zab.
Début 1940. L’extraordinaire découverte faite par Friedrich Saxhäuser dans la vallée du Nahr al-Zab-al-Saghir est désormais aux mains d’un comité occulte basé en terres américaines.
De Berlin à Washington D.C., tous s’accordent sur une chose : retourner au Kurdistan irakien est impératif. Qui se rendra maître du Château des millions d’années possèdera un avantage crucial dans le conflit en cours… De chaque côté de l’Atlantique, le comte Erchingen et l’énigmatique M. Lee montent des expéditions secrètes avec l’Irak en point de mire, une gageure quand la guerre étend son empire sur l’essentiel du globe… Reste Saxhäuser, soldat hors normes confronté à l’indicible et aux convictions balayées. Peut-être lui appartiendra-t-il de sauver l’humanité ? Mais envisager pareille entreprise est-il seulement possible quand votre propre humanité semble vous échapper ?
Avis :
Dans le domaine de la science-fiction, et plus particulièrement de l’uchronie, la tétralogie des origines est un projet littéraire des plus ambitieux. L’œuvre de Stéphane Przybylski propose une réinterprétation des faits historiques entourant l’accès au pouvoir des nazis et la Seconde Guerre mondiale. Ces romans n’ont pourtant pas vocation à s’atteler à une reconstitution rigoureuse en matière de réalisme. La connotation ésotérique se mêle à l’ingérence d’une civilisation extraterrestre, renvoyant à la théorie des anciens astronautes. Certes, le mélange des genres ne se destine pas à tous les publics. Il n’en demeure pas moins intéressant à appréhender, à explorer.
Malgré un premier opus engageant, Le Marteau de Thor s’avérait une suite en demi-teinte, sinon décevante. La faute à une intrigue qui tendait à se perdre, ainsi qu’à un schéma narratif assez confus. Avec Club Uranium, l’auteur délaisse les affaires d’espionnage entre les forces de l’Axe et les Alliés. Bien que la plupart des protagonistes soient toujours de la partie, l’histoire s’oriente davantage vers des considérations cosmiques et la présence tangible des extraterrestres. L’approche peut paraître farfelue. Cependant, elle reste dans un premier degré suffisamment sobre pour crédibiliser le propos, sans pour autant perdre de vue le caractère fictif de l’ensemble.
À cela s’ajoute un discours alarmant sur la course à l’armement, notamment sur les recherches relatives à la bombe atomique. D’où le titre du présent tome. Pour autant, on ne sombre pas dans des théories scientifiques ou des techniques absconses. Les enjeux demeurent intelligibles pour distinguer les intentions des différents intervenants. Ceux-ci sont nombreux, à un point tel que l’enchaînement des points de vue nécessite une grande attention. Il convient de les resituer par rapport à leurs homologues, leurs motivations personnelles et leurs camps. Bien que l’on n’observe pas une dimension manichéenne exacerbée, leurs réactions sont toutefois attendues.
Comme pour les précédents tomes, Club Uranium possède une chronologie alambiquée. Elle n’atteint pas le niveau du Marteau de Thor. Cependant, les fréquents allers-retours temporels obligent, là encore, à distinguer l’action selon les évènements passés et à venir. Ce choix narratif reste l’une des grandes faiblesses de la tétralogie des origines, car il atténue le sentiment d’immersion. Cela sans compter sur une complexification inutile de la progression. On peut même s’interroger sur la pertinence de certaines séquences qui font office de remplissage. Par exemple, l’incursion dans le milieu artistique new-yorkais des années 1960 ou le suivi des troupes lors de la seconde guerre du Golfe, en 2003.
Au regard de la densité du récit, il est difficile de ne pas distinguer certains faits qui s’avèrent redondants, voire statiques. L’exposition des personnages, comme des évènements, se révèle plus conséquente que nécessaire. Cela ne tient pas à la caractérisation, mais plutôt à une force de description qui peine à instaurer une ambiance. En revanche, on sent une grande érudition pour exploiter le contexte à bon escient et structurer l’intrigue autour desdits évènements. On songe à l’évocation d’affaires avérées ou à la présence de têtes connues pour avoir joué un rôle majeur pendant la Seconde Guerre mondiale ; dans un camp, comme dans l’autre.
Au final, Club Uranium constitue un troisième tome copieux pour poursuivre la tétralogie des origines. Ce qui induit d’inévitables longueurs et atermoiements. Toutefois, on apprécie l’originalité du concept et la cohérence qui émane de l’histoire, a fortiori en considérant sa complexité. Malheureusement, Stéphane Przybylski persiste dans les travers de ses précédents écrits. La chronologie des évènements demeure toujours nébuleuse, quitte à manipuler la temporalité des faits sans réel intérêt ni pertinence. On peut aussi regretter un panel de personnages trop conséquent pour distinguer une ou deux figures marquantes, au fil des pages. Il s’agit donc d’un roman perfectible à certains égards et exigeant pour en saisir toutes les subtilités.
Note : 13/20
Par Dante