juillet 27, 2024

Les Chiens de Tindalos – Frank Belknap Long

Auteur : Frank Belknap Long

Editeur : Mnémos

Genre : Horreur

Résumé :

Dans cet ensemble de nouvelles et ces quelques poèmes, tous liés à H. P. Lovecraft et à son célèbre mythe de Cthulhu, Frank Belknap Long raconte la précarité de l’existence humaine face à des forces cosmiques et cauchemardesques qui mettent tout en oeuvre pour éradiquer la vie sur Terre. Sa nouvelle la plus connue, devenue depuis un classique du genre, reste « Les Chiens de Tindalos », dans laquelle un écrivain expérimente sur lui une drogue ancienne qui le fait voyager à travers les âges. Pour la première fois, une suite à cette célèbre nouvelle est traduite en français : « Le Passage vers l’éternité » met à nouveau en scène les effrayants gardiens du temps. Ce recueil contient également « Les Mangeuses venues de l’espace « , un texte angoissant qui culmine dans la terreur, et « L’Horreur venue des collines », une longue nouvelle pleine de visions d’apocalypse. Quant au poème « H. P. Lovecraft », il évoque toute l’estime et le respect que Long avait pour celui qui fut son mentor.

Avis :

Il est toujours surprenant (et triste) qu’un auteur ne connaisse pas le succès de son vivant, mais accède à la notoriété après son trépas. Cet état de fait peut s’expliquer par le personnage lui-même, le contexte ou encore une promotion et une publication aléatoires, voire négligentes. Par ailleurs, cette situation peut mettre en exergue un trait de caractère, comme c’est le cas de la misanthropie pour H.P. Lovecraft. S’il est devenu une figure incontournable dans le domaine de la littérature fantastique et horrifique, son œuvre s’est avancée comme l’un des legs les plus notables et influents du XXe siècle.

Au fil des décennies, l’auteur de Providence a suscité bon nombre de vocations. De son vivant, on peut évoquer ses relations amicales et ses écrits épistolaires avec Robert E. Howard, Robert Bloch ou Frank Belknap Long. Ce dernier fut l’un des premiers romanciers à s’insinuer dans l’univers torturé des Grands Anciens avec ses propres nouvelles. Toute la singularité de la démarche tient à ce que ses histoires paraissent du vivant de Lovecraft, du moins pour la majorité d’entre elles. Également titre éponyme du présent recueil, Les Chiens de Tindalos fut une création originale dans la retranscription d’une œuvre aux multiples dimensions et aux tout aussi nombreuses nuances de terreur.

À l’image de son modèle littéraire, Frank Belknap Long confronte des personnages ordinaires avec des situations qui dépassent l’entendement. En l’occurrence, les mécanismes de la peur jouent surtout sur des aberrations physiques, en mesure de défier le temps, l’espace. On songe notamment à la déité Chaugnar Faugn de la nouvelle L’Horreur venue des collines, la plus dense de l’ouvrage. En cela, on appréhende chaque récit comme une exploration périphérique de l’œuvre originelle. Le panthéon des horreurs cosmiques s’étoffe, tandis que l’on découvre de nouvelles considérations métaphysiques au travers d’explications qui tiennent autant à des croyances ésotériques qu’à des théories relevant de l’astrophysique.

De ce point de vue, les histoires ébranlent les certitudes tangibles de notre réalité afin de lever le voile sur une interprétation différente (et terrible) sur ce qui nous entoure. Le propos demeure toujours aussi pertinent, même si l’on peut regretter que l’immersion ne soit pas forcément au rendez-vous. En fonction des nouvelles, cela tient à leur brièveté ou à l’exposition de scènes trop contemplatives. Celles-ci privilégient alors des digressions narratives et des lignes de dialogue beaucoup trop verbeuses. Il n’est pas rare que les histoires se déroulent sous la forme de conversations formelles où le discours des protagonistes crée de la distance, là où il aurait été judicieux d’instiller de la connivence afin d’intensifier le sentiment de peur auprès du lecteur.

Par ailleurs, l’auteur tend à trop se rapprocher du style lovecraftien. Certes, la démarche demeure essentielle pour faire écho à ses récits et donner l’illusion qu’ils sont écrits sous la même plume. Cependant, il a trop tendance à exacerber les caractéristiques de son homologue. Cela tient, entre autres, à la surabondance d’adverbes ou d’adjectifs qui, amalgamés les uns aux autres, amoindrissent leur signification. Dès lors, il est difficile de signifier leur véritable portée. À trop vouloir reproduire les techniques originelles, il ne parvient qu’à instaurer un contexte ultra-référentiel, en lieu et place de faire se manifester de lugubres et oppressantes atmosphères.

Au final, Les Chiens de Tindalos s’avance comme un recueil de nouvelles honorable pour les amateurs de Lovecraft. L’hommage appuyé et l’admiration de Frank Belknap Long sont évidents au fil des récits. On y retrouve ces sinistres considérations quant à notre réalité, ainsi que ce caractère multidimensionnel où des entités monstrueuses guettent dans les ténèbres de notre univers. Seulement, l’approche suggestive n’est pas de mise, exception faite des discours théoriques des protagonistes. L’écrivain multiplie les hyperboles au sein d’un ton emphatique, privilégiant la démesure aux effets insidieux qu’une telle réalité puisse avoir sur la psychologie humaine. Il en ressort des histoires intéressantes dans l’évocation du mythe des Grands Anciens, mais moins marquantes que celles de l’auteur de Providence.

Note : 13/20

Par Dante

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