février 10, 2025

Le Jardin Zen – Le Japon, le Femme et l’Homme

Titre Original : Hamon

De : Naoko Ogigami

Avec Mariko Tsutsui, Hana Kino, Akira Emoto

Année : 2025

Pays : Japon

Genre : Drame, Comédie

Résumé :

Luxe, calme et volupté. Tout va pour le mieux dans la vie parfaitement réglée de Yoriko et de tous ceux qui, comme elle, ont rejoint la secte de l’eau. Jusqu’au jour où son mari revient à la maison après de nombreuses années d’absence, entraînant avec lui une myriade de problèmes. Rien, pas même ses plus ferventes prières, ne semble restaurer la précieuse quiétude de Yoriko… Avec tout cela, comment faire pour rester zen ?

Avis :

Naoko Ogigami est une metteuse en scène que je découvre avec ce film, et plus largement, c’est une cinéaste qui, si elle est connue en festival, demeure assez confidentielle lorsqu’il s’agit des sorties de ses films dans nos salles de cinéma. D’ailleurs, si l’on jette un rapide coup d’œil sur sa filmographie, qui a l’air très intéressante, « Le jardin zen » est le premier film de la réalisatrice qui arrive chez nous.

Et ce premier film à arriver chez nous (qui est en fait son neuvième) est une bien belle surprise. Avec son titre, « Le jardin zen« , on peut imaginer un petit drame poétique, qui lorgnerait peut-être vers de la comédie, mais ce même « … jardin zen » va être tout autre. Plus sombre et plus acide qu’il n’en a l’air, « Le jardin zen » se pose comme une réflexion sur la place de la femme au Japon, mais aussi un film qui pointe du doigt les sectes qui sont particulièrement présentes sur l’île du soleil levant. Amusant dans un sens, le film de Naoko Ogigami se fait surtout touchant et prenant, et sa dernière scène risque fort bien de rester en tête un petit bout de temps, tant elle se pose comme une très belle conclusion, aussi bien pour son histoire, son personnage, que pour l’esthétisme de son film. Bref, un petit coup de cœur que ce film !

«  »Le jardin zen« , c’est une observation de la famille, de ses frustrations »

La vie de Yoriko est réglée comme du papier à musique, et elle s’en trouve totalement apaisée. En même temps, Yoriko est protégée, puisqu’elle a rejoint la secte de l’eau. Cette secte, qui lui fait boire de l’eau purifiée qu’elle achète en bouteille par paquets de douze, pour que son âme soit parfaite au moment où elle mourra. Mais un jour comme un autre, elle voit arriver son mari, qui a fui le foyer le jour de l’accident de Fukushima, et ce dernier est atteint d’un cancer, et il vient demander de l’aide à sa femme. Une femme qu’il a blessée, et cette dernière ne soupçonne pas que ces blessures sont toujours ouvertes.

« Le jardin zen« , d’emblée, on imagine un film paisible qui ferait du bien à l’âme, mais comme je le disais, il n’en sera rien, et le film de Naoko Ogigami va se faire bien plus sombre et terrible que cela. « Le jardin zen« , c’est une observation de la famille, de ses frustrations, et plus largement de la société japonaise, avec la place de la femme au sein de cette dernière. Ici, tout part de l’accident de Fukushima et la peur d’un homme des retombées sur lui, sur son jardin qu’il a parfaitement entretenu, et plus largement sur sa vie, car finalement, l’accident nucléaire n’est qu’un prétexte pour lui, afin de fuir et de changer de vie, laissant femme, enfant, même si ce dernier est déjà un adulte, un père mourant.

« Le portrait est beau et touchant, même si le personnage a bien des zones d’ombre. »

De ce point de départ, la réalisatrice va s’intéresser à la maîtresse de maison et comment elle va affronter ce départ et surtout comment elle va canaliser cette colère et cette incompréhension. Le portrait est beau et touchant, même si le personnage a bien des zones d’ombre. D’ailleurs, ce qui est excellent avec le film de Naoko Ogigami, c’est le fait que tous ses personnages ont des zones d’ombre, et ça, ça les rend terriblement humains. Il est difficile de ne pas être touché par chacun d’entre eux, même les plus secondaires, comme cette collègue de boulot qui finira par devenir une amie. Évidemment, l’intrigue va plus loin que cela, et au travers d’elle, la réalisatrice en profite pour se faire assez cinglante face à ces nouvelles communautés qui pullulent au Japon.

Des communautés qui en réalité sont des sectes qui ont des méthodes troublantes, et plus largement des objectifs qui ne sont pas vraiment clairs. Comment faire et réagir lorsqu’un membre de la famille se fait embrigader ? Plusieurs solutions sont possibles et chacun réagit de manière aussi intéressante que touchante, avec un fils qui fuit, et un mari qui essaie de comprendre et de combattre comme il le peut. Puis au bout du compte, il va y avoir comme une renaissance de cette femme, qui touchera au plus profond avec une superbe idée de mise en scène pour un final haut en couleurs.

« Une écriture qui possède beaucoup de nuances »

Autre source d’intérêt avec ce film, c’est l’écriture permanente de sa réalisatrice, qui sait se faire touchante et cruelle en même temps. Une écriture qui possède beaucoup de nuances, allant du simple drame familial, aux confins de l’absurde lorsqu’elle ira montrer l’embrigadement de cette femme, prête à croire tout et n’importe quoi pour fuir sa réalité. D’ailleurs, l’espèce de gourou est incroyablement bien incarné par Midoriko Kimura. Et lorsqu’on s’aventure du côté de son casting, comment ne pas mentionner Mariko Tsutsui, « L’infirmière » de Koji Fukada, qui livre encore une fois une prestation incroyable, pleine de nuances et d’émotions. Petit coup de cœur pour Hana Kino qui incarne la collègue de boulot, et qui tient un personnage très intéressant, et derrière elle, il y aura le même coup de cœur pour Ken Mitsuishi et Hayato Isomura, qui incarnent respectivement le père et le fils.

Un jardin zen, c’est un jardin sec fait de graviers dont l’être humain gère totalement sa symétrie, et lorsqu’on le regarde, il y a quelque chose d’apaisant qui s’en dégage. Avec un titre pareil, on s’attendait à ce que le film de Naoko Ogigami soit à cette image, et il n’en est rien, et c’est bien mieux comme ça. Ce premier film de la cinéaste qui se voit être distribué chez nous, touche, bouscule, amuse amèrement, et au bout du compte, nous fait passer deux heures tout en émotion et en intrigue. Puis derrière, avec un tel œil et une telle verve dans ce qu’elle approche, ce « … jardin zen » donne l’envie de voir les précédents films de la metteuse en scène. Bref, vous l’aurez compris, « Le jardin zen » est un joli coup de cœur !

Note : 15/20

Par Cinéted

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