
De : Houda Benyamina
Avec Oulaya Amamra, Sabrina Ouazani, Déborah Lukumuena, Daphne Patakia
Année : 2025
Pays : France
Genre : Aventure
Résumé :
Quand Sara, jeune fille en fuite, découvre que les Trois Mousquetaires qui protègent la Reine de France sont en réalité des femmes, elle décide de partir avec elles et de suivre leur exemple : se transformer pour être libre, se transformer pour être soi…
Avis :
Réalisatrice française, Houda Benyamina a fait une entrée incroyable dans le paysage du cinéma français. Si Houda Benyamina enchaîne les courts-métrages entre 2006 et 2011, c’est en 2016 qu’elle présente son premier film, le choc « Divines« . Caméra d’Or à Cannes, succès public et critique, et derrière ça, le film sera couronné par trois César, dont celui du meilleur premier film. Mais après ce premier film, Houda Benyamina a déserté les salles de cinéma. On la retrouve sur Netflix, réalisant quelques épisodes de la série « The Eddy« , ou encore au générique de « Salam« , un documentaire sur Diam’s qu’elle co-réalise.

Après huit ans d’absence, la réalisatrice s’apprête à revenir dans les salles obscures et elle fait son retour là où il était impossible de la prévoir, puisque « Toutes pour une » est une adaptation très libre des « Trois mousquetaires » d’Alexandre Dumas. La cinéaste est fan de films de cape et d’épée, et elle s’est fait alors un plaisir en imaginant les mousquetaires en femmes. Si l’idée peut être intéressante, et qu’à la rigueur, pourquoi pas, malheureusement pour nous, comme pour elle, « Toutes pour une » a bien du mal à nous entraîner dans son délire, et ce, malgré des actrices qui s’amusent vraiment derrière les barbes et derrière les moustaches des mousquetaires. Dommage.
« Houda Benyamina avait de grandes ambitions »
La Reine de France est en route pour l’Espagne, et ce qu’elle ne sait pas, c’est que le Cardinal Richelieu a envoyé une cinquantaine de mercenaires pour la récupérer et la ramener. Trois femmes déguisées en hommes se sont données comme mission de rattraper la Reine avant les mercenaires pour la ramener à Versailles. Sur leur route, elles font la rencontre de Sara, une jeune Morisques d’Espagne, qui pourrait les aider à devancer la calèche de la Reine, et ainsi la faire revenir à Versailles.
Il fallait oser toucher à Alexandre Dumas pour livrer une version féminine des « Trois Mousquetaires« . D’entrée de jeu, Houda Benyamina nous prévient et s’amuse avec son film, lançant un carton qui dit cela : « Cette histoire est celle qui a inspiré Alexandre Dumas, pour écrire « Les trois mousquetaires« . Rien de ceci n’est prouvé… Mais rien ne nous dit le contraire »…
Autant dire qu’avec ça, la réalisatrice peut s’amuser et c’est bien ce qu’elle va faire, livrant un film d’aventures tenu par une brochette d’actrices étonnantes d’un bout à l’autre. Pour ce film, Houda Benyamina avait de grandes ambitions, il lui aura fallu cinq ans de casting et presque un an de préparation pour ses actrices. En une heure et demie, « Toutes pour une » est un film qui offre ce que l’on est venu chercher avec un film de cape et d’épée, c’est-à-dire de l’aventure, de la camaraderie, de l’héroïsme et de la bravoure, des chevauchées, des combats, des auberges… Bref, il y a tout et plus encore, et si on s’arrête juste sur ces détails-là, on pourrait dire que le film est bien foutu. C’est beau, c’est bien filmé, Houda Benyamina en profite en même temps pour offrir de grands décors naturels dans lesquels elle laisse se perdre ses personnages.
« un scénario qui peine vraiment, mais vraiment, à convaincre. »
Derrière ça, le film peut amuser avec son idée de femmes qui doivent se faire passer pour des hommes. Génialement grimées, ces actrices se transforment petit à petit sous nos yeux et c’est assez fascinant. De plus, on sent qu’il y a une cohésion entre elles toutes. Elles prennent l’espace, elles ont appris à se masculiniser, changeant leur posture, leur façon de marcher et de se comporter. Et parmi elles toutes, deux s’échappent du lot, avec tout d’abord Oulaya Amamra, qu’on découvre en femme, et qui petit à petit se transforme pour être un mousquetaire. Mais au-dessus, de manière fascinante et mystérieuse, il y a Daphne Patakia qui, dans le rôle d’Aramis, est bluffante de naturel.
Mais voilà, derrière tout cela, ça ne suffira malheureusement pas pour que l’on entre totalement dans l’idée et le concept, la faute, surtout, à un scénario qui peine vraiment, mais vraiment, à convaincre. Si l’idée de femmes qui se déguisent en mousquetaires pour sauver la Reine de France, ça peut tenir, ici, on ne comprend pas le choix de ces femmes, qui n’est clairement jamais révélé. On ne sait pas pourquoi elles se lancent là-dedans et ce que ça peut leur apporter, car tout est négatif pour elles. Puis derrière ça, le film n’est qu’une course-poursuite, et un peu comme un accordéon, les mercenaires sans aucune logique, avec un sens inné de la géolocalisation, arrivent toujours à retrouver nos mousquetaires.
« il y a des choix de BO hyper modernes qui ne fonctionnent pas »
De plus, si c’est bien filmé, il y a toutefois des imageries qui laissent dubitatif, comme ces mercenaires costumés comme un « Assassin’s Creed« , ou encore le Cardinal Richelieu et Louis XIII qui sont de la lutte… Puis il y a des choix de BO hyper modernes qui ne fonctionnent pas avec les scènes ou les dimensions dramatiques que le film est censé offrir. Puis enfin, oscillant entre drame, aventure et comédie, parfois le mixage des trois ne fonctionne pas toujours (la scène du Marquis dans la calèche).

Lorsque l’on conjugue ces bons et ces mauvais éléments, il en ressort du deuxième long-métrage de Houda Benyamina une belle déception. L’idée était pourtant intéressante, les actrices s’amusent, et puis il y a l’imprévisibilité de trouver la réalisatrice de « Divines » aux commandes d’un tel film, qui a envie de bousculer les genres et offrir du spectacle, même s’il n’a pas les moyens d’une énorme production, mais voilà, malgré les bons éléments cités plus haut, ce sera malheureusement le négatif qui prendra le dessus, qui nous laisse la plupart du temps en dehors de cette aventure à laquelle on a du mal à croire tout simplement. Dommage, vraiment dommage.
Note : 08/20
Par Cinéted