Titre Original : Face/Off
De : John Woo
Avec John Travolta, Nicolas Cage, Joan Allen, Alessandro Nivola
Année : 1997
Pays : Etats-Unis
Genre : Thriller, Action
Résumé :
Castor Troy, dangereux terroriste, est tombé dans le coma à la suite d’un affrontement avec Sean Archer, agent de la CIA. Grâce à une intervention chirurgicale, Archer prend le visage de Troy pour faire avouer au frère de ce dernier l’emplacement d’une bombe. Mais Troy sort du coma et prend à son tour le visage d’Archer.
Avis :
Immense réalisateur chinois qui a fait ses preuves dans les années 80 avec des films tels que Le Syndicat du Crime, The Killer ou encore A Toute Epreuve, c’est au début des années 90 que John Woo décide de s’exiler aux Etats-Unis, idée qui lui trotte dans la tête depuis un moment déjà. En 1992, il réalise alors Chasse à l’Homme avec un certain Jean-Claude Van Damme, mais le film va être un échec, et John Woo ne va pas être content, n’arrivant pas à s’exprimer pleinement à cause de studio castrateur. Cependant, deux ans plus tard, il va pouvoir s’exprimer un peu plus, avec notamment Broken Arrow, mais surtout Volte/Face, qui reste aujourd’hui l’un de ses meilleurs films. Et force est de constater que plus de vingt-sept ans plus tard, le face-à-face entre John Travolta et Nicolas Cage n’a pas pris une ride et s’avère toujours ultra efficace.
Au départ, le film ne devait pas être un thriller, mais plutôt un film de science-fiction avec Sylvester Stallone et Arnold Schwarzenegger dans les rôles principaux. Mais entre un planning compliqué pour les deux hommes et un budget qui sera estimé beaucoup trop conséquent, Volte/Face va devenir un thriller d’action avec Nicolas Cage et John Travolta. L’histoire reste un peu la même, c’est-à-dire que deux hommes vont échanger leur visage et se poursuivre pour se faire la nique. Ici, le film débute avec la présentation d’un terroriste, Castro Troy, qui tente d’abattre un policier, mais il va tuer son fils de cinq ans à la place. Dès lors, Archer ne va chercher qu’à se venger, et lorsque, six ans plus tard, il arrive à arrêter Castor et son frère, il pense retrouver la paix. Mais les choses vont se compliquer avec une bombe prête à exploser.
« Le film joue alors constamment sur l’ambiguïté des relations. »
Dès le départ, John Woo pose les bases d’une relation haineuse entre les deux hommes. Castor Troy est un terroriste complètement fêlé, obsédé sexuel, et qui n’hésite pas à tuer femme et enfant pour arriver à ses fins. Des fins qui restent lugubres, entre appât du gain, notoriété égocentrée et folie furieuse. Archer est bien évidemment animé par la vengeance, ce qui lui coûte aussi une vie de famille houleuse avec sa femme qui essaye de la comprendre et se fait patiente, et une fille rebelle qui se sent délaissée. D’entrée de jeu, les bases sont posées pour enclencher une relation de conflit total entre les deux hommes, mais aussi pour poser quelques notions d’émotions, notamment autour de la vie familiale d’Archer, voire même celle de Castor, qui aime son frère, Pollux, lui aussi un peu taré, cerveau du duo qui restera tout de même en retrait.
Cependant, le vrai sel du film se retrouve lorsque Archer change de visage pour prendre la place de Castor afin de retrouver une bombe. Il infiltre alors une prison sans le dire à personne, et va devoir composer un rôle en jouant l’excentricité du terroriste. Pendant ce temps, Castor sort du coma et va prendre le visage de Archer, devenant alors un policier renommé, et il va profiter de cette place pour monter les échelons et faire vivre un enfer à sa némésis. Le film joue alors constamment sur l’ambiguïté des relations qu’entretiennent les deux hommes avec leur milieu. Archer, dans la peau de Castor, se rend compte que ce dernier a des relations, des amis, il a même un enfant, et aurait presque une vie comme lui. Ces découvertes vont le chambouler, tout comme elles vont confirmer la folie de cet homme qui gâche la vie des autres.
« John Woo va profiter de ce film pour peaufiner sa mise en scène. »
Bien évidemment, le scénario du film joue constamment sur la dichotomie des personnages et sur de savants jeux de miroir. La scène la plus explicite étant celle où les deux hommes se tirent dessus à travers un miroir, shootant en même temps leur reflet. John Woo va profiter de ce film pour peaufiner sa mise en scène, renouant avec ses propres codes (on n’échappera pas aux colombes qui volent en arrière-plan, ainsi qu’à quelques ralentis iconiques), mais essayant perpétuellement de jouer sur un aspect christique, ou autour de la religion. Si on retrouve des accointances avec quelques passages la Bible, le réalisateur s’amuse autour de quelques clins d’œil, comme lors de la mort de Castor, en position du Christ. Et puis niveau action, on en a pour notre argent, avec des séquences très nerveuses, lisibles et portées par un montage au cordeau.
Enfin, il est difficile de parler de Volte/Face sans évoquer les deux acteurs principaux qui sont outranciers au possible. Si John Travolta commence dans la peau du gentil, et s’avère être dans un état dépressif, il va s’en donner à cœur joie dans la peau du terroriste, jouant avec ses sourires et se lâchant constamment dans ses gestuelles. Quant à Nicolas Cage, ses débuts sont tonitruants (le headbang en tenue de prêtre) avec de nombreuses grimaces, mais il va par la suite faire le gentil, n’hésitant pas à surjouer le malaise pour se rendre encore plus torturé. D’ailleurs, c’était l’une des conditions de l’acteur pour jouer dans le film, puisqu’il ne voulait pas être le méchant. On retrouve autour d’eux des seconds rôles assez importants, comme Alessandro Nivola dans le rôle du frère cinglé, ou encore Joan Allen qui sera la femme de Archer, toute en retenue.
Au final, Volte/Face reste l’un des plus grands films de John Woo. Retrouvant un peu de libre arbitre dans sa réalisation, le cinéaste en profite pour fournir un film complet, dense dans son histoire, dingue dans ses scènes d’action, et porté par un duo d’acteurs qui semble s’éclater comme des gosses. Et près de trente ans plus tard, le film n’a pas pris une ride, pas même au niveau des rares effets spéciaux, John Woo préférant faire un film d’artisan, avec ce qu’il faut de prothèses et de cascadeurs pour assurer un spectacle qui dure dans le temps.
Note : 17/20
Par AqME