juillet 27, 2024

True Grit – Charles Portis

Auteur : Charles Portis

Editeur : Le Serpent à Plumes

Genre : Western

Résumé :

Une adolescente très têtue venge la mort de son père. Elle se fait aider d’un marshal borgne et d’un texas ranger assoiffé d’argent.

Avis :

Né en Arkansas en 1933, Charles Portis est un écrivain américain qui va faire beaucoup de bruit avec son premier roman, Norwood, qui paraitra en 1966. Un roman qui sera d’abord publié en plusieurs parties dans un périodique, avant d’être adapté au cinéma en 1970. Mais son véritable retentissement se fera avec son roman suivant, True Grit, écrit en 1968. Western froid et percutant, on ne peut pas dire que l’histoire soit très novatrice, ici, la vengeance d’une jeune fille qui veut retrouver le meurtrier de son père. Pour autant, le roman va être adapté deux fois au cinéma, une première en 1969, puis en 2010 pour les frères Coen. Forcément, plus de cinquante ans plus tard, un tel roman attise la curiosité, et il est un bon moyen de voir s’il vieillit bien, ou si les idées qui sont à l’intérieur sont plutôt rétrogrades aujourd’hui.

Le récit est donc assez simple. Il met en place Mattie Ross, une jeune adolescente au caractère bien trempé qui veut venger la mort de son père. Ce dernier a été tué par un homme qui a été accueilli par la famille, et Mattie trouve cette situation injuste et intolérable. Elle va donc se rendre dans une ville pour recruter le marshal le plus impitoyable, Rooster Cogburn, et en chemin, un ranger texan du nom de LaBoeuf va les rejoindre, car il a lui aussi des comptes à régler avec le tueur. Ce trio improbable va donc se lancer dans une traque froide, où tout un chacun tire la couverture à lui pour trouver des bonnes raisons de tuer. Simple, efficace, voici les deux mots qui peuvent qualifier ce roman qui ne lambine pas avec des descriptions à rallonge, et qui va droit au but, pour notre plus grand plaisir.

La grande force de l’histoire réside surtout dans les personnages. En premier lieu, Mattie, qui est une jeune fille qui ne se laisse pas faire, et qui n’a pas sa langue dans sa poche. Elle se montre intraitable, aussi bien dans sa volonté vengeresse que dans les affaires, et elle va constamment arriver à ses fins, même si parfois, elle se fait peur. En effet, si le début montre une forte tête, plus le récit avance, et plus on sent qu’elle s’affaiblit et renoue avec un fond adolescent. Cependant, elle ne se laisse pas démonter et ira au bout de sa vengeance, en mémoire de son père. Il s’agit-là d’un personnage fort, pour lequel on va ressentir une vive empathie dès les premières lignes, lorsqu’elle se présente. Car oui, le récit est raconté à la première personne, renforçant notre implication dans l’histoire.

A ses côtés, on pourra compter sur deux personnages relativement intéressants. En premier lieu, Rooster Cogburn, un marshal désabusé, borgne, bourru, mais qui va se laisser attendrir par cette jeune fille qui lui tient tête. Alcoolique notoire, préférant faire marcher ses armes plutôt que sa langue, le personnage est lui aussi fort, cachant un passé chargé que l’on aura sous forme de bribes lorsqu’il est en état d’ébriété. C’est dans ces passages que l’auteur livre le plus d’indices sur une époque révolue, avec des mentalités qui ont bien changé et des métiers qui disparaissent. Là encore, difficile de ne pas ressentir de l’empathie pour ce personnage fort. Seul LaBoeuf sera un peu en deçà. Certes, il reste un ranger texan qui a de l’ambition et montre un fort attrait pour le gain, mais il bénéficie d’un traitement secondaire, ce qui est dommage.

Mais le plus important reste la cohésion qu’il y a entre ces trois protagonistes. Les échanges sont souvent musclés, il y a de nombreux désaccords, et pourtant, ces trois personnages sont reliés par un même enjeu, retrouver ce salopard qui a tué et risque de tuer encore. En un sens, on pourrait presque voir True Grit comme un road trip vengeur, où l’argent et la justice sont les maîtres-mots pour faire avancer l’intrigue. Bien entendu, ce voyage, cette traque, sera une bonne excuse pour parler de plusieurs thèmes, comme la justice, la vengeance, l’appât du gain, et même la famille. Le roman de Charles Portis est très riche malgré sa faible durée (on ne dépasse pas les 220 pages), et surtout, il n’a pas tellement vieilli, si on retire quelques réflexions un peu misogynes ou des sous-textes sur les communistes qui n’ont plus lieu d’être aujourd’hui.

Néanmoins, il réside un petit point noir dans cette histoire, les méchants. En effet, ils rentrent tous dans les stéréotypes du western plus ou moins classique et c’est un peu dommage. Si le principal antagoniste demeure un salaud intégral qui n’a aucun scrupule dans ce qu’il a fait, les autres demeurent des faire-valoir sans grand intérêt. On a droit à Ned, un voyou connu de tout le monde car il a une chance de dingue, et on aura quelques autres méchants qui rentrent dans les cases voulues, comme le mexicain ou encore les jeunes qui ont fait de mauvais choix. C’est un peu ce qu’il manque à True Grit pour être une véritable masterclass. Des méchants dignes de ce nom, avec des principes ou des enjeux qui vont au-delà de l’appât du gain ou de vivre en dehors des codes du civisme.

Au final, True Grit est un roman dont le statut n’est pas à démontrer et qui reste, plus de cinquante ans plus tard, une histoire de qualité. Sa réelle force réside dans sa simplicité et dans ses personnages forts et attachants, qui vont être obligés de mettre leurs idéaux de côté pour cohabiter et réussir leur mission. Si on pourrait rechigner autour de méchants pas forcément intéressants, il n’en demeure pas moins que le roman de Charles Portis reste un western percutant et sans ambages.

Note : 16/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

Voir tous les articles de AqME →

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.