avril 28, 2024

Slaxx

De : Elza Kephart

Avec Romane Denis, Brett Donahue, Kenny Wong, Tianna Nori

Année : 2020

Pays : Canada

Genre : Horreur, Comédie

Résumé :

A la veille du lancement d’une nouvelle ligne de jeans qui devrait faire fureur, les employés de la marque de prêt-à-porter CCC réaménagent le magasin et l’entrepôt de la boutique phare. Pour sécuriser la nouvelle collection révolutionnaire, qui s’adapte à la morphologie de chacun, les lieux sont soigneusement verrouillés, et personne ne peut en sortir ou y entrer. Libby, une jeune vendeuse idéaliste, s’aperçoit que ses collègues disparaissent au fur et à mesure. Elle découvre qu’un pantalon est responsable de ce massacre et cherche comment l’arrêter.

Avis :

S’il y a bien une chose que l’on ne peut pas reprocher au cinéma d’horreur, c’est son manque d’imagination. Certes, les plus gros films sont parfois des redites un peu pénibles (et cela sans compter sur les suites, remakes et autre reboots), mais si l’on farfouille un peu, on peut trouver des idées saugrenues et de jeunes réalisateurs et réalisatrices qui ont envie de bousculer les codes. C’est le cas d’Elza Kephart, qui signe avec Slaxx son premier long-métrage. Un premier film qui mélange la comédie avec l’horreur, poussant volontairement tous les potards dans le rouge afin de créer un ovni qui possède un fond acerbe, dénonçant alors quelque chose d’important et de bien réel. Cependant, à force de tirer sur la corde du burlesque, le film ne risque-t-il pas de passer à côté de son sujet, et de franchir la ligne fine entre expérience étrange, et nanar involontaire ?

Le début du film est assez explicite sur ce qu’il va dénoncer. En effet, la réalisatrice n’y va pas par quatre chemins, elle bénéficie de peu de temps (1h15) et va droit au but. On se retrouve donc en Inde, auprès d’enfants qui ramasse du coton, avant de le balancer dans une broyeuse. Esclavagisme moderne décomplexé, on se doute que c’est de cela dont il va être question. Une fois cette introduction passée, on plonge auprès d’un magasin de prêt-à-porter où c’est un peu l’hystérie car la nouvelle collection arrive et une influenceuse très connue doit venir faire l’ouverture. On fait rapidement la connaissance des différents vendeurs, et notamment d’une nouvelle qui est ravie d’intégrer cette équipe. Cependant, ce que tout ce petit monde ne sait pas, c’est que la nouvelle collection de jeans va prendre vie et buter tout le monde, les uns après les autres.

« Un plaisir tout de même coupable. »

Derrière ce pitch complètement déluré, on retrouve donc un message qui se veut fort, à savoir la dénonciation du travail des enfants en Inde, qui alimente nos magasins de fringues. Si les révélations se font vers la fin du métrage, il ne faut pas sortir de St Cyr pour comprendre les tenants et les aboutissants. On est dans un film de possession d’objet, et les jeans réclament juste une vengeance après le décès d’une jeune fille dont le sari s’est pris dans la broyeuse. Derrière ce thème très fort, traité de manière ubuesque mais frontale, on trouvera aussi une façon de critiquer les apparences et les réseaux sociaux. Ici, entre la femme qui veut mettre le jean avant tout le monde pour avoir un beau cul, ou l’influenceuse égoïste qui ne pense qu’à faire des vues, on est servi.

Et cela sans compter sur l’esprit de compétition, où un type espère prendre la tête du magasin en regardant tout ce petit monde se faire zigouiller. Elza Kephart ne met pas de gants et envoie tout ce petit monde à l’abattoir, laissant la vie sauve à son héroïne, la seule qui semble vouloir comprendre la situation et essaye de s’entendre avec tout le monde. Alors oui, c’est cousu de fils blancs, et la finalité est sans surprise, mais globalement, derrière son aspect nanardesque, le film réussit à parler de ses thèmes sans tomber dans une surenchère de fioritures qui aurait gâché le plaisir. Un plaisir tout de même coupable face à l’histoire en elle-même qui n’évite pas certains clichés, à l’image des jeans qui se mettent à danser en écoutant du Bollywood… Et puis les acteurs sont en totale roue libre, offrant alors au film un aspect nanar…

« Elza Kephart ne mesure pas vraiment ses tonalités. »

Et c’est peut-être là la limite du film. A force de trop vouloir en faire, Elza Kephart ne mesure pas vraiment ses tonalités, et délivre un film à l’hystérie pénible et aux personnages dont on se fout royalement. Il faut dire qu’entre l’influenceuse tête à claques, la vendeuse égoïste qui ne pense qu’à son cul, le chef de la sécurité qui ne pense qu’à sa carrière, et les autres employés qui remettent constamment la faute sur les autres, on est sur un panachage insupportable, où l’on va prendre du plaisir à les voir mourir. Mais d’un autre côté, l’héroïne du film est trop discrète pour vraiment nous faire ressentir de l’empathie. Elle est mademoiselle tout-le-monde, mais il lui manque un truc en plus pour qu’on la prenne en affection. C’est dommage, car cela aurait donné plus de poids au film.

Néanmoins, le côté nanar et abusif est pleinement assumé par un gore décomplexé et relativement mal branlé. Les morts s’enchaînent assez rapidement, et si le premier meurtre est attendu, pour le reste, on aura droit à une imagination débridée. C’est sale, c’est un peu punk sur les bords, à l’image de ces jeans qui ont des dents, et dont les poches font office d’yeux. Certes, c’est mal foutu, on voit les prothèses, et niveau effets spéciaux, on a connu mieux, mais il y a cette générosité qui fait que l’on se marre à chaque nouvelle tuerie. Et puis il y a un aspect dérangeant lorsque le jean se colle à un mannequin pour mieux bouger. Slaxx, c’est un peu tout et n’importe quoi, et de ce fait, on a du dérangeant et des trucs ringards marrants, comme ce pauvre type qui se fait dévorer, ne laissant que son squelette.

Au final, Slaxx est un film complètement zinzin mais qui loupe de peu le coche du bon film. Sans être catastrophique et totalement nanardesque, le long-métrage d’Elza Kephart manque de mesure et n’embrasse jamais pleinement soit le côté délirant, soit le côté sérieux. Et cet aspect cul entre deux chaises lui porte préjudice, malgré de bonnes fulgurances et des critiques importantes traitées de manière frontale. Du coup, Slaxx est un film inventif, mais qui ne va pas forcément au bout des choses, mais il laisse entrevoir une jeune réalisatrice qui a des choses à dire.

Note : 12/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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