avril 19, 2024

Jeu Dangereux

Titre Original : To Be or Not To Be

De : Ernst Lubitsch

Avec Carole Lombard, Jack Benny, Robert Stack, Stanley Ridges

Année : 1947

Pays : Etats-Unis

Genre : Comédie, Guerre

Résumé :

Durant la Deuxième Guerre mondiale, entre Varsovie et Londres, une troupe de comédiens parvient à déjouer un plan de la Gestapo…

Avis :

Ernst Lubitsch est une institution à lui tout seul. D’ailleurs, lorsque l’on parle de comédie sophistiquée, on parle parfois de « Lubitsch’s Touch ». Réalisateur allemand à la carrière qui s’étale sur plus d’une trentaine d’années, au début du siècle dernier, Lubitsch a débuté sa carrière en Allemagne avec le cinéma muet, et il a conclu cette dernière aux Etats-Unis avec le cinéma parlant, et derrière ça, avec les honneurs et toutes les admirations.

Pour ma part, aussi étrange que cela puisse paraît, je ne m’étais jamais encore arrêté sur un film d’Ernst Lubitsch. Ce n’était pas l’envie qui me manquait, c’était juste l’occasion qui ne s’était pas présentée.

Profitant d’une ressortie d’un de ses films, je suis allé voir « Jeu dangereux » (ou « To be or not to be » dans son titre original) qui est sorti en 1947 chez nous, mais lorsqu’on le remplace dans sa sortie initiale, le film est sorti en 1942, et ça, c’est à noter car « Jeu dangereux » est une comédie satirique pleine de drôlerie certes, mais aussi pleine d’audace, puisque le réalisateur s’amuse à moquer et ridiculiser les nazis et le Führer, alors même que celui-ci met l’Europe à feu et à sang et surtout, on ne connaît pas encore l’issue de la guerre.

« Le réalisateur ose rire du régime nazi, de la gestapo et du Führer, en ridiculisant tout ce petit monde. »

Partant d’une idée originale, « Jeu dangereux » se pose comme une comédie pleine d’énergie et hilarante, qui en plus de ça, se fait très étonnante, car comme je le disais, le réalisateur ose rire du régime nazi, de la gestapo et du Führer, en ridiculisant tout ce petit monde. Bref, amusement, rires, complots, coups tordus et résistance sont au rendez-vous de cette farce, que j’ai d’ores et déjà envie de revoir !

1941, la Pologne est occupée par l’Allemagne, et Varsovie est quasiment en ruine. Le lieutenant Stanislav Sobinski est à Londres, où il fait partie des forces armées et se bat pour faire tomber le régime d’Hitler. Un soir, alors qu’il discute avec le Docteur Alexander Siletsky, qui est censé être un espion polonais qui s’en va pour une mission à Varsovie, il lui confie un message pour une femme sur place. Cette femme, c’est l’immense actrice Maria Tura, or Siletsky ne la connaît absolument pas, il n’en a jamais entendu parler, ce qui est tout bonnement impossible. Alors que Siletsky est parti pour sa mission avec tout un tas de renseignements sur la résistance de Varsovie, Sobinski prévient ses supérieurs, car si Siletsky ne connaît pas cette actrice, ça veut dire qu’il ne peut être polonais, c’est impossible. Le jeune homme est alors envoyé à Varsovie pour arrêter Siletsky.

Je suis donc allé en salle de cinéma voir ce film sans rien savoir de ce qu’il allait pouvoir me raconter, et quel régal. Je suis même resté on ne peut plus surpris de voir la dérision dont le réalisateur fait preuve avec une histoire et des personnages comme ceux-là, alors même que je savais que le film datait de la fin des années 40 (oui, je ne savais pas encore qu’il avait été tourné pendant la guerre).

« Le réalisateur étonne aussi de par l’humour dont il fait preuve avec un sujet aussi grave. »

« Jeu dangereux » est un film qui offre une intrigue pleine de suspens en même temps qu’il offre une comédie tordante, voire délirante, tant celle-ci utilise à merveille le double sens, la caricature et la satire. Si l’intrigue est bien ficelée et que la réalisation de Lubitsch n’a pas pris une ride, ce qui m’a plus passionné et fait rire avec ce film, ce sont les répliques, et toutes les scènes de quiproquos que le film offre avec une générosité terrible. Il est difficile de ne pas rire devant toutes les scènes où cette troupe d’acteurs essaie tant bien que mal de se sortir des pièges que leur tend le script.

Puis derrière ça, le réalisateur étonne aussi de par l’humour dont il fait preuve avec un sujet aussi grave. Un humour qui est presque glaçant, notamment lorsqu’il fait discuter ses nazis, des violences qu’ils peuvent infliger à leur victime. Il y a une telle déconnexion entre les paroles et la violence des faits que c’en est très drôle. Parfois, on aurait presque l’impression qu’ils en parlent comme une liste de course à faire, ce qui est on ne peut plus osé, lorsqu’on sait à quel moment le film a été mis en boite.

Derrière cette comédie d’espionnage au suspens savoureusement fourni, « Jeu dangereux » pose aussi une autre ficelle scénaristique, avec l’histoire de ce mari qui se rend compte que sa femme est volage. Avec cette ficelle, le réalisateur offre aussi à son film un côté vaudeville, qui nous régale et continue de fournir de l’humour et des drôleries en pagaille à cette histoire, mais aussi à ces personnages.

« Jack Benny est un immense coup de cœur. »

Puis derrière ça, Lubitsch rend aussi hommage à Shakespeare, car son film ne cesse d’y faire référence, que ce soit dans le texte ou les situations que le film offre.

Enfin, l’autre point génial de ce film, ce sont ses acteurs qui sont tout bonnement hilarants dans ces personnages caricaturés au possible. Certains mêmes sont très drôles juste par leur présence à l’écran comme le Colonel Ehrhardt qui est génialement tenu et ridiculisé par Sig Ruman. De ce casting, Jack Benny (acteur que je découvre) est un immense coup de cœur, l’acteur étant tordant et ce fut passionnant de suivre ce personnage, persuadé d’être un immense acteur, se sortir de situations folles avec un talent dingue.

Hilarant et surprenant, osé et plein de retournements de situations passionnants, mélangeant comédie, thriller, film de guerre, caricature et vaudeville, « Jeu dangereux » est une merveille qui, j’en suis certain, ne m’a pas encore révélé tous ses secrets, le texte est tellement riche, que je pense être passé à côté de certaines choses, ce qui me donne envie de me replonger dedans tout de suite.

Volant presque sur son centenaire, j’ai pris un immense plaisir à découvrir cette comédie, et là, je n’ai qu’une envie, c’est de me lancer dans d’autres films de Lubitsch.

Note : 18,5/20

Par Cinéted

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