avril 27, 2024

Punch-Drunk Love

De : Paul Thomas Anderson

Avec Adam Sandler, Emily Watson, Philip Seymour Hoffman, Luis Guzman

Année : 2003

Pays : Etats-Unis

Genre : Romance, Comédie

Résumé :

Barry Egan, un trentenaire timide et complexé, passe le plus clair de son temps à collectionner les bons d’achat d’une marque de gâteaux. Depuis sa plus tendre enfance, il est accaparé par ses sept harpies de sœurs, si bien qu’il n’a jamais eu le temps de faire sa vie, ni de tomber amoureux. Jusqu’au jour où l’une d’entre elles lui organise un rendez-vous avec une troublante jeune femme se nommant Lena Leonard…

Avis :

Commençant sa carrière dans les années 90, Paul Thomas Anderson va se faire remarquer dès son deuxième film, Boogie Nights, qui est une plongée dans le monde du porno des années 70 avec Mark Wahlberg et Burt Reynolds. Dès lors, celui que l’on surnomme PTA va avoir les coudées franches pour faire des films encore plus gros, et il va sortir Magnolia avec Tom Cruise. Drame de plus de trois heures, le film installe définitivement le réalisateur parmi les grands noms à suivre de très près. Mais après ce long-métrage, le cinéaste a voulu faire un film plus simple, et changer de registre. Il va alors s’inspirer, en partie, de l’histoire de David Phillips, un ingénieur qui va acheter plus de dix mille pots de pudding pour avoir deux millions de kilomètres en avion, suite à une offre promotionnelle. Il en résultera Punch-Drunk Love, une comédie romantique inattendue et bizarre.

Le scénario du film est assez étrange. Dès le départ, Paul Thomas Anderson nous plonge au plus près d’un homme qui semble travailler dans un bureau se situant dans un grand hangar. Cet homme fait du démarchage téléphonique avant de constater un énorme accident sur une route, puis de trouver un petit piano devant son lieu de travail. Très rapidement, il va faire la connaissance de Lena, une femme sympathique qui lui laisse sa voiture pour le garage d’à côté. Suite à cette succession de situations qui n’ont ni queue ni tête, on va suivre Barry à une fête organisée par ses sept sœurs. De retour de cette fête, Barry compose un numéro du téléphone rose pour avoir simplement de la compagnie, mais il va se faire extorquer de l’argent. De là va découler un roulement de péripéties pour notre personnage central.

Complètement incongru, citant volontairement Jacques Tati avec un personnage burlesque à qui tout arrive, Paul Thomas Anderson va tenter de briser les codes de la comédie romantique pour offrir une histoire à la fois simple et déroutante. Il faut dire que d’emblée, le personnage de Barry intrigue, aussi bien dans son attitude un peu autistique que dans son métier (vendeur de débouche-chiotte) ou dans sa relation avec les autres. On sent que le type n’est pas seul dans sa tête, et qu’il peut avoir des excès d’humeur parfois violent. Bref, l’écriture est complexe, d’autant plus lorsque ce dernier annonce ne pas savoir aimer, ou tout du moins ne pas ressentir d’amour pour qui que ce soit. Dès lors, on bascule presque dans un drame ubuesque, où l’homme en question va trouver une femme qui tombe sous son charme. Les rôles sont donc inversés avec une femme qui charme un homme.

Malheureusement, pour réellement apprécier le film, il va falloir s’accrocher au personnage principal, mais aussi et surtout à toute une palanquée de péripéties qui ne s’arrêtent jamais. Il y a une vraie frénésie dans ce métrage, qui fait que l’on a l’impression de ne jamais respirer, de ne jamais prendre son temps. C’est un pur choix narratif, comme le confirmera par la suite son réalisateur, en plus de fournir une musique omniprésente et entêtante. De ce fait, il faut rentrer dans le délire, et ce n’est pas facile. Tout comme il faut ressentir de l’empathie pour un personnage en dehors des codes, mais qui n’est pas pour autant simple ou agréable. Outre ses coups de sang, son côté imprévisible le rend assez antipathique et on ne sait pas vraiment ce qu’il ressent. Adam Sandler y est épatant de sobriété, pour autant, il manque quelque chose à Barry pour être attachant.

De plus, les personnages secondaires sont très secondaires. Si l’on met de côté Emily Watson, qui joue la jeune femme amoureuse, le reste du casting n’est là que pour faire un peu de figuration. Ce n’est pas étonnant d’ailleurs que la plupart ne sont pas des acteurs professionnels. De ce fait, cela manque d’envergure, de délicatesse et d’épaisseur. Et la trame n’est pas suffisamment simple pour que Paul Thomas Anderson puisse se permettre cela. On a la sensation de regarder un film auquel il manque des éléments de langage pour pleinement convaincre. Alors certes, c’est original, et cela sort d’un cadre balisé, mais il s’agit d’un film qui n’est pas forcément fait pour tout le monde. La réelle prouesse de ce film vient principalement de sa mise en scène, qui n’a pas volé son prix à Cannes.

Le cinéaste ne va faire qu’expérimenter. D’ailleurs, certaines scènes étaient tournées plusieurs fois avec différents angles, donnant dès lors beaucoup de rush a découpé. Mais au-delà de la maîtrise de son objet visuel, Paul Thomas Anderson va aussi inclure de nombreuses symboliques dans son récit. Ainsi, lorsque Barry court dans les couloirs de l’hôtel de Lena, on pourrait presque y voir la recherche de sortie de son âme un poil torturé. On aura aussi droit à un doux baiser en ombre chinoise, octroyant dès lors une vraie poésie au moment. Puis on retrouve aussi les tics de réalisation du metteur en scène, avec des mouvements de caméra rapides lors des dialogues. Bref, Punch-Drunk Love est un film de PTA, mais qui reste, tout de même, assez difficile d’accès, notamment pour ceux qui s’attendent à une comédie romantique calibrée.

Au final, Punch-Drunk Love est une comédie romantique assez atypique. Si Paul Thomas Anderson voulait revenir à un cinéma plus simple et plus concis après Magnolia, il n’en perd pas pour autant son maniérisme et sa volonté de bousculer les codes. Si d’un point de vue formel, le film est une réussite, il n’en est pas de même sur son scénario, ou la caractérisation de ses personnages. Trop loufoque, trop frénétique, trop bruyant, le cinéaste, à force de trop en faire, délivre un long-métrage qui peut parfois être pénible, et laisser sur le bas-côté. C’est dommage, car pour une fois, Adam Sandler est bon.

Note : 12/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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