avril 25, 2024

L’Été Nucléaire – Et si Tout Pétait?

De : Gaël Lépingle

Avec Shaïn Boumedine, Théo Augier, Carmen Kassovitz, Manon Valentin

Année : 2022

Pays : France

Genre : Drame, Thriller

Résumé :

Quand survient un accident à la centrale nucléaire voisine, Victor se retrouve confiné dans une ferme avec ses anciens copains du village. L’orage menaçant, ils guettent le passage du nuage radioactif alors qu’ils auraient dû évacuer la zone. En 24 heures, ils vont perdre toutes leurs certitudes.

Avis :

Aujourd’hui, on s’arrête sur un cinéaste français des plus discrets, Gaël Lépingle. Inconnu du grand public, et même des cinéphiles avertis, Gaël Lépingle a commencé sa carrière à la lisière des années 2000, au théâtre. Peu avant d’arriver dans les années 2010, il passe à la réalisation, logeant sa caméra quelque part entre le documentaire et la fiction. Il va alors passer les années 2010 à proposer « loin des regards » des films, aussi bien en cours, moyens ou longs-métrages. Son premier long-métrage de fiction, Gaël Lépingle va le réaliser en toute discrétion en 2019 avec « Seuls les pirates« .

Trois ans après ce premier essai de fiction, Gaël Lépingle revient avec toujours autant de discrétion (à peine une trentaine de salles diffusaient son film) pour un second film au sujet diablement intéressant. Pour ce second film, le réalisateur imagine ce qui pourrait se passer si l’un de nos réacteurs nucléaires fuitait. Au moment où le gouvernement se pose beaucoup de questions quant au nucléaire, le film de Gaël Lépingle arrive à point nommé. Original et audacieux, « L’été nucléaire » est un métrage duquel on va ressortir partagé, car si le metteur en scène a réussi à nous cueillir et à nous tenir, il est vrai aussi que cet « … été nucléaire » déçoit, car il s’échappe de lui quelque chose d’inabouti, comme si le film n’osait jamais vraiment empoigner son sujet, survolant beaucoup ce dernier. Il en résulte une déception qui restera toutefois intéressante dans sa démarche, et dans ce qu’elle peut proposer.

Victor, la vingtaine, fait son footing habituel quand retentissent les alarmes de la centrale nucléaire voisine. Un incident vient d’arriver et la région doit être évacuée. Quant à ceux qui ne réussissent pas à partir à temps, ils doivent se confiner en attendant. Victor, avec quelques amis, n’a pas réussi à partir, et le petit groupe va trouver refuge dans une ferme, en attendant les secours. Mais alors que les secours tardent, et que l’affaire est médiatique, enfermé dans cette maison, le petit groupe finit par perdre leur certitude et se poser beaucoup de questions.

Un film sur une catastrophe nucléaire, le sujet est si original, surtout dans le paysage du cinéma français, que j’avais forcément envie de m’y arrêter. J’ai donc lutté un peu pour trouver une salle de cinéma qui jouait cet « … été nucléaire« , pour voir où le film de Gaël Lépingle pouvait m’emmener, et je dois dire que j’en ressors assez partagé, avec le moral dans les chaussettes, face à un film plein de bonnes idées et d’intentions, au-delà de ça, plein d’intérêts, mais qui malheureusement laisse la sensation de ne pas oser s’engager et aller au fond de son sujet.

Le film est assez long, notamment parce qu’il a tendance à tourner en rond, notamment en milieu de séance où les longueurs se font sentir et où l’on reste dans l’attente qu’il se passe vraiment quelque chose au sein de ce groupe confiné, qui a tendance (par stress) à s’engueuler pour pas grand-chose. « L’été nucléaire » pourrait presque se poser comme un huis clos. Un huis clos où finalement l’attente de savoir et d’être évacué est la trame principale. Alors bien sûr, Gaël Lépingle étoffe ce récit confiné avec pas mal de sujets et d’interrogations qui vont être intéressantes. Comme la crainte d’un incident de la part des habitants qui habitent autour de la centrale, et de leur préparation.

Le réalisateur questionne aussi le complotisme avec des rumeurs qui commencent à traîner, ou encore la défiance face aux informations médiatiques qui sont données via la télévision ou la radio. Plusieurs conversations au sein du groupe sont intéressantes, tout comme Gaël Lépingle à bien nous tenir face à l’espoir qui s’amenuise avec les heures qui passent. À travers quelques bonnes idées, le metteur en scène questionne les priorités humaines, ou encore la panique face à cette situation et les décisions « radicales » et égoïstes qui peuvent être prises. Le réalisateur injecte aussi un peu de tension dans son récit, notamment avec une météo menaçante et les doutes quant à un tonnerre possiblement trop fort en pleine nuit.

Si la tension est parfois bien mesurée, d’autres fois, cette dernière peut avoir tendance à tomber à plat, voire même casser totalement à cause de son montage. Et là, je pense à la scène du pillage, ou encore la scène des poules. Ça a bien du mal à fonctionner et c’est bien dommage, car les idées sont bonnes, et elles auraient pu injecter beaucoup de tension et d’intrigue.

Avec pas grand-chose et de bonnes idées, ainsi qu’un bon sujet, Gaël Lépingle tient plus ou moins bien son intrigue et s’il est vrai qu’on peut en ressortir déçu d’un côté, car le film ne va pas au bout de son sujet, et va trop vite parfois sur certains instants qui auraient mérité plus, sur son ensemble, cet « … été nucléaire » se laisse suivre de manière plaisante et ne serait-ce que pour audace d’oser quelque chose, on est plus enclin à passer au-dessus des maladresses, des longueurs et finalement du spectre que le film aurait pu être si Gaël Lépingle avait osé quelque chose de plus radical et tendu.

Puis ce qui fait aussi qu’on se laisse gentiment attraper par ce film, c’est d’un côté son ambiance, qui parfois sait se faire bien menaçante (les plans sur la centrale de loin ou encore une échappée dans des rues entièrement vides) et de l’autre, c’est cette bande de jeunes acteurs qui campent bien leurs personnages. Des personnages qui arrivent à plutôt bien se compléter pour former un patchwork de réactions possibles face à quelque chose qu’on sait possible, auquel on peut s’être préparé et en même temps, lorsque cela arrive vraiment, c’est très loin de ce que l’on pouvait imaginer.

« L’été nucléaire » n’est pas un grand film, mais il a le mérite d’essayer quelque chose, aussi bien dans ce qu’il raconte que comment il va le raconter. Certes, on y trouve des longueurs et le film de Gaël Lépingle aurait mérité un traitement plus radical, notamment dans son angoisse face à cette menace invisible qui pourrait s’infiltrer partout, mais sur l’ensemble, malgré ses manques, ses imperfections et ses maladresses, cet « … été nucléaire » se laisse suivre avec un certain intérêt, et même si on l’en ressortira avec des déceptions, pour ma part, malgré tout, je ne regrette pas m’y être arrêté, car ce petit film, fait avec trois fois rien, est plus intéressant que bons nombres de films français qui peuvent sortir dans nos salles de cinéma.

Note : 10/20

Par Cinéted

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