avril 20, 2024

Coups de Feu Dans la Sierra

Titre Original : Ride the High Country

De : Sam Peckinpah

Avec Randolph Scott, Joel McRea, Mariette Hartley, R. G. Armstrong

Année : 1962

Pays : Etats-Unis

Genre : Western

Résumé :

Steve Judd, un shérif à la retraite, doit aller chercher l’or d’une communauté de chercheurs et le ramener à la banque qui l’emploie. Il se fait accompagner par son vieil ami Gil Westrum et son jeune protégé Heck. Ceux-ci n’ont accepté le travail que pour s’emparer de l’or. En route, ils sont les hôtes d’un paysan quaker dont la fille Elsa, malgré le refus de son père, se joint à eux pour aller épouser son fiancé Billy au camp de mineurs.

Avis :

Sam Peckinpah est un réalisateur qui n’a jamais eu de chance. Il faut dire que le type avait un foutu caractère et que bien souvent, il avait du mal à s’entendre avec certains de ses comédiens. La mésentente la plus connue étant celle avec Charlton Heston sur le tournage de Major Dundee, son troisième film. Mais même sur le tournage de son premier film, New Mexico, il a eu des frictions avec Maureen O’Hara et son producteur. Sans compter sur le montage du film, qui fut charcuté et dont le réalisateur garde un souvenir douloureux. Ainsi, en abordant son deuxième métrage, Coups de Feu dans la Sierra, il va alors les coudées un peu plus libres, car les producteurs jugent le scénario trop léger et ne regardent pas trop le développement. Ainsi donc, Sam Peckinpah se sent plus libre et va laisser ses démons de côté.

Le Bon, la Brute et le Truand, mais Bon quand même

Le réalisateur n’est pas encore l’apôtre de la violence et cela se ressent dans ce film qui est plus calme. On va y suivre un homme qui se veut droit et qui va être embauché pour rapatrier une coquette somme d’agent depuis une mine. Il va alors prendre avec lui son ami de toujours avec qui il partage un passé de voyou. Ce dernier prend aussi avec lui son petit protégé, avec l’idée fixe de persuader son pote à prendre l’argent pour lui. Et s’il reste droit et juste, il en paiera le prix. Au milieu de tout ça, une jeune femme, fille de pasteur, se joint à la bande pour aller au campement de la mine, retrouver un amour avec qui elle veut se marier. Mais les choses ne vont pas forcément se passer comme prévu, et la poudre va parler, pour l’argent, mais aussi pour la jeune femme.

Très loin du film de règlement de comptes (même si on retrouvera un duel sur la fin), Coups de Feu dans la Sierra est plus un buddy movie sur le temps qui passe et la rédemption qu’un véritable festival de tirs au pistolet. Ici, Sam Peckinpah va œuvrer en toute délicatesse pour peindre le portrait de deux vieux briscards, abîmés par la vie, le temps, mais aussi la solitude. Si chacun leur tour, ils ont connu le côté loyal, puis le côté bandit, les deux types restent des hommes abattus, presque oubliés de tous et qui doivent trouver de petits boulots pour vivoter. Ainsi donc, leur retrouvaille sera houleuse, sujette à des discussions tendues, pour par la suite se radoucir en évoquant le passé, mais aussi en regardant vers le futur, notamment grâce au jeune personnage, bandit au sang chaud de son état, mais qui va apprendre durant ce voyage.

Des Hommes et Une Femme

Ainsi donc, Sam Peckinpah va filmer cette histoire comme un voyage initiatique pour tous les personnages. On retrouvera le vieux roublard qui va tenter par tous les moyens de faire comprendre à son ami qu’il veut l’argent, et pas forcément bien le rapatrier là où il faut. Il va apprendre de ses erreurs et comprendre qu’en agissant ainsi, il va perdre son unique ami. Il en va de même pour le « gentil » de l’histoire, qui va devoir composer avec beaucoup de monde et se jouer de certains coups en douce. Quant au plus jeune, il pense faire les choix justes en voulant voler l’argent, mais l’amour va le remettre sur le droit chemin et il va se rendre compte qu’être bon et loyal rapporte plus que d‘être mauvais. Du moins aux yeux d’une jeune femme. Les méchants sont clairement identifiés dans cette histoire, et il s’agit des mineurs.

Des misogynes atroces, qui vivent en microcosme et ne se rendent pas compte du mal qu’ils peuvent faire. Le réalisateur les filme comme des bêtes sauvages dont seul compte le plaisir immédiat, l’alcool et les filles faciles. Presque féministe avant l’heure, Sam Peckinpah délivre le portrait d’une jeune femme qui décide de se défaire du joug de son père, mais aussi de celui de son futur mari, qu’elle découvre comme pochtron, violent et imbécile. Ici, le personnage féminin a besoin d’aide pour s’en sortir, mais elle apporte aussi une lumière à l’un des personnages, qui va complètement changer de point de vue sur la vie, grâce au comportement courageux et rebelle de cette femme, seule au milieu de toux ces hommes. Une vision couillue pour l’époque, surtout dans un western, et qui plus est de la part de Peckinpah.

Entre Classique et Crépusculaire

Pour filmer cette douce histoire, qui bénéficie tout de même d’un dernier duel frappadingue et d’un final qui fait monter les larmes, Sam Peckinpah se trouve à un croisement. Le western classique a encore de beaux jours devant lui, mais le réalisateur américain va lui apporter ce petit quelque chose crépusculaire qui va devenir un sous-genre à part entière. Avec un éclairage et un cadrage sublime, le cinéaste va utiliser la lumière pour appuyer son propos sur la fin de vie, sur le temps qui s’écoule et qui fait son œuvre. Il est, en quelque sorte, le premier à apporter sa pierre à l’édifice à ce qui pourrait bien être le western crépusculaire, et il le fait avec une grâce effarante. Coups de Feu dans la Sierra est une belle histoire qui bénéficie du plus beau des écrins. Et que dire des acteurs, deux spécialistes du genre impeccablement tenus.

Au final, Coups de Feu dans la Sierra est un très grand western. En ayant les coudées franches, Sam Peckinpah a pu livrer le film qu’il avait voulu, sans des producteurs véreux sur le dos. Sa vision est respectée et il en ressort un très beau film qui redynamise le western des années 60. Entre un esthétisme poussé, deux acteurs admirables et une histoire qui possède un fond solide, on peut dire que l’on est dans ce que le réalisateur américain a fait de mieux.

Note : 17/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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