Titre Original : The Wild Bunch
De : Sam Peckinpah
Avec William Holden, Ernest Borgnine, Robert Ryan, Edmond O’Brien
Année : 1969
Pays : Etats-Unis
Genre : Western
Résumé :
En 1914, Pike Bishop et sa bande entrent dans San Rafael, une petite ville du Texas, pour y dérober la paie des ouvriers du chemin de fer. Ils tombent dans un piège, fuient, puis imaginent un nouveau braquage de train, particulièrement ambitieux, pour le compte de Mapache, un général mexicain…
Avis :
Fils de juristes, Sam Peckinpah se lance tardivement dans le cinéma. En effet, il rentre dans les Marines durant quatre ans, puis il intégre l’université de Fresno avant d’aller à Los Angeles, où il prendra goût au cinéma. Assistant-réalisateur de Don Siegel, il va, pendant onze ans, faire des courts-métrages, et participer à l’écriture de films, dont L’Invasion des Profanateurs de Sépultures de 1956. En 1961, il réalise ses deux premiers films, New Mexico et Coups de Feu dans la Sierra. Celui lui ouvre grand les portes des studios, pour lesquels il va faire un film de commande, Major Dundee. Mais le film sera une catastrophe, puisque Sam Peckinpah ne s’entendra pas du tout avec Charlton Heston et le studio va charcuter le montage initial, perdant à jamais certains rushs. Après cet échec, il faudra cinq ans au réalisateur pour revenir, et ce retour se fera avec La Horde Sauvage.
Le western macaroni
Ruminant sa colère et la couchant sur la pellicule, Sam Peckinpah va réaliser un western qui va devenir culte et qui assume pleinement ses excès de violence. Réponse au western spaghetti qui fait rage durant les années 60, le réalisateur américain ne va pas mâcher son travail. Ici, on va suivre quatre survivants à un braquage. Il s vont devoir s’enfuir car ils sont poursuivis par d’autres malfrats, mené par un homme mandaté par la police de l’époque. En passant la frontière mexicaine, les quatre voleurs vont alors braquer un train et passer un marché avec un chef de guerre mexicain pour récupérer des fusils et des cartouches afin de mener une révolution. Le film se veut assez simple dans sa démarche, mais il est aussi complexe dans la présentation de ses personnages. Car ici, personne n’est manichéen et chaque protagoniste a une part d’ombre et une part de lumière.
C’est d’ailleurs ce qui fait toute la saveur de ce western crépusculaire qui n’hésite pas à faire parler la poudre. Car si l’écriture est limpide et la narration assez classique (avec une paire de flashbacks tout de même), le film propose des personnages ambigus, intéressants et avec beaucoup de relief. Ainsi donc, on va suivre des bandits qui n’hésite pas à tuer pour braquer une banque ou échapper à d’autres malfrats. Pour autant, ces personnages seront attachants et on sentira une forte empathie pour eux. Cela est tout simplement dû à une caractérisation forte et à des caractères bien trempés. Malgré leur soif d’or et leur envie de liberté, malgré leur violence, ils seront bienveillants entre eux et avec des peuples étrangers qu’ils vont aider. Bien évidemment, il y aura une dualité entre le chef des bandits et le chef des poursuivants, avec un historique qui sera expliqué.
Des femmes, du vin, des balles
Si ces personnages sont empathiques, cela ne les empêche pas d’être parfois détestables. Souvent moqueurs, bouffant la vie à pleine dents, on aura droit à des hommes qui ne veulent que richesse, gloire et des femmes. Certaines séquences seront parfois limites, comme ce moment de fête avec des prostituées où l’on voit que les hommes perdent les pédales et se font moins respectueux. On verra aussi la perfidie de certains, avec des remarques racistes ou des égoïsmes qui vont se faire plus marquants. Derrière la camaraderie, derrière l’entraide, il y a tout de même quelques trahisons et des choix qui feront mal. Des choix spontanés, comme on peut le voir lorsque Angel tue sa femme, qui tombe dans les bras d’un dictateur. Malgré toute l’empathie que l’on peut ressentir pour eux, on reste face à des êtres humains qui ont des défauts, des impulsions mal placées.
D’ailleurs, ce qui fait la force de La Horde Sauvage, en dehors de ces personnages très forts et très marqués, c’est sa violence exacerbée. Sam Peckinpah relâche toute sa frustration à travers son film. D’ailleurs, à l’époque, le film a choqué, avec des coupes pour la sortie en salle. Cette violence, elle est inhérente aux hommes. Le réalisateur prouve avec ce film que malgré la camaraderie, la fidélité, la bonté parfois, les rires, il y a ce besoin de violence, de mort, de sang. La Horde Sauvage est presque une ode à la violence humaine. Et dès le départ, on est mis dans le bain avec une fusillade mortelle, qui va tuer dans les deux camps, mais aussi des innocents qui se trouvent dans la rue au mauvais moment. Des innocents qui se feront pas la suite dépouiller par des malfrats sans scrupule.
Comme la violence est belle
Cette violence, elle éclate pleinement à la toute fin, dans une fusillade d’anthologie, qui reste le moment le plus marquant du film. Plus de 90000 balles ont été utilisées pour faire cette scène, qui aura nécessité douze jours de tournage. Mais ce n’est pas la seule scène où la violence éclate. On peut aussi noter l’explosion du pont avec les chevaux, ou encore lorsqu’Angel se fait trainer derrière une voiture. Sam Peckinpah maîtrise parfaitement son art. Il fait éclater son talent avec des séquences d’une rare virulence qui font mouche à chaque fois. Derrière ses éclats sanguinolents, le réalisateur fait preuve d’une maestria pour mieux nous plonger dans ces fusillades et aux côtés de ces hommes en perdition, qui brûlent la vie par les deux bouts. De plus, cette mise en scène a du sens, faisant écho au fond du film, cette violence qui est propre à l’humanité.
Au final, La Horde Sauvage est un vrai chef-d’œuvre. Il s’agit d’un film qui a du sens dans ce qu’il raconte, mais aussi dans ce qu’il montre. Loin de toute violence graphique inutile, le réalisateur américain éjecte toute sa violence à travers un film solide, où les personnages éclatent de toute leur dualité. Ambigu, percutant, prenant aux tripes, La Horde Sauvage est une belle réponse au western spaghetti, posant même les jalons d’un genre qui ne va faire que s’étoffer au fil des années, celui d’un western américain crépusculaire, âpre et abordant de nouveaux thèmes.
Note : 18/20
Par AqME