De : Pablo Larrain
Avec Mariana Di Girolamo, Gael Garcia Bernal, Paola Giannini, Santiago Cabrera
Année : 2020
Pays : Chili
Genre : Drame, Thriller
Résumé :
Ema, jeune danseuse mariée à un chorégraphe de renom, est hantée par les conséquences d’une adoption qui a mal tourné. Elle décide de transformer sa vie.
Avis :
Réalisateur chilien, Pablo Larraín est l’une des étoiles montantes de ce cinéma, ne faisant que piquer de plus en plus à vif l’intérêt de films en films. Ayant un penchant pour la politique, Pablo Larraín s’est fait remarquer avec l’excellent « No« , puis il a livré un chef-d’œuvre « El Club« . Le film est une claque bien trop méconnue. Pour conclure ses années 2010, le metteur en scène a livré en 2017, à un mois d’intervalle, deux très bons biopics, l’un consacré à Pablo Neruda et l’autre à Jackie Kennedy.
Cela faisait trois ans maintenant qu’on n’avait plus de nouvelles de Pablo Larraín, puis « Ema » et sa magnifique affiche a pointé le bout de son nez. D’abord prévu à l’été 2020, finalement, le huitième film de Pablo Larraín est placé pour la rentrée et si le film m’intéressait énormément, avec le Covid, il eut une très courte carrière en salle, du coup, je me rattrape aujourd’hui avec sa sortie en DVD et Blu-ray et je dois bien avouer, avec la plus grande des tristesses, que le film se pose comme une terrible déception. Magnifique visuellement parlant, d’une beauté à tomber à la renverse, ce « Ema » aura bien du mal à convaincre dans son intrigue, et c’est dommage, car l’idée de cette dernière avait de quoi la rendre intéressante, malheureusement, son réalisateur préférera se concentrer sur l’esthétisme de son film, ce qui donne un film hybride, qui part dans tous les sens et surtout un film devant lequel on s’ennuie ferme.
Ema est une jeune femme qui voit son couple se fissurer après une adoption qui s’est mal passée. Pleine de regrets et de remords, Ema trouve un refuge dans son métier, la danse, mais celui-ci n’arrivera pas à la canaliser et bientôt Ema va changer de vie.
Je l’ai attendu presque amoureusement ce « Ema« , il faut dire que Pablo Larraín avait sorti une certaine artillerie lourde pour donner envie de découvrir son nouveau-né. Son affiche est sublime, sa bande-annonce est parfaite, la musique est signée Nicolas Jaar, compositeur chilien qui fait souvent des propositions intéressantes et surtout inhabituelles. Puis enfin, « Ema« , c’était l’occasion de revoir le très talentueux Gael García Bernal chez Pablo Larraín après « No » et « Neruda« .
Mais voilà, la somme de tout ceci n’aura pas suffi et « Ema » se pose comme un film vraiment décevant. Décevant car on a bien du mal à comprendre l’histoire que nous raconte Pablo Larraín et au-delà de la compréhension, on a bien du mal à y croire, car plus le film avance et plus il apparaît comme creux et absolument pas touchant. C’est même tout le contraire qui se produit, puisque cette histoire de manipulation, qui se veut bien cruelle, finit par être risible au final. On se demande comment l’auteur de « El Club » et « Jackie » a pu nous entraîner dans une histoire comme celle-ci. Pour accompagner cette histoire, on ne pourra même pas se raccrocher à ses personnages, car tous ou presque sont assez détestables et surtout, on a bien du mal à cerner son héroïne. On a du mal à comprendre ce qui s’est passé autour de cette adoption, puis on a du mal à comprendre le but et le plan d’Ema pour avoir une famille et puis on en revient aussi au fait qu’on ait du mal à croire à ce plan. Cependant, si les personnages ne sont absolument pas touchants, il faut dire que dans une certaine mesure, ils sont plutôt bien tenus par Mariana Di Girólamo, Gael García Bernal, Paola Giannini ou Santiago Cabrera.
Du côté de la mise en scène de Pablo Larraín, là encore, c’est un sentiment très partagé qui s’élève de l’ensemble. S’il est clair que son film est magnifique, qu’il est d’une beauté à tomber par terre dégageant beaucoup de poésie, Larraín pousse son esthétisme à un très haut niveau. Sa photographie est irréprochable, colorée, ou clippé, ou encore intime ou glauque quand il le faut. Mais voilà, derrière tout ça, « Ema » laisse la sensation d’un exercice de style, du genre « regardez comment je sais bien filmer », « regardez les images que je vous ai concoctées ». Si le film est truffé d’idées visuelles magnétiques et bluffantes, elles apparaissent aussi comme gratuites et incompréhensibles et elles apportent bien des questions auxquelles il n’est pas la peine de chercher de réponses tant ces idées ont l’air d’exister que pour l’esthétisme (si quelqu’un a compris pourquoi Ema fout le feu partout en ville, je veux bien une réponse). Mais à la rigueur, l’esthétisme du film aurait suffi à nous « hypnotiser », malheureusement, ce ne sera pas le cas et comme je le disais, l’un des points les plus agaçants avec « Ema« , c’est que l’on s’y ennuie et que chaque minute passe comme deux ou trois. Du coup, « Ema« , alors même qu’il ne dure qu’une petite heure quarante-sept, est interminable. Sensation encore plus décuplée avec le fait qu’on ne ressente rien pour ces personnages.
Bref, « Ema » est donc une belle déception. Magnifique esthétiquement parlant, et ennuyant au possible dans son intrigue, et c’est tellement dommage. À force de se concentrer sur la forme, on passe à côté du fond et « Ema » en est un magnifique exemple. J’attends le prochain Pablo Larraín avec une certaine forme d’impatience, dans l’espoir qu’il me fasse vite oublier celui-ci.
Note : 08/20
Par Cinéted