décembre 10, 2025

Enthroned – Ashspawn

Avis :

Scène extrême parmi les extrêmes, le Black Métal est toujours vu sous le prisme du satanisme et d’une musique de fou furieux. Il faut dire que de nombreux groupes jouent de cette image, et souhaitent garder une reconnaissance plus ou moins underground. Groupe qui a monté progressivement les échelons, Enthroned possède tout de même un chemin parsemé d’embûches. Fondé en 1993 à Namur, le groupe va connaître d’incessants changements de line-up, avec dix-neuf musiciens à être passés par là, pour être relocalisé à Bruxelles en milieu de carrière, et aujourd’hui, il n’y a plus un membre d’origine, et le trio est un mélange de polonais, belge et portugais. Pour autant, cela n’empêche pas le groupe de sortir de nouveaux albums, comme le dernier né, Ashspawn, qui a déboulé chez Season of Mist, six ans après le précédent opus, Cold Black Suns.

Pour cet album, le groupe accueille un nouveau guitariste, en la présence de T. Kaos, qui fait partie de plusieurs groupes de Black en Pologne et en Angleterre, comme Death Like Mass ou Lvcifyre. Il s’occupe aussi des lignes de basse, ce qui ne doit pas être évident, notamment sur scène, mais il faut espérer que la formation a quelques artistes dans ses fonds de tiroir. Bref, Ashspawn est le douzième album de Enthroned, et le moins que l’on puisse dire, c’est que le groupe est plutôt en forme, et signe un retour à des racines old school. En effet, après plusieurs écoutes, ce qui ressort de cet album, c’est son aspect rugueux, nihiliste, qui exhorte toute forme de modernité dans ses sonorités, sinon quelques emballages mortuaires pour mieux nous plonger dans une ambiance infernale. Un moyen de faire ressortir son côté sombre en ne faisant strictement aucune concession.

Et tout commence dans le chaos avec Crawling Temples. Le début ressemble à une litanie faite dans une tempête de neige, et on a vraiment cette sensation de quelque chose de rampant qui arrive sur nous. Rapidement, les riffs prennent une place importante, avec une voix gutturale qui possède beaucoup de reverb, comme si une déité issue des enfers venait nous gueuler dessus. C’est à la fois poignant et impressionnant, nous faisant sentir tout petit face à un monolithe noir et brutal. Néanmoins, on va vite se rendre compte qu’il n’y aura rien de nouveau d’un point de vue Black métal. Le groupe se contente de faire ce qu’il sait faire, et même si c’est parfois un plaisir régressif que de revenir à des racines sombres, c’est parfois un aveu de faiblesse et de facilité. Heureusement, le groupe ne s’arrête pas à ça.

Techniquement, les guitares ont le beau rôle, et profitent de quelques baisses de régime pour mieux jouer sur les arpèges et nous surprendre. Basilisk Triumphant continue ce travail de sape avec un Black calibré et qui renoue avec les années 90. Mais on notera quelques jolis solos de guitare, ainsi qu’une ambiance qui se détériore, jusqu’à un cri inhumain, spectral, qui viendra nous glacer le sang. Puis Stillborn Litany sera un vrai torrent machiavélique, dont le démarrage résonne comme une potentielle fin du monde. Encore une fois, le groupe ne réinvente pas la sauce, mais il délivre un son lourd et puissant, qui nous réduit à de tout petits êtres sans défense. Puis Ashspawn tombera dans une hyper violence torrentielle, le blast à la batterie sera de mise, et les riffs iront à une vitesse de zinzin. Cette brutalité demeure tout de même mesurée, avec une volonté d’imposer une mélodie.

Il est sûr que les néophytes seront décontenancés par autant de virulence, mais le groupe retombe toujours sur ses pattes. Raviasanim en est un exemple parfait avec son démarrage en trombe et ses litanies infernales. On ressent un sentiment d’oppression et froideur qui sied à merveille au genre. Enthroned n’est pas là pour rigoler, et on en prend plein les tympans. Sightless sera un peu moins volumineux que les autres titres. Plus court, plus concis, le morceau se fait aussi moins percutant que les autres. Tout comme Chrysalid qui manque d’une identité plus marquée. Rien de bien méchant, mais on a l’impression d’avoir des titres bouche-trous. Heureusement, Ashen Advocacy viendra relever le niveau, avec un jugement des enfers maous, où le marteau d’un juge vient rythmer un titre d’excellente facture. Puis Assertion vient clôturer en trombe un album très massif, quasiment monolithique.

Au final, Ashspawn, le dernier album d’Enthroned, est un effort solide et relativement intéressant, notamment dans sa gestion de l’horreur et d’une ambiance pesante. La formation ne fait aucune concession, ne cède jamais aux sirènes de la modernité, et délivre un album old school savamment orchestré pour nous saper le moral. Un disque parfait pour l’hiver, qui frappe fort et qui fera sans doute un grand plaisir aux amateurs de Black Métal traditionnel.

  • Crawling Temples
  • Basilisk Triumphant
  • Stillborn Litany
  • Ashspawn
  • Raviasanim
  • Sightless
  • Chrysalid
  • Ashen Advocacy
  • Assertion

Note : 15/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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