
Titre Original : 8-ban Deguchi
De : Genki Kawamura
Avec Kazunari Ninomiya, Yamato Kôchi, Naru Asanuma, Kotone Hanase
Année : 2025
Pays : Japon
Genre : Horreur
Résumé :
Un homme piégé dans un couloir de métro cherche la sortie numéro 8. Pour la trouver, il faut traquer les anomalies. S’il en voit une, il fait demi-tour. S’il n’en voit aucune, il continue. S’il se trompe, il est renvoyé à son point de départ. Parviendra-t-il à sortir de ce couloir sans fin ?
Avis :
Genki Kawamura est un nom qui circule depuis déjà un moment dans le cinéma japonais, mais plus particulièrement dans le monde de la production et de l’écriture. On lui doit d’abord des romans à succès, comme « If Cats Disappeared from the World« , adapté au cinéma, et surtout une carrière de producteur où il a accompagné des films marquants comme « Your Name » de Makoto Shinkai. Autant dire que ce n’est pas un inconnu au Japon. Du côté de la mise en scène, il s’est fait remarquer assez récemment avec « N’oublie pas les fleurs« , un drame intime sur la mémoire et l’Alzheimer. Avec « Exit 8« , il change totalement de registre.

En effet, le réalisateur nous revient avec un film conceptuel. Pour ma part, j’ai plus ou moins aimé. Ce n’est pas un coup de cœur, mais ce n’est pas non plus un rejet. J’ai aimé l’ambiance mystérieuse, cette impression de malaise qui s’installe et qui ne te lâche pas. J’ai aimé l’idée de la métaphore, le côté aliénation de la population, comme si chacun avançait sans jamais sortir de sa boucle. J’ai aussi apprécié la mise en scène, même si je trouve qu’il manque parfois de précision, comme si Kawamura avait le concept mais n’avait pas toujours les outils pour aller au bout et nous donner des indices autour de son idée de boucle. C’est donc entre fascination et frustration que je me suis laissé prendre par cette nouvelle originalité venue encore une fois du Japon.
« »Exit 8 » tient bien son idée de manière générale. »
Dans une station de métro presque déserte, un homme remarque quelque chose d’étrange. Il prend un couloir numéroté qui doit mener à la sortie 8, mais plus il avance et plus il revient toujours au même endroit. Le temps passe, mais rien ne change. Puis il remarque un panneau qui dit ceci :
« Ne négligez aucune anomalie.
Si vous en voyez une, faites demi-tour.
Si vous n’en voyez pas, continuez d’avancer.
Prenez la sortie 8. »
« Exit 8 » est un film qui, dès les bandes-annonces, donnait sacrément envie. Film qui repose sur un concept, « Exit 8 » tient bien son idée de manière générale. Comme le personnage principal, on est piégé dans ce concept qui se fait très appréciable, contrairement à l’homme perdu. C’est une proposition aussi originale que radicale. Le film est très particulier, et ça ne plaira pas à tout le monde. Mais ça a le mérite de proposer quelque chose de différent, de sortir du cinéma attendu. Genki Kawamura construit son récit en trois chapitres, chacun suivant un personnage différent qui se retrouve piégé dans cette boucle. C’est malin parce que ça permet de varier les approches, les points de vue, les comportements. Ça garde le spectateur en éveil.
Mais en même temps, on reste avec ce manque : on aurait aimé en savoir plus. Pourquoi ? Comment ? Qu’est-ce qui se cache derrière ce piège ? Certes, ça ouvre des réflexions personnelles, chacun peut projeter ce qu’il veut, mais ça laisse aussi la sensation qu’il manque quelque chose, comme si le concept était arrivé et qu’on avait décidé de ne pas aller plus loin. Comme si le film ne tenait que sur son concept. Certes, ça le fait, comme je le dis, mais il ne faut pas essayer de gratter plus on va dire, car je ne suis pas sûr qu’on trouve quelque chose sur le fonctionnement de ce cauchemar.
« »Exit 8 » joue beaucoup avec la métaphore. »
Derrière ça, dans ce que le film raconte, « Exit 8 » joue beaucoup avec la métaphore. La boucle, l’infini, le chiffre 8 signe de l’infini, et ce n’est pas un hasard. Le film s’amuse avec ça, mais il va aussi plus loin en parlant de la folie. La folie de refaire ce parcours encore et encore, dans l’espoir de s’en sortir, alors qu’on sait que ça ne mène nulle part. Impossible de ne pas faire le parallèle avec notre société : métro, boulot, dodo, cette impression d’être enfermé dans un cycle qui se répète sans fin. Et au milieu de ça, Genki Kawamura pose la question de l’avenir. Est-ce qu’on en sort en ayant des enfants, en créant une suite ? L’enfant devient symbole d’avenir, de progression possible, quand tout le reste n’est que répétition. C’est subtil, mais c’est là, et c’est plutôt bien vu.
Du côté de la mise en scène, ça se tient. Le film est bien construit visuellement, l’ambiance est pesante, ça joue sur les lumières artificielles, sur les sons du métro, sur le vide des couloirs. Mais parfois, c’est un peu le boxon. Genki Kawamura pousse le curseur vers le film de genre, avec des effets qui flirtent avec l’horreur ou le fantastique, et ça donne un mélange un peu inégal. C’est bien mis en scène, oui, mais comme il manque une justification claire ou même un indice solide, on peut se sentir perdu. Coincé dans la boucle comme les personnages, à se demander si ça va finir par sortir ou si ça va juste se répéter encore et encore.
Les acteurs, eux, tiennent le film. Quatre comédiens et chacun apporte quelque chose de différent, une intensité, une émotion, qui donnent de la consistance à cette étrange histoire. Leurs personnages pourraient très bien être ceux d’un épisode de La Quatrième Dimension. Il y a ce côté fable, conte absurde, qui fonctionne bien.

« Exit 8 » est un film qui s’avère malgré tout intéressant et prenant. C’est beau, c’est intrigant, ça tient une ambiance et une métaphore fortes. Ça fonctionne, mais ça ne plaira pas à tout le monde. Les amateurs de cinéma radical, d’expériences étranges, trouveront sans doute de quoi s’accrocher. Les autres risquent de s’ennuyer ou de décrocher face à ce récit qui se répète sans fin. Personnellement, j’ai aimé sans adorer. J’ai aimé l’ambiance, la métaphore, les acteurs. J’ai regretté le manque de précision, le manque d’indices. Mais je reconnais à Genki Kawamura une vraie audace, celle d’avoir osé proposer quelque chose de différent, loin des sentiers battus. Et rien que pour ça, « Exit 8 » mérite d’être vu, et même d’être revu, histoire de voir si quelques indices, au deuxième visionnage, se laissent entrevoir.
Note : 13/20
Par Cinéted