Titan A.E. – Don Bluth et la SF

De : Don Bluth et Gary Goldman

Avec les Voix Originales de Matt Damon, Bill Pullman, Drew Barrymore, Janeane Garofalo

Année : 2000

Pays : Etats-Unis

Genre : Animation

Résumé :

En l’an 3028, la Terre est anéantie par des créatures venues d’une lointaine galaxie, les Drej. Les rares survivants du drame tombent aux mains de cette cruelle race d’extraterrestres, qui les réduisent à l’esclavagisme. Quinze ans plus tard, le jeune Cale découvre, à l’intérieur d’une bague que lui avait léguée son père, les coordonnées d’un mystérieux vaisseau spatial : « Titan », ultime planche de salut du genre humain. Aidé par le capitaine du « Valkyrie », Kordo, et son intrépide copilote Akima, Cale se lance à la recherche de « Titan » et d’un monde nouveau.

Avis :

Dans le monde de l’animation, Don Bluth fait figure d’électron libre. Travaillant pendant un temps pour Disney (notamment sur Robin des Bois et Rox et Rouky), c’est dans les années 70 qu’il décide de faire cavalier seul et de créer Don Bluth Productions. Après un téléfilm sorti en 1979, il sort son premier long-métrage en 1982, Brisby et le Secret de Nimh, qui sera un excellent film, mais qui ne va pas rencontrer le succès escompté. Alors au bord de la faillite, le cinéaste trouve des ressources avec l’investisseur Morris Sullivan, puis il arrive à faire produire son nouveau film par Steven Spielberg. Cela donnera Fievel et le Nouveau Monde, qui sera pour le coup, un immense succès. Durant les années 80 et 90, Don Bluth devient alors un immanquable de l’animation américaine, avec des films qui resteront gravés dans nos mémoires, comme Petit Dinosaure et la Vallée des Merveilles.

Au tout début des années 2000, il retrouve son ami Gary Goldman, avec qui il avait fondé sa première boîte de production, pour faire un dessin-animé de science-fiction ambitieux, Titan A.E. Voulant mélanger une animation 3D avec des incrustations 2D, le long-métrage s’annonçait complexe, surtout vu les inspirations des deux hommes, qui lorgnent aussi bien sur Le Cinquième Elément que sur Alien. Et effectivement, certaines choses ne furent pas aisées, la faute à une 3D encore balbutiante, et un effet relativement froid, avec un rendu qui ne correspondait pas forcément aux attentes des deux compères. Cependant, avec l’animation en 2D des personnages, les intentions de mettre des émotions auprès des protagonistes permet d’atténuer le côté presque numérique de l’ensemble. Mais avec plus de vingt ans au compteur, et avec nos yeux d’aujourd’hui, il est compliqué de faire fi de cette technique défaillante.

« Nerveux et sans aucun temps mort, le film tente de nous ne mettre plein la vue. »

Au niveau du scénario, il n’y a rien à redire. L’introduction nous met rapidement dans le bain, avec une confrontation entre l’humanité et une race d’alien, et cette dernière détruit la Terre. Heureusement, le père du héros arrive à s’enfuir avec un immense vaisseau qui se nomme Titan, et qui semble contenir l’avenir de l’humanité dans l’immensité du cosmos. Quinze ans plus tard, notre héros est une forte tête qui vit sur une colonie avec des extraterrestres, et sa vie va changer lorsqu’un homme vient le chercher pour lui dire qu’il est la clé de l’humanité, et qu’il possède un don pour retrouver le vaisseau de son père. De là, il intègre une équipe de mercenaires et il va se faire pourchasser par les aliens qui ont détruit la Terre. Nerveux et sans aucun temps mort, le film tente de nous ne mettre plein la vue.

Et il y arrive sans trop de mal. On a droit à des fusillades, des courses-poursuites, des tentatives d’évasion, on rencontre plusieurs races extraterrestres, et il y a beaucoup d’innovation et d’envie de création d’un univers à part entière. Néanmoins, on reste tout de même dans les clichés du genre en ce qui concerne les personnages. Le héros est une tête brûlée qui se la joue rebelle. Il va tomber amoureux de la seule passagère du vaisseau, Akima, qui, elle, demeure un simple faire-valoir. On a droit aussi au capitaine courageux mais qui cache un lourd secret, à l’alien imbu de lui-même qui est un peu tordu, ou encore à la créature belliqueuse au grand cœur et au scientifique au physique peu avantageux un peu zinzin. On reste dans un carcan que l’on connait, et seuls les physiques trouveront un peu de nouveauté là-dedans.

« Céder aux technologies n’est pas toujours une bonne idée… »

De plus, les ambitions de chacun seront assez visibles. Le film n’arrive pas vraiment à travailler chaque protagoniste avec rigueur. Si l’on excepte le héros, le capitaine et à la rigueur la rein alien qui veut buter l’humanité, on reste dans le tout-venant, avec des backgrounds totalement absents. En même temps, il est difficile de construire quelque chose de solide sur un tout petit peu plus d’une heure et demi. En ce sens, même si on peut ressentir une certaine empathie envers le héros, qui se retrouve dans une situation délicate malgré lui, on restera de marbre face aux autres personnages qui manquent d’épaisseur. Tout comme les grands méchants, dont les tenant et les aboutissants sont d’une maigreur décevante, étant mauvais pour être mauvais. Et cela ne permet de donner plus de dramaturgie à l’ensemble, ce qui est dommage.

A cela, il faut rajouter une animation qui a pris du plomb dans l’aile. Si les personnages en 2D sont relativement beaux et restent dans ce que Don Bluth a l’habitude de produire, on ne peut pas en dire autant de la 3D, et notamment des animations des vaisseaux, ou de tout ce qui concerne les différents paysages. Les textures sont lisses, il y a du flou pour masquer certaines imperfections, et globalement, ce n’est pas joli. Si on peut trouver de bonnes idées, comme ce passage dans des astéroïdes qui font un effet miroir, on reste souvent sur quelque chose qui manque de personnalité et de caractère. Une animation à l’ancienne aurait été plus percutante, et plus intéressante, surtout quand on connait le talent de Don Bluth et de ses comparses. Céder aux technologies n’est pas toujours une bonne idée…

Au final, Titan A.E. est un film qui n’est pas mauvais dans son intrigue et dans sa narration. Nerveux, plein de bonnes intentions, avec un héros assez charismatique, on se plait à suivre cette aventure qui ne manque pas de retournements de situations. Malheureusement, cela est un peu plombé par une animation qui manque de personnalité, et qui a mal vieilli, ainsi que par un traitement de personnages secondaires décevant. Sans être mauvais, ce film signé Don Bluth et Gary Goldman a pris un peu de rides avec les années, ternissant alors son image de film avant-gardiste…

Note : 13/20

Par AqME