
Avis :
Fondé au tout début des années 90 en changeant deux fois noms (Somuchhate et Infected), Hate est un groupe polonais qui officie à la lisière entre le Black et le Death. C’est sûrement pour cela que l’on nomme leur style le Blackened Death. Porté à bout de bras par Adam the First Sinner, le groupe va subir plusieurs changements de line-up et surtout, il va souffrir de la comparaison avec l’un de ses comparses, le géant Behemoth qui s’est construit autour de Nergal en 1991. Et si ce dernier a réussi à conquérir rapidement les cœurs, ce ne fut pas le cas de Hate, qui est resté un peu dans l’ombre. Mais ce n’est pas pour autant que ce dernier abdique, bien au contraire, contre vents et marées, le groupe polonais continue son bonhomme de chemin, et sort album sur album, notamment dans les années 2010.
Avec un skeud tous les deux/trois ans, Hate a été très prolifique récemment, jusqu’à un petit changement de line-up en 2020, avec l’arrivée d’un nouveau bassiste, et d’un nouveau batteur. Bellum Regiis est le deuxième album avec cette formation, mais le treizième du groupe, ce qui prouve le stakhanovisme impressionnant du frontman, qui semble être un bourreau de travail. Cependant, quantité ne veut pas dire qualité, et on aurait pus s’inquiéter pour ce nouvel effort, même si le groupe a pris quatre années pour le peaufiner. Et globalement, l’album est réussi, plongeant à corps perdu dans un registre que l’on connait par cœur, mais fait avec amour du genre, et surtout, une production solide, qui permet à Hate de mettre en avant une orchestration grandiloquente, donnant une autre dimension à certains titres. Comme Bellum Regiis qui débute le skeud avec maestria.
Le début est très beau, avec une guitare qui donne un ton lugubre, avant d’enclencher le blast de la batterie, couplant aussi un chant guttural profond avec une voix féminine à tomber par terre. Par la suite, le morceau suit un chemin plus classique, avec un mélange virulent et percutant de Black et de Death, et on va en prendre plein la tronche. Cependant, tout extrême soit le genre, il reste ici accessible et relativement mélodique, avec quelques passages très plaisants. De plus, l’ambiance éthérée qui en ressort de temps à autre fait du bien, étant raccord avec l’univers du groupe. Iphigenia, qui arrive derrière, suit scrupuleusement le même schéma structurel. Le début est peut-être plus violent, plus rentre-dedans, mais il y a une véritable construction qui s’établit, et surtout, on continue à avoir une immense production qui donne de l’épaisseur à l’ensemble.

D’ailleurs, on n’est jamais loin d’un petit côté épique, qui donne une dimension pleine au titre. The Vanguard sera peut-être moins subtil dans son démarrage, mais il trouvera de la ressource en son sein, avec notamment un excellent solo, et de belles variations, notamment quand il faut apporter de la lourdeur. Puis, A Ghost of Lost Delight viendra piquer notre curiosité avec un côté plus bas du front, tout en jouant avec une mélodie qui use de petits gimmicks pour se faire remarquer. Malheureusement, le titre manque d’éléments vraiment pertinents pour nous embarquer pleinement dans son délire. Après cela, Rite of Triglav sera un interlude qui permettra alors de donner plus de poids à l’excellent Perun Rising. Ici, on retrouve le côté presque symphonique du début, avec une production solide et quelques éléments lyriques qui apportent un poids supplémentaire. Un excellent titre qui montre la belle forme du groupe.
Pour les trois derniers morceaux, le groupe va aller à l’essentiel, et arrêter de faire des titres qui dépassent les cinq minutes. Ici, on va vers des morceaux qui lorgnent sur les quatre minutes, et qui vont plus facilement à l’essentiel, tout en n’oubliant quelques mélodies intéressantes. Alfa Inferi Goddess of War en fait partie, avec une guitare qui joue de jolis arpèges qui restent accrochés à nos oreilles. Prophet of Arkhen sera plus virulent, plus percutant dans son chant, avec une voix gutturale qui semble sortir d’outre-tombe. Puis enfin, Ageless Harp of Devilry rentre en plein dans le délire Blackened Death, ne nous laissant que peu de répit, avec une rythmique infernale, un blast quasi continuel à la batterie, et des riffs qui semblent accélérés tellement tout va vite. Bref, le final de l’album ne fait pas dans la dentelle, et c’est tant mieux.
Au final, Bellum Regiis, le dernier album de Hate, est une belle réussite, encore faut-il accepter de rentrer dans un univers violent et sans précédent. Le groupe polonais propose un début très construit et fouillis, pour ensuite se décrasser sur les trois derniers morceaux, afin de mieux nous frapper les tympans. Le résultat est prenant, même si on pourrait reprocher à la formation de rester dans une zone de confort et de ne pas prendre plus de risque. Mais en l’état, on fait face à un gros morceau qui envoie du lourd, du très lourd.
- Bellum Regiis
- Iphigenia
- The Vanguard
- A Ghost of Lost Delight
- Rite of Triglav
- Perun Rising
- Alfa Inferi Goddess of War
- Prophet of Arkhen
- Ageless Harp of Devilry
Note : 15/20
Par AqME